• B – L’extension du consensualisme : la théorie des contrats innommés et des pactes

     

    Rappel : vision étroite et concrète du C en dt romain → le C (formel, réel ou consensuel) est une convention (accord des volontés) expressément définie, nommée par le dt et sanctionnée par une action. En dehors des catégories reconnues par le dt, les conventions sont inefficaces :

     

    « Du pacte nu ne naît aucune action » (Paul)

     

    Pacte nu : une convention qui ne correspond à aucun modèle admis en vue de produire des obligations.

    Conséquence : le consentement n’est en principe pas créateur d’obligation (il l’est dans le cadre de qqs exceptions : vente, louage, société, mandat)

    La nouveauté: recours de plue en plue fréquent en pratique au pacte nu, à la convention (negocia), incompatible avec une typologie par nature insuffisante et inadaptée. Préteurs et jurisprudents ont adapté le dt à la pratique en élargissant le champ d’application du consensualisme grâce à la théorie des C innommés et la reconnaissance de certains pactes.

     

    Théorie des contrats innomés

     

    Principe : toute cvtion qui ne peut entrer dans aucune catégorie de C existant (nommé), mais qui a été exécutée par l’une des parties alors qu’elle engendre des obligations réciproques peut être qualifiée de C et donc assortie d’une action.

     

    En partant de cette définition, il est possible de dégager :

    1. les éléments constitutifs du C innommé
    2. une classification théorique de ces C
    3. leur sanction

     

    a / les éléments constitutifs du contrat innommé

    pour que se forme un CI (C innommé), il faut :

    1. une convention (accord des volontés)
    2. que cette convention ne soit pas un C nommé (inclus dans la typologie existante)
    3. qu’elle engendre des obligations réciproques (dare, facere/non facere, praestare)
    4. qu’elle ait fait l’objet d’une exécution unilatérale (que l’un des contractants ait exécuté la prestation mise à sa charge)

    Très important : le CI n’est formé qu’à la condition que cette prestation unilatérale ait été exécutée.

    Question : on peut légitimement s’interroger sur la nature de ce C. S’agit-il d’un C réel (formé par la remise d’une chose)?

    Négatif : deux raisons à cela,

    1. parce que la prestation exécutée ne consiste pas forcément en la remise d’une chose (ce peut être un facere ou non facere)
    2. parce que dans le C réel, celui qui a reçu la chose doit rendre exactement ce qu’il a reçu, ce qui n’est pas le cas ici, dans l’hypothèse où la partie qui s’est exécutée a remis une chose à son cocontractant : ce dernier peut faire ou ne pas faire, rendre une chose différente… en somme il doit fournir une contrepartie de nature différente.

    Conséquence : il s’agit bien d’une situation contractuelle « non identifiée », qui n’entre dans aucune des catégories sanctionnées.

    Autre définition possible du CI : convention synallagmatique qui devient obligatoire par l’exécution que l’une des parties fait de son obligation.

    Les situations susceptibles de correspondre à ce schéma sont innombrables. Les jurisconsultes ont donc proposé une classification en 4 catégories ou combinaisons théoriques.

     

    b / classification des contrats innomés

    do ut des : je donne pour que tu donnes (ex / l’échange)

    do ut facias : je donne pour que tu fasses

    ex / donation avec charge : le donateur exige du donataire qu’il fasse qqc en contrepartie de la donation (verser une pension alimentaire, une rente, payer les créanciers du donateur…)

    ex / exemple typique de l’époque (dont font état les sources) : « je te donne mon esclave x pour que tu affranchisses ton esclave y » (hypothèse où y était l’enfant naturel du maître de x)

    facio ut des : je fais qqc pour que tu me donnes qqc (ex / le contrat estimatoire / aestimatum, également typique de cette période)

    → contrat en vertu duquel un marchand / fabricant remet des marchandises à un colporteur en simple détention. Il en estime le prix (ex/ 100) et charge le colporteur de les vendre. Si le colporteur vend l’objet au prix estimé, il devra verser 100 au marchand, s’il vend plus cher (150), il versera 100 et conservera pour lui la différence (50) ; s’il ne vend pas, il devra restituer la marchandise.(c’est bien une convention qui n’entre dans aucun cadre de C connu, même s’il se rapproche de la vente, du louage, de la société, du mandat, du dépôt ; mais il n’est assimilable à aucun d’eux)

    facio ut facias : je fais pour que tu fasses

    ex / transaction : elle peut intervenir entre les partie à un procès, pour y mettre fin. L’un des plaideurs fait qqc (il verse par exemple une somme d’argent, mais ce peut être une prestation d’une autre nature), tandis que l’autre renonce à agir (facio ut non facias)

     

    Toutes ces opérations, pour être créatrices d’obligations, doivent être sanctionnées.

     

    c / la sanction des contrats innommés

    La démarche d’extension du champ des obligations contractuelles n’est plus ici empirique (« sédimentation » contractuelle qui répond à un besoin, dépourvue de logique théorique). La sanction des C innommés résulte au contraire d’une construction théorique, qui repose sur l’abstraction (ce qui est très nouveau). Ce sont les jurisprudents qui sont à l’origine de cette démarche : on définit de manière abstraite, théorique les éléments constitutifs du C innommé et on accorde une action pour tous les cas – pratiques –  qui épouseront ce schéma théorique.

    En réalité, sous Justinien, celui qui a exécuté sa prestation dispose de deux types d’actions contre son cocontractant défaillant :

    ► une action visant à l’exécution de la contre prestation (elle consiste à demander des dommages intérêts exorbitants afin de contraindre le débiteur à exécuter sa prestation en nature : celle-ci étant moins onéreuse pour lui qu’une indemnisation exagérée)

    ► deux actions visant à la résolution du contrat (sanction qui consiste à effacer rétroactivement les obligations nées d’un C synallagmatique, lorsque l’une des parties n’exécute pas sa prestation). Le créancier agit alors en répétition de la chose transmise (en cas de dare ou praestare), ou en répétition de la valeur de la prestation effectuée (facere / non facere)

     

    Une ultime question se pose concernant les CI : sont-ils vraiment consensuels et ont-ils dès lors participé à l’extension du consensualisme ?

     

    d / Nature mixte des contrats innommés

     

    Avec le CI, le consensualisme progresse puisque la naissance de l’obligation suppose un accord des volontés. Cependant, cet accord des volontés ne suffit pas puisque l’on exige aussi l’accomplissement d’une prestation (exécution unilatérale de l’une des obligations réciproques).

    Que dire alors de la nature de ce contrat ?

    1. ce n’est pas un C purement consensuel (puisque l’accord des volontés ne suffit pas)
    2. il s’agit d’une opération mixte, à la fois consensuelle et onéreuse : le caractère onéreux renvoie ici à l’exécution unilatérale de l’une des obligations réciproques (accomplissement d’une prestation), élément « onéreux » nécessaire à la formation du C (et non pas élément « réel » puisque cette prestation, encore une fois, ne consiste pas forcément en la remise d’une chose).

    → En dépit de leur nature « hybride », « l’apparition des C innommés est une étape importante dans l’évolution vers la liberté contractuelle » (Jean DAUVILLIER), liberté contractuelle jamais acquise en droit romain.

     

    Conclusion sur les C innommés : ils contribuent à l’élargissement du champ des O contractuelles, mais n’épuisent pas encore tts les possibilités d’obligations licites. Restent encore en dehors du dt  les simples accord, les conventions ou « pactes nus », auxquels le droit romain ne reconnaît pas d’efficacité, faute de sanction.

     

    2° -  La reconnaissance de certains pactes

    En principe, un pacte (convention – accord des volontés – non sanctionnée) n’est pas créateur d’obligation puisque « du pacte nu ne naît aucune action ».

    La rigueur du principe sera atténuée par la reconnaissance de certains pactes, en raison de leur utilité pratique (réponse empirique à un besoin).

    La jurisprudence et le préteur ont admis deux catégories de pactes privilégiés : les pactes adjoints et les pactes prétoriens. Le mouvement s’est poursuivi au BE avec la sanction des pactes légitimes par les constitutions impériales.

     

    a  /  pactes adjoints

    Il s’agit de pactes (conventions) « attachés », joints à un contrat existant (appartenant à une catégorie connue et sanctionnée : contrat formel ou consensuel). On dit qu’ils ne sont pas autonomes. Ce sont les jurisconsultes du BE qui ont élaboré la théorie des pactes adjoints, en les considérant comme faisant partie du contrat qui leur sert de support.

    La sanction de ces pactes n’est autre que l’action du contrat principal qu’ils viennent  compléter ou modifier (pas d’action distincte et spécifique au pacte joint).

    Classification :

    1. les pactes « de renforcement », qui tendent à augmenter ou renforcer l’obligation principale
    2. les pactes « minutoires » qui diminuent l’obligation principale
    3. les pactes conclus en même temps que le contrat principal et les pactes conclus après

    Efficacité : tous ne sont pas créateurs d’obligations. Leur efficacité – et donc leur sanction – dépend à la fois du contenu et du moment de la conclusion. Par exemple la jurisprudence refuse de donner effet à un pacte de renforcement conclu tardivement (bien après le contrat principal). La conclusion « simultanée » est ici un critère favorable à la reconnaissance de ces pactes.

    Exemples :

    le pacte de distrahendo : joint au gage (contrat réel apparu à l’époque classique), il permet de faire du gage une véritable compensation, et non plus seulement un moyen de pression (les partie convenant dans le pacte que le créancier gagiste pourra se payer sur la chose à l’échéance de la dette, en cas de défaillance du débiteur). Pour lui donner effet, le créancier gagiste utilisera l’action qui sanctionne le C de gage (actio pigneraticiapignus : gage).

    le pacte commissoire : joint à la vente, il permet au vendeur d’obtenir la résolution du contrat pour non paiement du prix (l’action en résolution n’existant pas de plein droit pour les contrats nommés, à cause de l’indépendance des obligations réciproques). Pour lui donner effet il mettra en œuvre l’actio venditi qui lui est reconnue par le contrat principal.

     

    b / pactes prétoriens

    Oeuvre du préteur (d’où leur nom)

    Aucune abstraction dans la démarche : on sanctionne les pactes les plus usuels, ceux qui correspondent à un besoin de la vie éco ou jdq

    Ce sont des pactes autonomes (créateurs d’O en eux mêmes, indépendants de tout autre contrat), sanctionnés par une action qui leur est propre.

    Classification :

    -         pacte de constitut

    Engagement de payer à une date fixe une somme d'argent déjà due (en vertu d'une obligation antérieure) : ce type de pacte a surtout été utilisé pour octroyer un report de dette (le créancier accorde un délai supplémentaire mais renforce la sanction en cas de non paiement à la deuxième échéance, car l'action particulière du pacte de constitut n'a pas les mêmes conséquences que l'action du contrat initial).

    -         Le préteur a également validé trois types de pactes qui figurent dans son édit sous l'appellation recepta : receptum arbitrii / receptum argentarii / receptum des bâteliers, aubergistes et maîtres d’écuries

    • receptum arbitrii: deux personnes décident de confier le règlement d'un litige à un arbitre qui accepte la mission (il s'agit donc d'une convention entre les parties d'une part et l'arbitre d'autre part). L'arbitre est tenu vis à vis des parties en vertu de ce pacte.
    • receptum argentarii: pacte par lequel un banquier (argentarius) consent sur demande de son client à payer une somme d'argent à un tiers.
    • receptumdes bâteliers, aubergistes et maîtres d'écurie, qui sont en vertu de ce pacte responsables des bagages, marchandises qui leur sont confiées par leurs clients (il s'agit d'assurer la protection des voyageurs victimes de transporteurs ou hôteliers malhonnêtes / les professionnels répondent des pertes, vols ou détériorations qui se produisent dans leurs locaux ou navires, sauf cas de force majeure)

    -         pacte de serment

    deux parties en litige (soit avant un procès, soit en cours de procès) concluent un pacte de serment, ce qui revient à s'en remettre à la preuve du serment pour mettre fin à leur différend : si au cours du procès, une des parties demande à l'autre d'appuyer ses prétentions d'un serment, l'adversaire ne peut s'y soustraire et le contenu du serment, considéré comme preuve, emporte la décision du juge. (ex / x se prétend créancier de y pour 100 : x et y concluent un pacte de serment et en cours de procès, x demande à y de prêter serment devant le juge / ce dernier pourra alors soit jurer qu'il ne doit rien, soit jurer qu'il doit 50 (ou une quelconque autre somme), soit jurer qu'il doit bien 100)

     

    c / pactes légitimes

    Oeuvre des constitutions impériales, d’où leur nom (lexlegis → légitime)

    Même démarche empirique que pour les pactes prétoriens (les constitutions impériales ont reconnu la validité de trois pactes légitimes)

    classification :

    -         la promesse de dot

    engagement de constituer une dot à la future épousée ; la promesse profite au  (futur) mari qui dispose, grâce à ce contrat, d'une action pour obtenir le paiement de la dot de son épouse.

    -        la promesse de donation

    il s'agit d'une promesse sans forme consacrée par Justinien en 531. A l'époque classique, elle n'avait aucun effet obligatoire sauf à être insérée dans le moule général de la stipulatio.

    -         le compromis

    Convention par laquelle deux parties en litige refusent de le faire trancher par le juge ordinaire (désigné par le préteur) et de la porter devant un arbitre privé librement choisi par elles. Le compromis précède le receptum arbitrii qui intervient entre les parties et l'arbitre. (Là encore, en droit classique, le compromis n'avait aucun effet par lui-même, sauf à l'insérer dans une stipulation)

    ► A la différence des contrats innommés qui sont de nature mixte - à la fois consensuels et onéreux - tous ces pactes sont des C purement consensuels.

    Grâce à ces institutions, le consensualisme a incontestablement progressé à Rome, mais quelle est vraiment, au terme de cette évolution, sa portée ? Quatre contrats consensuels "classiques" (vente, mandat, louage, société), les contrats innommés et certains pactes sanctionnés.

    Ces "modèles" suffisent-ils à couvrir toutes les situations contractuelles?

     

    La portée du consensualisme à Rome

    Le consens ne fut jamais admis en droit romain comme un principe général du dt des C . Il n'existe pas de règle générale donnant en principe un effet positif au consentement.

    Comparaison avec le droit contemporain (régi par le principe inverse) : le droit positif est en principe consensualiste, sauf exception, tandis qu'en dt romain le consensualime demeure l'exception. Bien que les contrats consensuels soient d'application courante, la pratique n'a jamais eu raison du formalisme qui caractérise la tradition juridique romaine.

    Deux raisons à cela :

    -         l’origine religieuse du dt romain : après la scission du juridique et du religieux, les mentalités sont restées fidèles à l'idée que le droit ne peut naître que du rituel et d'une certaine solennité. C'est une des raisons de l'enracinement du formalisme.

    -         le développement empirique du dt romain : un dt qui se construit et se perfectionne par créations successives  – les C – mais qui ignore l'abstraction, la théorie du C. Or, admettre le consensualisme comme un principe suppose toute une construction théorique autour du contrat (pour essayer de couvrir toutes les situations possibles grâce à un droit commun du contrat), ce à quoi les romains ne sont pas parvenus. Il n'y a pas en dt romain de théorie générale du contrat.

    Pour autant, à partir de la pratique contractuelle, les jurisconsultes ont dégagé un certain nombre de règles communes à tous les C : une construction plus proche de la « technique » du C que de la théorie, en raison de son caractère inachevé, imparfait, lacunaire.

    Cette « technique » du C tend à l’unité juridique – sans toujours y parvenir – dans les domaines

    1. de la formation
    2. de l’exécution
    3. de l’extinction

    des obligations contractuelles.

    Ce thème est développé dans une section III que nous ne traitons pas (et qui n’est donc pas au programme) mais que je laisse à votre disposition pour la cohérence de l’ensemble. Ceux qui le souhaitent peuvent ainsi en prendre connaissance au titre d’un complément de cours.

    Il est dès lors temps de conclure sur les origines romaines du droit des contrats.

     

     


    CONCLUSION DU CHAPITRE 
    LE DROIT ROMAIN DES CONTRATS, UNE CRÉATION EMPIRIQUE

     

     

    Dire que le DR des C est né d’une création empirique, cela revient à dire que c’est un dt essentiellement pratique (≠ théorique). Concrètement, cela signifie que le dt se développe, se construit, se perfectionne chaque fois qu’apparaît un besoin nouveau (lui-même lié à des facteurs économiques, sociaux, jdq, en perpétuelle évolution). La vie économique, les échanges créent un besoin auquel le système jdq existant ne peut pas répondre parce que c’est un système étroit, fermé, au sein duquel les individus doivent choisir l’outil jdq (le C) qui correspond le mieux à leur objectif. Si cet outil jdq n’existe pas, il faut le créer. Ce fut le rôle du préteur, par ex, pour de nombreux C ou catégories de C. Lorsqu’une opération était couramment pratiquée par les agents de la vie économique (cette opération permettant de répondre à un besoin précis), mais qu’elle ne faisait pas partie de la typologie des C existants, il pouvait la faire entrer dans la sphère du dt en accordant aux parties une action en justice. L’intégration d’un nouveau C se faisant par la reconnaissance d’une sanction jdq.

     

    1° -  Le droit romain connaît LES contrats

     

    C’est un dt qui se construit en réalisant des créations successives et empiriques pour répondre à des besoins divers. Conséquence : la diversité des besoins engendre la diversité des C. Diversité que l’on retrouve dans la formation des C, dans les sanctions (spécificité des actions), la terminologie (contrats, pactes) : ainsi les C peuvent-ils se nouer tantôt par les formes (verbales ou écrites), par la remise d’une chose ou l’exécution d’une prestation, tantôt par le seul échange des consentements, pour ne parler que de la formation du C.

    Toutes ces différences s’expliquent par les hasards de leur apparition mais n’ont aucune justification logique / théorique. On comprend mieux alors pourquoi le consensualisme n’a jamais triomphé, car l’admettre comme un principe supposait toute une construction théorique générale autour DU contrat.

     

    2° -  Le droit romain ignore LE contrat

     

    Il n’y a pas en DR de corpus de règles, susceptible de s’appliquer à toutes les situations contractuelles (un droit commun du C). En DR, on n’a que des C spéciaux, pas ou peu de principes généraux : en effet, selon sa nature, chaque contrat-type est assorti de règles qui lui sont propres et qui diffèrent d’un C à l’autre.

     

    Comparatif droit contemporain / droit romain

     

    droit contemporain : on part du principe, de la règle générale, pour aboutir à une construction théorique (corpus de règles), qui est censée régir toutes les situations pratiques (il y a une unité dans la réglementation) : droit DU contrat

     

    droit romain : on part d’une situation concrète et on crée une règle susceptible d’y répondre. A chaque situation contractuelle correspond une règle spécifique. D’où l’absence d’unité dans la réglementation : droit DES contrats.

     

    Cependant, il convient de nuancer un peu cette vision très empirique du DR des C. Car les jurisconsultes sont parvenus à dégager un certain nombre de règles générales (ie applicables à l’ensemble des C), ce que nous avons appelé la technique du C. L’effort de synthèse, d’abstraction, n’est donc pas complètement étranger au DR. Mais la construction reste inachevée. Le système jdq dans son ensemble – typologie des C [C spéciaux] et ébauche d’une technique du C – n’en est pas moins inestimable pour les juristes qui vont le redécouvrir 6 siècles plus tard. Le corpus iuris civilis redécouvert rassemble en effet une extraordinaire matière première. Nous aurons l’occasion de revenir sur l’impact de cette découverte majeure, intellectuellement et juridiquement décisive. Il faudra qd même attendre l’œuvre de Domat (XVIIe ) puis Pothier (XVIIIe ) pour que le travail de synthèse ébauché par les romains trouve son parfait achèvement. Pour autant, ne minimisons pas le degré de perfectionnement technique du DR, qui a constitué un matériau de réflexion précieux pour les juristes médiévaux, modernes et contemporains, et qui demeure le socle des droits modernes occidentaux.

     


     

    CHAPITRE II     

    L’EVOLUTION HISTORIQUE DU DROIT DES CONTRATS

    Les vicissitudes du consensualisme après le droit romain

     

    Treize siècles (depuis la chute de l’Empire romain d’Occident jusqu’au Code civil) au cours desquels le consensualisme a connu maintes vicissitudes.

    Dans son dernier état, le dt des C était parvenu, à Rome, à une certaine perfection, malgré l’absence de théorie générale. La période tardive est marquée – entre autres – par une formidable extension du consensualisme.

    La domination des peuples barbares en Occident provoque par la suite un brusque recul de la civilisation, recul particulièrement sensible dans le domaine de la science juridique. Cela s’est traduit, en matière contractuelle, par un retour en arrière de plusieurs siècles, une conception exclusivement formaliste du C. Les traces de ce droit d’inspiration germanique subsistent longtemps. On les retrouve encore au XIIIe siècle (Section I).

    Puis le consensualisme renaît dans la pratique sous l’influence combinée du dt romain redécouvert et du dt canonique. L’apport des droits savants est à cet égard décisif (Section II).

    Enfin, l’époque moderne (XVIIe – XVIIIe ) retiendra notre attention, parce que c’est le temps d’une œuvre magistrale de synthèse et d’abstraction : naissance d’une théorie générale du C, qui favorise le triomphe du consensualisme (Section III).

    Au-delà du Code civil, l’évolution est caractérisée par la liberté contractuelle et l’autonomie de la volonté, contredites cependant par un dirigisme de plus en plus prégnant, qui tend à sacrifier le dt commun DU contrat à un nouveau dt DES contrats, une nouvelle typologie de C spéciaux marqués par un certain formalisme (Section IV).

     

     

    SECTION I - LE RECUL DU CONSENSUALISME AU COURS DU HAUT MOYEN AGE (VIe – XIIe)

    Haut-Moyen Age : époque franque (VIe – IXe ) et époque féodale (Xe – XIIe )

    Point commun de ces deux périodes : le retour à une conception formaliste du C, imposée par les usages germaniques qui s’attachent aux formes, aux rituels, aux symboles. Les anciens gallo-romains ont abandonné les C consensuels pour se rallier aux usages barbares.

    Pendant 7 siècles, les C sont soit réels (formés par la remise d’une chose), soit formalistes (accomplissement nécessaire d’un rite).

    Le déclin de la science du droit a fait oublier les acquis du dt romain.

     

    § 1 Contexte et sources du droit

     

    476 : chute de l’Empire romain d’Occident sous la pression des invasions germaniques. Il  passe sous la domination barbare.

     
    A – Contexte politique

     

    Morcellement de ce qui fut l’Empire en royaumes barbares. Coexistent alors sur le territoire de l’ancienne gaule romaine des peuples d’origines différentes (Wisigoths, Burgondes, Alamans, Francs)

    Grâce à Clovis [481-511] et ses successeurs, la Gaule passe au VIe sous la domination des francs saliens, qui ont entrepris de soumettre les peuples concurrents.

    Cette période « franque » (Ve – IXe) connaîtra 2 dynasties et 2 conceptions du pouvoir différentes :

     

    • 481-751 : Mérovingiens→ légitimité très personnelle (le roi est un chef de clan, légitimé par ses victoires militaires)

     → conception patrimoniale du pouvoir (le royaume est divisé à la mort du roi entre ses fils / il peut également l’aliéner comme bon lui semble)

     

    • 751-888 : avènement des Carolingiens avec Pépin le Bref en 751, qui usurpe le pouvoir et dont les descendants règnent jusqu’en 888. Ils donnent au pouvoir royal une dimension institutionnelle, une nouvelle légitimité grâce au sacre et au couronnement impérial (le roi carol. s’inspire du double modèle – chrétien et romain – pour gouverner)

    Principale figure de la dynastie : Charlemagne (768-814) qui relève la dignité impériale en l’an 800 (après avoir donné au royaume franc les dimensions d’un Empire). Il se pose en continuateur des empereurs romains, romanité qui l’inspire dans ses réformes, sa volonté d’unifier l’empire et son désir de le pacifier. Le IXe siècle est alors marqué par un renouveau intellectuel et institutionnel très influencé par le modèle romain. L’idée d’unité de l’Empire est alors au cœur des préoccupations politiques, mais la conception patrimoniale du pouvoir – héritée des mérovingiens – très ancrée dans les mentalités franques, ne permet pas de maintenir cette unité au-delà du règne de Louis le Pieux (814-840).

    S’ensuivent des luttes fratricides et des partages successoraux (partage de Verdun en 843 entre les fils de Louis le Pieux). Notre pays est ramené à des limites plus modestes et le pouvoir carolingien entre dans une phase de décadence.

    Charles le Chauve hérite de la partie occidentale de l’empire (Francia Occidentalis, futur royaume de France), qui va subir un morcellement politique et territorial sous l’impulsion de plusieurs facteurs, diluant progressivement la royauté et l’idée d’Etat dans la féodalité.

     

    Rappel des événements qui ont conduit à l’effacement d’un pouvoir royal centralisé et à l’atomisation de la puissance publique.

    • partage de l’Empire en 843 qui donne naissance à la Francia Occidentalis
    • transformation politique décisive : l’émancipation des comtes, principaux administrateurs locaux du roi carolingien sur une circonscription territoriale de base, le pagus ou comté. L’appropriation des fonctions comtales et des prérogatives de puissance publique jadis déléguées par le roi conduisent au morcellement politique → ces nouveaux puissants deviennent des seigneurs, qui exercent désormais en leur nom et de manière autonome tous les pouvoirs (militaire, judiciaire, fiscal).
    • la circonscription administrative de base devient elle même entité politique autonome (morcellement territorial) → se produit alors un phénomène de regroupement ou de morcellement de ces entités, devenant plus ou moins vastes : ce sont les seigneuries, à la tête desquelles un puissant (le seigneur) est omnipotent. Le régime féodal est en place : il dure du Xe au XIIIe siècle.

     

    La féodalité a fait éclater la puissance publique ; il n’y a plus d’Etat, plus de pouvoir central, mais une mosaïques d’entités territoriales politiquement indépendantes. La royauté s’est « dissoute » dans la féodalité (effacement mais pas disparition du pouvoir royal). Le roi, devenu seigneur parmi les seigneurs (sur l’Ile-de-France) conserve un pouvoir d’essence divine qui lui permettra, le moment venu, de s’imposer à nouveau comme principe unique d’autorité et de pouvoir. Après avoir soumis les grands féodaux, il reconquiert une à une les prérogatives de puissance publique, renouant avec l’idée de souveraineté et d’unité du royaume. A partir du XIIIe siècle, un Etat royal se substitue progressivement au régime féodal. La genèse de l’Etat moderne est en marche.

     

    Ce contexte politique très particulier n’est pas sans effet sur les sources du dt.

     
     
    B – Sources du droit

     

    a ) les lois barbares

    A l’époque franque, coexistent sur le territoire de la gaule des peuples d’origine et de culture très différentes (gallo-romains d’une part, peuples germaniques d’autre part). Pendant longtemps, soumis au principe de la personnalité des lois, chacun entend vivre selon son droit (dt romain pour les gallo-romains / dt germanique pour les barbares). Pour rendre le système effectif, les rois barbares font rédiger dès le VIe siècle 2 sortes de lois :

    • lois « romaines » des barbarescontenant un dt romain simplifié, vulgarisé, dénaturé, très largement inspiré du Code Théodosien (ex / loi romaine des Wisigoths ou « Bréviaire d’Alaric » ) → droit applicable aux sujets gallo-romains
    • lois barbarescontenant les coutumes des peuples germaniques, mises par écrit, mais également influencées par le dt romain – pour la loi « Gombette » (applicable aux burgondes) et le Code d’Euric (applicable aux wisigoths) – ou pur monument de dt germanique s’agissant de la loi salique (applicable aux francs saliens) → dt applicable aux sujets barbares

    Les lois barbares sont une source très secondaire pour le droit des contrats au même titre d’ailleurs que la législation royale.

     

    b ) la législation royale

    Il s’agit des capitulaires, qui connaissent une inflation sensible sous les règnes de Charlemagne et Louis le Pieux. Dans un système qui a évolué de la personnalité à la territorialité des lois, cette législation de portée générale a vocation à s’appliquer à tous les sujets du royaume. Elle contient surtout des réformes administratives (droit public) mais peu de droit privé. L’essentiel de nos connaissances sur le droit des contrats à cette époque nous vient des actes de la pratique.

     

    c ) les actes de la pratique

    Recueils de « formules »rassemblant des modèles d’actes à l’usage des praticiens (connus dès le VIIe siècle) ; ce sont des actes types où sont laissés en blanc le nom des parties et l’objet de l’opération. Source précieuse pour connaître la pratique du dt et donc le droit des contrats.

     

    d) Le règne universel de la coutume

    Autour de l’an Mil, il n’y a plus d’autorité centrale susceptible d’imposer une norme législative de portée générale. Le droit est alors fait de pratiques, d’usages immémoriaux qui s’imposent avec le temps sur un territoire donné. La norme – dit-on – est pratiquée « de toute ancienneté » au point « qu’il n’est mémoire du contraire ». Le droit est divers comme sont diverses les traditions, de sorte que la coutume change d’une région à l’autre, parfois même d’un village à l’autre. La norme coutumière est un usage d’application territoriale dont la force obligatoire résulte de l’ancienneté et de la croyance des intéressés en sa nécessité.

     

    Contenu de la coutume : droit des personnes, de la famille, régime des biens, mais peu de choses sur le droit des obligations.

     

    Au-delà des sources, le dt des obl° du Haut Moyen Age est également tributaire des échanges et donc du contexte économique.

     

    C – Contexte économique

     

    La crise éco et démographique se prolonge et s’aggrave (manque de main d’œuvre, diminution des productions agricoles et artisanales, dégradation des voies de communications, brigandage, insécurité liée aux guerres privées, dépeuplement des villes…)

    Climat peu propice aux échanges → économie rurale fermée, localisée, autarcique (on consomme sur place les produits de l’agriculture et de l’artisanat local)

    Cette économie de subsistance retentit sur la vie juridique. Les occasions de contrats sont rares, à cause de la raréfaction des échanges.

    Jusqu’au XIIe siècle (renaissance urbaine), l’économie est sclérosée et l’activité contractuelle limitée à qqs contrats formalistes.

     

    § 2 – Les contrats de l’époque franque


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    Intitulé du cours : Histoire du droit privé

    Responsable du cours : Madame CABÉE-GAU, Maître de conférences

     

    Présentation générale

     

    Objet -  L’enseignement proposé dans le cadre de ce cours ne prétend évidemment pas couvrir tout le droit privé, mais seulement le droit des obligations. Il s’agit d’offrir aux étudiants les moyens de parfaire leur culture juridique grâce à une approche historique de cet enseignement fondamental (Droit civil 1 et 2). 

    Finalité -  Prendre conscience de la vivacité de nos institutions en se plaçant au cœur d’une évolution pluriséculaire ; éclairer le droit positif par le recul de l’histoire.

    Moyens -  Privilégier la notion d’évolution en inscrivant ce travail dans la durée (Rome – XXe siècle). Insister sur les facteurs d’évolution du droit des obligations (1ère partie : La notion d’obligation / Les facteurs d’évolution). Proposer une étude des origines et de l’évolution de principes clés, pour espérer en faciliter l’approche contemporaine : la 2e partie, consacrée au contrat, accorde donc une place particulière à l’histoire du consensualisme depuis les fondements romains du droit des contrats jusqu’à la consécration du principe d’autonomie de la volonté.

    Thèmes abordés :  L’obligation, notion et facteurs d’évolution (1ère partie) - Droit des/du contrat(s) (2ème partie)

     

     


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    CHAPITRE II     

    <o:p></o:p>

    L’EVOLUTION HISTORIQUE DU DROIT DES CONTRATS<o:p></o:p>

    Les vicissitudes du consensualisme après le droit romain

     <o:p></o:p>

    SECTION I

    LE RECUL DU CONSENSUALISME AU COURS DU HAUT MOYEN AGE (VIe – XIIe)

    <o:p></o:p>

    Haut-Moyen Age : époque franque (VIe – IXe ) et époque féodale (Xe – XIIe )

    Période caractérisée par le retour à une conception formaliste du C, imposée par les usages germaniques.

    Pendant 7 siècles, les C sont soit réels, soit formels.

    Le déclin de la science du droit a fait oublier les acquis du dt romain.

     

     <o:p></o:p>

    § 1 Contexte et sources du droit

    <o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    476 : chute de l’Empire romain d’Occident qui passe sous domination barbare.

    <o:p></o:p>

     

      A – Contexte politique <o:p></o:p>

     

     

    <o:p></o:p>

    Morcellement de ce qui fut l’Empire en royaumes barbares (Wisigoths, Burgondes, Alamans, francs)

     

    <o:p></o:p>

    Grâce à Clovis, la Gaule passe au VIe sous la domination des francs

    <o:p></o:p>

    Cette période franque connaîtra 2 dynasties et 2 conceptions du pouvoir différentes :

    <o:p></o:p>

     


    <o:p></o:p>

    -         481-751 : Mérovingiens → légitimité très personnelle (chef de clan, victoires militaires, conception patrimoniale du pouvoir)<o:p></o:p>

    -         751-888 : Carolingiens qui donnent au pouvoir royal une dimension institutionnelle grâce au sacre et au couronnement impérial (le roi carol. s’inspire du double modèle – chrétien et romain – pour gouverner)<o:p></o:p>

    Au-delà du règne de Louis le Pieux, l’unité de l’empire ne peut être maintenue, le pouvoir carol. est décadent la royauté se dilue dans la féodalité.<o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    Rappel des événements qui ont conduit à l’effacement d’un pouvoir royal centralisé et à l’atomisation de la puissance publique.

    <o:p></o:p>

    -         partage de l’Empire en 843 qui donne naissance à la Francia Occidentalis<o:p></o:p>

    -         transformation politique décisive : l’appropriation des fonctions comtales et des prérogatives de puissance publique jadis déléguées par le roi (morcellement politique) → ces nouveaux puissants deviennent des seigneurs<o:p></o:p>

    -         la circonscription administrative de base devient autonome (morcellement territorial) → seigneuries <o:p></o:p>

    -         royauté dissoute dans la féodalité : effacement mais pas disparition du pouvoir royal. Le roi, seigneur parmi les seigneurs conserve un pouvoir d’essence divine qui lui permettra, le moment venu, de renouer avec l’idée de souveraineté et d’unité du royaume et de substituer un Etat royal au régime féodal. La genèse de l’Etat moderne est en marche.<o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    Ce contexte politique très particulier n’est pas sans effet sur les sources du dt.

    <o:p></o:p>

     
    B – Sources du droit<o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    a ) les lois barbares

     

    <o:p></o:p>

    rrappel du système de la personnalité des lois qui a conduit à distinguer le droit applicable aux sujets gallo-romains (lois barbares contenant un dt romain simplifié très largement inspiré du Code Théodosien : ex / loi romaine des Wisigoths ou « Bréviaire d’Alaric » ) et le dt applicable aux sujets barbares (lois barbares contenant les coutumes des peuples germaniques, influencées toutefois par le dt romain – pour la loi « Gombette » et le Code d’Euric – ou pur monument de dt germanique s’agissant de la loi salique)

    <o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

     

    b ) la législation royale<o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    Capitulaires émanant de la Chancellerie royale et s’appliquant à tous les sujets du royaume (peu de dt des contrats)

     

    <o:p></o:p>

     

     

    <o:p></o:p>

    c ) les actes de la pratique

    <o:p></o:p>

     

     

    <o:p></o:p>

    Recueils de « formules » rassemblant des modèles d’actes à l’usage des praticiens ; source précieuse pour le droit des contrats (la pratique du dt)

     

    <o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

     

    d) Le règne universel de la coutume<o:p></o:p>

    An Mil : disparition de toute autorité centrale susceptible d’imposer une norme législative. L’évolution vers la territorialité des lois a donné naissance à des normes coutumières (usages d’application territoriale dont la force obligatoire résulte de l’ancienneté et de la croyance des intéressés en leur nécessité).<o:p></o:p>

    Conséquence : la diversité des traditions implique la diversité du droit. Les ressorts de la coutume sont variables, liés au morcellement féodal.<o:p></o:p>

    Contenu de la coutume : droit des personnes, de la famille, régime des biens, mais peu de choses sur le droit des obligations.<o:p></o:p>

    <o:p></o:p>

    Au-delà des sources, le dt des obl° du Haut Moyen Age est également tributaire de l’économie (facteur échanges).<o:p></o:p>

    <o:p></o:p>

     
    C – Contexte économique<o:p></o:p>

    Crise éco et démographique se prolonge (manque de main d’œuvre, diminution des productions, dégradation des voies de communications, brigandage, insécurité, dépeuplement des villes…)<o:p></o:p>

    Climat peu propice aux échanges → économie fermée, localisée, de subsistance<o:p></o:p>

    Conséquence sur la vie jdq : les occasions de contrats sont rares / disparition des sociétés commerciales / fin des opérations immobilières (le terre est patrimonialisée à long terme) / l’acte jdq le plus fréquent : la donation (pieuse surtout). <o:p></o:p>

    Jusqu’au XIIe siècle (renaissance urbaine), l’économie est sclérosée et l’activité contractuelle limitée à qqs contrats formalistes.<o:p></o:p>

     

    § 2 – Les contrats de l’époque franque<o:p></o:p>

    <o:p></o:p>

    Dans le contexte précédemment décrit, le dt des C est dominé par le règne absolu du formalisme : le seul consentement ne peut plus lier les parties ; seuls comptent les rites, gestes ou paroles solennels (il s’agit de marquer les mémoires par la force du rite symbolique, dans une société à faible capacité d’abstraction.)

     <o:p></o:p>

    D’après les sources, il existe à l’époque franque 3 façons de contracter :

    -         par la remise d’une chose

    -         par des formes orales ou gestuelles

    -         par l’écriture

     <o:p></o:p>

    A -  Le contrat réel : res  prestita<o:p></o:p>

    <o:p></o:p>

    Le lien se noue par la remise d’une chose qui tient lieu de rite / 2 sortes de contrats :

     <o:p></o:p>

    1° - les contrats de restitution

    <o:p></o:p>

    Celui qui reçoit la chose s’engage à la restituer : concerne différentes opérations qui sont mal distinguées les unes des autres (prêts divers, dépôt, gage).

    On ignore les intérêts sauf pour le prêt de bétail (le croît des animaux)

     

    2° - les contrats conduisant à une prestation

    <o:p></o:p>

    Celui qui reçoit s’oblige à donner autre chose. Ainsi la res prestita permet-elle de réaliser une vente (devenue C réel) →  vente au comptant, vente à crédit, vente à livrer, ou un C de précaire (remise d’une terre à charge de la cultiver).

     <o:p></o:p>

    Le dt franc connaît une forme de garantie des C réels : la wadiatio (le déb remet au créa un objet personnel précieux ou symbolique en contrepartie de ce qu’il reçoit.

    Ex / un gant (symbole d’honneur)

    En cas de défaillance du déb, le créancier pourra conserver l’objet (dans le cas du gant : déshonneur, déconsidération sociale, perte de confiance de l’entourage)

     <o:p></o:p>

    B -  Les contrats solennels 

     <o:p></o:p>

    Ils reposent sur le respect de formes solennelles diverses : gestes, paroles ou remise d’un écrit.

     <o:p></o:p>

    1° - le formalisme gestuel ou oral

    <o:p></o:p>

    ► On le retrouve dans un C très répandu à cette époque : la fides facta (promesse, engagement unilatéral) → fides / foi / fidélité / confiance

    <o:p></o:p>

    Rituel effectué par celui qui s’engage unilatéralement (et donne valeur jdq à la promesse)

    Instrument du rite : la festuca (bâton, baguette, rameau, fétu de paille…)

    Modalités variables du rite ( le jet, la remise, le bris → interprété comme un abandon par celui qui l’accomplit, car la festuca symbolise le prolongement de l’individu : retour à la notion primitive d’obligation conçue comme lien physique)

    <o:p></o:p>

    Usage tombé en désuétude après l’époque franque

    <o:p></o:p>

    Sanction de l’obligation : le déb défaillant comparaît devant le mallus (tribunal de dt commun) / en cas d’insolvabilité, le créancier peut saisir les biens et la personne du déb (esclavage ou mise à mort et plus tard rachat par le travail)

    <o:p></o:p>

    ► Autres rites gestuels et / ou oraux qui permettent de s’engager, de donner sa foi :

    Rites païens

    -         la jonction des mains

    -         le baiser de paix

    Rite chrétien

    -         le serment : engagement devant Dieu qui accompagne l’engagement civil

    modalités : il est prêté sur un objet sacré (bible, reliques) / en prononçant des paroles précises (« je jure par Dieu »)

    signification : garantie de l’obligation contractée car le déb a engagé son Salut dans ce serment (il encourt des sanctions spirituelles graves, dont le caractère dissuasif et coercitif – dans cette société profondément chrétienne – tend à renforcer le caractère obligatoire du C)

     <o:p></o:p>

    2° - le formalisme écrit

     <o:p></o:p>

    La charte (rare dans cette société où l’écrit est peu répandu), peut être un élément de formation du C.

    Deux usages sont susceptibles de matérialiser l’accord : traditio et levatio cartae (feuille de parchemin vierge que l’on remet – traditio – ou que l’on ramasse – levatio – pour y rédiger les termes de l’engagement)

     <o:p></o:p>Question : le formalisme réside-t-il dans l’écriture ou dans la manipulation de la charte (et donc dans le geste) ? L’écrit semble ici moins technique (contenu, sens des mots) que symbolique ( forme extérieure, support, geste accompli).

    Interprétation confirmée par l’évolution (l’objet, le support prime sur le contenu)

    <o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    Conclusion : le dt franc est dominé par un formalisme rigoureux et divers dans ses modalités (gestes, paroles, écrit). On ignore le consentement, la volonté.

    Ces caractéristiques survivent à l’époque franque et se retrouvent à l’époque féodale.

     <o:p></o:p>

    § 3  Les contrats à l’époque féodale<o:p></o:p>

    <o:p></o:p>

    La principale source d’information jusqu’au XIIIe siècle sont les actes de la pratique. La source coutumière étant beaucoup plus lacunaire dans ce domaine. Cette pratique contractuelle dominée par le formalisme, est très diversifiée, dans ses modalités et dans son application géographique. On peut néanmoins dégager certaines constantes liées à la permanence du formalisme, dans le prolongement du droit franc.

     <o:p></o:p>

    1° - les formes orales ou gestuelles

    <o:p></o:p>

    Les unes sont religieuses, les autres purement laïques

     <o:p></o:p>

    a)  Le serment

    <o:p></o:p>

    Rappel : il s’agit d’un engagement devant Dieu (celui qui jure engage son Salut dans un serment et encourt la damnation éternelle, en cas de parjure)

    Généralisation de la pratique du serment, en garantie d’une promesse, de la fides, d’où son nom : foi jurée ou serment promissoire.

    Forme solennelle :

    -   paroles : « je jure »…

    -   gestes : main posée sur des choses sacrées (reliques, Evangiles)

     <o:p></o:p>

    → l’engagement du Salut du jureur est en lui-même une consolidation de la promesse. Le serment vient donc renforcer de nombreux engagements contractuels, dont le respect est assuré par la crainte des sanctions spirituelles (société profondément chrétienne), obstacles au parjure et par voie de conséquence à la rupture de l’engagement pris.

     <o:p></o:p>

    Les populations y sont très attachées malgré les tentatives de l’Eglise pour en limiter la pratique (crainte d’une dévalorisation et de la multiplication des parjures)

    Faute de pouvoir en limiter la pratique, l’Eglise se réserve le dt de sanctionner les parjures (excommunication), justiciables de l’Eglise.

    C’est donc le serment, joint au contrat, qui justifie la compétence des juridictions ecclésiastique en matière contractuelle (jusqu’à ce que le roi tente de récupérer ce contentieux dans le cadre de la lutte des juridictions royales contre les juridictions concurrentes)

     <o:p></o:p>

    b) permanence du formalisme laïc

    <o:p></o:p>

    Il s’agit d’un formalisme gestuel (hérité de l’époque franque) qui se perpétue.

    <o:p></o:p>

    ● usage de la festuca (très pratiqué dans le monde paysan)

    <o:p></o:p>

    ● le rite de la jonction des mains (immixtio manuum) et du baiser de paix (osculum pacis ) → exemple de l’engagement féodo-vassalique conclu par l’hommage « de main et de bouche », et renforcé (cf. supra) par le rite chrétien de la foi (serment de fidélité).[1]

    ● le rite de la paumée rapporté par certaines coutumes (longtemps maintenue en milieu rural)

    <o:p></o:p>

    ● On pratique aussi un formalisme qui repose sur le principe d’une prestation partielle et dérisoire (versement d’une faible somme d’argent, à valeur symbolique → n’étant pas considérée comme une partie du prix, le C ne peut être assimilé à un C réel)

    - « denier à Dieu »

    -  somme utilisée pour le « vin du marché »

     <o:p></o:p>

    Survivances de ces pratiques (plus folkloriques que juridiques) car dès la fin du XIIIe  siècle, ce formalisme contractuel (créateur d’obligations) tend à s’affaiblir.

     

    2° - la valeur de l’écrit : forme ou mode de preuve ?

    <o:p></o:p>

    Rappel du rôle de la charte en droit franc (plutôt formalisme gestuel)

    <o:p></o:p>

    Au XIIIe siècle, fréquence de l’expression « s’obliger par lettres » dans les coutumes (ex / Beaumanoir - Coutumes de Beauvaisis - en donne même le formulaire et précise qu’elles doivent être scellées du sceau du bailli)

    <o:p></o:p>

    Difficulté pour les chercheurs de distinguer ici la forme du mode de preuve (distinction d’autant plus difficile que le dt n’est pas unifié et que, selon les coutumes, la valeur de l’écrit peut varier : forme ou mode de preuve)

     <o:p></o:p>

    3° - contrats réels et vente « commencée »

    <o:p></o:p>

    Contrats réels :

    <o:p></o:p>

    -         formé par la remise d’une chose à charge de la restituer (C de restitution de l’époque franque)

    -         formé aussi par la remise de la chose ou d’une partie de la chose à charge de donner autre chose (C conduisant à une prestation) : c’est le cas de la vente (qui, la plupart du temps, se réalise au comptant) considérée par de nombreuses coutumes comme un C parfait dès lors qu’une des prestations a été exécutée en tout ou partie.

    Ex / coutume de Normandie (XIIIe)

            Coutume de Saint-Gilles (fin XIIe) : « La vente n’est point parfaite dès que l’on est convenu du prix, mais seulement, dans la coutume, lorsque la chose a été livrée, ou une partie quelconque du prix payée (…) Si la chose n’a pas été livrée, ni aucune partie du prix payée, les contractants ne sont pas tenus »

             Coutume de Montpellier (1204), art. 100 : « La vente ne vaut rien sans paiement partiel ou complet du prix ou sans remise de la chose »

     <o:p></o:p>

    C’est l’une des 2 prestations qui rend l’autre obligatoire (vente « commencée »)

     <o:p></o:p>

    Diversité du dt des C : liée à la diversité des formes elles mêmes variables en fonction du lieu.

    ex. du denier à Dieu.

     <o:p></o:p>

    Conclusion sur la période<o:p></o:p>

    Il existe des pratiques contractuelles formalistes et diverses (reflets de la diversité jdq de la France féodale). Nouvelles données à partir du XIIe et surtout du XIIIe siècle, qui vont conditionner l’évolution du dt des contrats.

    <o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    § 4 – Facteurs d’évolution du droit des contrats (XIIe – XIIIe) <o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    A -  facteur politique et géographique

    <o:p></o:p>

    La genèse de l’Etat moderne : elle se réalise entre le XIIIe et le XVe, sur la base de deux éléments :

    -         géographique : l’Etat royal en formation se donne un territoire politiquement unifié (et non plus morcelé) → expansion territoriale du domaine royal au détriment des féodaux, première étape de l’édification d’un Etat.

    -         politique : redressement de l’autorité royale par la récupération progressive des prérogatives de puissance publique usurpées par les seigneurs (justice, pouvoir législatif, pouvoir militaire et fiscal)

    ► au terme de ce processus, l’Etat moderne est en place / le roi est devenu souverain (concentration des pouvoirs)

     <o:p></o:p>

    B -  Facteur économique<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    Renaissance de l’économie de marché, émancipation des villes qui deviennent des foyers de production et d’échange où se regroupent les « forces vives » du royaume (artisans, commerçants…) ; le « bourgeois » (habitant du bourg, de la ville) devient le principal acteur de la vie économique et donc du dt des contrats. Multiplication et élargissement des échanges. Nouvelle économie, nouveaux besoins : le dt des contrats doit s’adapter à ces données.

     <o:p></o:p>

    C -  Renouveau intellectuel et juridique<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    ● Renouveau intellectuel

    Développement de la connaissance et de la réflexion au-delà du monde des clercs ; exigences morales et rationalisation nourrissent cette réflexion laïque sur le dt et la justice.

     <o:p></o:p>

    ● Renouveau juridique

    -         Apparition des compilations de dt canonique (Décret de Gratien en 1140, Décrétales de Grégoire IX en 1234…) l’ensemble formant le « corpus juris canonici ».

    -         Découverte des compilations de Justinien à Bologne à la fin du XIe siècle : vaste mouvement intellectuel – par le commentaire et l’enseignement du dt romain redécouvert – qui va se propager dans tout l’Occident.

    <o:p></o:p>

    Le travail des romanistes (glossateurs, puis post-glossateurs), et des canonistes sur ces « droits savants » va modifier sensiblement la conception du contrat.

    <o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    SECTION II

    XIIe - XVe : L’APPORT DES DROITS SAVANTS À LA CONCEPTION DU CONTRAT<o:p></o:p>

    <o:p></o:p>

    Entre le XIIe et le XVe passage progressif d’un formalisme strict à la reconnaissance du « pacte nu », du consensualisme.

    Plusieurs facteurs y ont contribué :

     <o:p></o:p>

    § 1  L’apport du droit romain<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    C’est sous la forme d’un dt repensé et adapté à la société médiévale, que le dt romain s’impose à cette société (travail décisif de la doctrine)

     <o:p></o:p>

    A – Rappel de la conception romaine du contrat

     

    Le dt romain a étendu la portée du consensualisme mais ne l’a jamais consacré comme principe général du dt des C : « du pacte nu ne naît aucune action » (Ulpien)

    Dilemme des docteurs médiévaux : il faut tenter de concilier l’inconciliable → d’un côté la pratique qui utilise couramment le pacte nu, et de l’autre le dt romain qui en rejette la validité de principe.

    Les romanistes ont élaboré plusieurs théories pour tenter de réduire la contradiction. En vain.

     Conséquence : le clivage entre la pratique (praticiens du dt au sens large puisque le Parlement consacre la maxime « solus consensus obligat », « le seul consentement oblige » → cf. infra § 3, B, 2°) et la doctrine s’accentue. Les romanistes ont dû s’adapter à cette réalité pratique en trouvant des expédients.

     <o:p></o:p>

    B – L’expédient des romanistes : la stipulation simplifiée

     <o:p></o:p>

    La réalité – celle de la pratique des marchands, des commerçants – n’est pas réductible aux catégories romaines ; il faut donc adapter le dt romain à cette réalité pratique.

    Solution pour valider le pacte nu : la stipulation simplifiée, c’est à dire la simple mention dans l’acte constatant le pacte d’une promesse du débiteur (les termes « promesse », « a promis » suffisent à donner au pacte sa force obligatoire).

    Concession, certes peu contraignante, au formalisme romain pour valider les pactes nus : il ne s’agit donc que d’un compromis, d’un expédient. Les romanistes ne reconnaissent toujours pas la validité du pacte nu en dehors des catégories romaines sanctionnées.

     <o:p></o:p>

    § 2  L’apport du droit canonique<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    C’est un dt perfectionné qui concerne les clercs (compétence ratione personae / privilège du for) mais aussi les laïcs (rappel des compétences ratione materiae, dont le dt des contrats par le biais du serment)

    L’apport du dt canon s’est fait en deux temps :

    <o:p></o:p>

    A – L’expédient des canonistes : le serment simplifié

    <o:p></o:p>

    Il s’agit encore d’un expédient pour contourner la rigueur des principes romains : le pacte nu peut être validé par la mention – non plus d’une clause promissoire – mais d’une clause juratoire simplifiée : la formule « je jure » indépendamment de tout formalisme gestuel ou oral suffit à obliger.

    Comme précédemment avec les romanistes, les canonistes sacrifient au formalisme chrétien du serment pour valider le pacte nu.

    Néanmoins, ils sont allés beaucoup plus loin dans le raisonnement.

     <o:p></o:p>

    B – L’affirmation du principe consensualiste

     <o:p></o:p>

    La solution a ici un fondement moral. C’est en se fondant sur les textes de l’Evangile qu’ils rappellent que le serment n’est pas nécessaire pour respecter la parole donnée. Le chrétien n’a pas besoin de jurer, sa parole doit suffire.

    → Evangile de Saint Matthieu (« Vous avez appris qu’il a été dit aux Anciens : tu ne te parjureras point, mais tu t’acquitteras envers le seigneur de ce que tu as déclaré par serment. Mais moi je vous dis de ne jurer aucunement… Que votre parole soit oui, oui, non, non ; ce qu’on y ajoute vient du Malin ».)

    → Décret de Gratien (Dieu ne fait pas la différence entre un serment et une simple parole)

    → Huguccio (canoniste du XIIe) affirme en 1166 que l’on s’oblige par une simple parole donnée : le respect de cette parole, et donc du pacte nu, relève du devoir de conscience indépendamment de tout serment (la rupture du pacte est un péché)

    → doctrine reprise par la suite et extension de la règle morale au domaine civil : le devoir de conscience qui naît du pacte nu devient une obligation juridique et le consensensualisme est ainsi nettement affirmé (première affirmation doctrinale du consensualisme)

     <o:p></o:p>

    Problème de la mise en œuvre, de la contrainte, de la sanction juridique : sur quoi fonder la compétence des juridictions ecclésiastiques pour sanctionner ce type de contrats ? Pas sur le serment puisqu’il n’y en a plus, mais sur le péché (compétence ratione peccati).

    Réaction des romanistes au service de la cause royale – qui revendique la plénitude de juridiction – et échec de la tentative des canonistes visant à s’approprier tout le contentieux des pactes nus.

     <o:p></o:p>

    L’apport doctrinal n’en est pas moins essentiel (diffusion dans les universités), d’autant qu’il est renforcé par la pratique coutumière laïque.

     <o:p></o:p>

    § 3  Les autres sources du droit<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    Droit coutumier antérieur au XVIe : recueils privés rédigés par des praticiens formés dans les universités et influencés par le droit romain. Conséquence : ces œuvres ne sont pas de purs monuments de dt coutumier ; ils tentent de concilier des pratiques coutumières de moins en moins formalistes avec les catégories romaines retrouvées, d’où des hésitations, des contradictions.

     <o:p></o:p>

    A – Les hésitations des coutumiers du XIIIe siècle <o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    Coexistence dans une même source du consensualisme et du formalisme

    → nette affirmation du consensualisme dans Le livre de Jostice et de Plet (1260) : « Convenances accordées par bonnes mœurs font le marché, non pas la paumée, et le cœur doit suivre la parole » (respect de la parole donnée dans la limite des bonnes mœurs indépendamment de tout formalisme gestuel (paumée)) / idem dans d’autres coutumiers (« toutes convenances sont à tenir »)

    → MAIS respect des anciens modes formalistes chez Beaumanoir, dans les Coutumes de Beauvaisis (vers 1280) : le denier à Dieu, les arrhes (« nous entendons que marché est fait (…) par l’accord des parties (…) ou aussitôt que le denier à Dieu en est donné ou aussitôt que arrhes en sont données, car chacune de ces trois choses vaut confirmation de marché »)

     <o:p></o:p>

    Explication :

    -         l’influence du dt romain sur le dt coutumier (pour expliquer les survivances formalistes)

    -         période de transition au cours de laquelle coexistent deux mécanismes de formation des obligations contractuelles : la substitution progressive du consensualisme aux anciens modes formalistes, dont témoignent ces coutumiers.

    Sur la base de ce constat, on peut légitimement se demander quelle fut l'attitude des tribunaux confrontés aux contrats consensuels de plus en plus pratiqués.

     <o:p></o:p>

    B –  Jurisprudence

    <o:p></o:p>

    <o:p></o:p>

     

    Quelle est la solution adoptés par les juridictions en charge de ce contentieux lorsque la convention est litigieuse?

    Jurisprudence du Parlement (juridiction royale souveraine jugeant en appel les décisions des juridictions inférieures / compétence des juridictions royales en matière contractuelle au détriment des juridictions ecclésiastiques)

    Etude d’arrêts couvrant la 2e moitié du XIIIe siècle qui révèle plusieurs tendances (pas de solution univoque):

    <o:p></o:p>

    -         le Parlement a validé des conventions sans forme

    -         il a également validé des contrats conclus dans le respect des formes traditionnelles

    Confirmation par la jurisprudence de la validité des deux modes de formation.        


    <o:p></o:p>

    Conclusion de la section<o:p></o:p>

    Il convient de distinguer les progrès du consensualisme dans la doctrine et dans la pratique :

    <o:p></o:p>

    -         la pratique :

    ● le principe est admis très tôt dans certaines régions / C formalistes de + en + rares / validation des pactes nus par la jurisprudence.

    ● survivance par ailleurs du formalisme ancien (résistances locales) surtout en milieu rural : crainte populaire des « novelletés » et des engagements inconsidérés (« Comme les bœufs par les cornes on lie, aussi les gens par leurs mots font folie »)

    ● cette coexistence de deux mécanismes de formation des obligations contractuelles traduit des exigences contradictoires : celles d’un commerce en plein essor (rapidité, efficacité… liberté contractuelle) que le consensualisme peut satisfaire, et la sécurité contractuelle des contractants qui passe nécessairement par le formalisme.

    -         la doctrine :

    sur la période étudiée, l’apport des dts savants est incontestable mais il faut bien en mesurer les limites : romanistes et canonistes n’ont pas su « rattraper » la pratique faute de construction théorique autour du principe consensualiste (rappeler toutefois le rôle des canonistes dans l’affirmation doctrinale du principe : affirmation et non construction théorique) → le principe du consensualisme pur n’est acquis qu’au XVIIe siècle.

     <o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    SECTION III

    LES TEMPS MODERNES : NAISSANCE D’UNE THÉORIE GÉNÉRALE ET TRIOMPHE DU CONSENSUALISME (XVIe – XVIIIe)

    <o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    § 1 - Evolution de la pratique et du droit coutumier<o:p></o:p>

    <o:p></o:p>

    Permanence jusqu’à la fin du XVIe de certaines formes anciennes, mais la pratique a fait progresser le consensualisme de manière décisive.<o:p></o:p>

    <o:p></o:p>

    ● notaires : clause stipulatoire de style<o:p></o:p>

    ● commerçants : plus de différence devant les cours italiennes entre un pacte nu et une stipulation<o:p></o:p>

    ● Parlements méridionaux consacrent le consensualisme dans leurs décisions <o:p></o:p>

    <o:p></o:p>

    → illustration : Claude Serres (professeur à Montpellier, XVIIe )<o:p></o:p>

    « En un mot, dans ce royaume, toutes les conventions sont valables, obligatoires et irrévocables. Toutes les obligations en France sont valables par le seul consentement des parties. »<o:p></o:p>

    <o:p></o:p>

    ● Principes repris par les auteurs coutumiers du XVIIe :<o:p></o:p>

    ex / Charles Loysel, Institutes coutumières (1607)<o:p></o:p>

    « On lie les bœufs par les cornes et les hommes par les paroles, et autant vaut une simple promesse ou convenance (convention) que les stipulations du dt romain. »<o:p></o:p>

    <o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    § 2 -  Evolution de la doctrine savante<o:p></o:p>

    <o:p></o:p>

    XVIe – XVIIIe : plusieurs écoles se sont affrontées ou complétées sur le thème du consensualisme<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    A – Les romanistes<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    XVIe : seconde renaissance du dt romain → nouvelle école de juristes influencés par les humanistes et leur volonté de faire renaître les valeurs de l’Antiquité dans la civilisation européenne.<o:p></o:p>

    Pour les juristes de cette école, il faut régénérer le dt (romain) en revenant à la source originelle, dépouillée des commentaires séculaires qui en obscurcissent le sens ; revenir à un corpus purifié et interprété par l’histoire (situé dans son contexte) → méthode historique / Ecole historique (principal acteur : CUJAS, 1527-1590)<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    Quelle influence sur le dt des contrats ?<o:p></o:p>

    Paralysés par les règles strictes du dt romain (invalidation de principe du pacte nu / fidélité au régime des C innomés), ils nient le consensualisme comme principe et ne font donc pas évoluer la matière.<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    B – Le droit canonique<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    Les canonistes en sont restés au stade de l’affirmation du principe, sans envisager une réflexion théorique d’ensemble sur le dt des C.<o:p></o:p>

    Rappel du pb de la mise en œuvre (compétence des juridictions ecclésiastiques) qui est désormais obsolète.<o:p></o:p>

    Après le XVIe l’apport du dt canonique est ailleurs (domaine de la technique juridique)<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    La représentation parfaite<o:p></o:p>

    <o:p></o:p>

    Le principe de la représentation parfaite est tôt affirmé par les canonistes, en raison d’un besoin dans les relations publiques et judiciaires de l’Eglise.<o:p></o:p>

    Deux décrétales de Boniface VIII (1298) : « qui facit per alium, facit per se » (celui qui fait par un autre c’est exactement comme s’il faisait lui-même »)<o:p></o:p>

    Principe repris ensuite par différents courants pour élaborer la théorie de la représentation parfaite : coutumes et Parlements (XVe) / Dumoulin (XVIe) / Loysel (XVIIe) : « assez fait qui fait faire » / Domat (XVIIe) / Pothier (XVIIIe) : « Lorsque le mandataire a fait quelque C avec des tiers, c’est le mandant qui s’oblige envers les personnes avec lesquelles son mandataire a contracté en cette qualité ».<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    La théorie de la cause<o:p></o:p>

    <o:p></o:p>

    La notion de cause est indissociable de la moralité et de l’équité dans le dt des C<o:p></o:p>

    <o:p></o:p>

    Souci de moralité<o:p></o:p>

    <o:p></o:p>

    Définie d’abord comme le but poursuivi (cause finale), la cause s’attache ensuite aux motifs profonds (cause impulsive) qui ne doivent être ni immoraux, ni illicites : il y a là un encadrement du consensualisme par des limites morales.<o:p></o:p>

    Souci d’équité<o:p></o:p>

    <o:p></o:p>

    Formulation de l’interdépendance des obligations nées d’un C synallagmatique : « on n’est pas tenu de garder sa foi à qui ne garde pas la sienne » → une règle, fondée sur l’équité, qui inspirera la doctrine de la résolution du C pour inexécution au-delà de la catégorie des C innomés.<o:p></o:p>

    <o:p></o:p>

    - principe rejeté par les romanistes (Ecole historique)<o:p></o:p>

    - théorie largement reprise par la jurisprudence<o:p></o:p>

    Les canonistes ont apporté les premiers éléments d’une théorie qui sera perfectionnée au XIXe par les tenants de l’école causaliste.<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    C –  L’Ecole du droit naturel<o:p></o:p>

    <o:p></o:p>

    Le dt est conçu comme un ensemble de vertus sociales réduites à qqs grands principes (le C comme la propriété sont de dt naturel).<o:p></o:p>

    Le grand progrès de cette doctrine : la systématisation (étrangère au dt romain et au dt médiéval)<o:p></o:p>


    <o:p></o:p>

    1° Les philosophes<o:p></o:p>

    <o:p></o:p>

    Grotius (1583-1645) : le C est au cœur de tout le dt civil → « La mère du dt civil est l’obligation que l’on s’est imposée par son propre consentement »<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    Pufendorf (1632-1694) : le respect de la parole donnée est un principe de dt naturel, donc le consentement suffit à obliger, d’autant plus qu’il est l’expression de la volonté libre (d’où une ébauche de la théorie du consentement : capacité / vices)<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    Les juristes <o:p></o:p>

    <o:p></o:p>

    Evolution de la science du dt au XVIe grâce à des juristes qui sont aussi des praticiens du dt : la plupart sont des compilateurs, certains s’élèvent de la pratique au principe, comme Domat et Pothier qui reconnaissent le consensualisme comme principe central du dt des contrats grâce à leur esprit de synthèse et à leur travail de systématisation.<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    Domat (1625-1696)<o:p></o:p>

    <o:p></o:p>

    Rigueur mathématique dans son approche du dt<o:p></o:p>

    Ordre naturel du monde, « loi naturelle » voulue par Dieu<o:p></o:p>

    Son génie a été de présenter le dt civil dans « un ordre » conforme à cette loi naturelle (Les lois civiles dans leur ordre naturel, 1689)<o:p></o:p>

    Particularités de l’ouvrage :<o:p></o:p>

    - exposé suivant un plan défini<o:p></o:p>

    - synthèse du dt romain, des pratiques coutumières et des ordonnances royales<o:p></o:p>

    - place importante au dt des obligations (matière dominée par les influences chrétiennes)<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    Pothier (1699-1772)<o:p></o:p>

    <o:p></o:p>

    Professeur et magistrat (théoricien et praticien) : approches différentes et complémentaires du dt qu’il met au service d’un exposé complet et systématique sous forme de traités (Traité des obligations, 1761)<o:p></o:p>

    <o:p></o:p>

    Démarche novatrice : il se dégage de la dimension pratique des cas pour s’élever à la théorie, à la formulation de principes et de règles générales. Il ne s’agit plus d’exposer des solutions pratiques dont on tire un principe mais d’énoncer une règle qu’il faudra par la suite appliquer.<o:p></o:p>

    <o:p></o:p>

    Influence considérable : l’esprit du Code civil est tout entier dans l’œuvre de Pothier.<o:p></o:p>

    <o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    3°  L’apport de la doctrine moderne : le consensualisme au cœur de la théorie du contrat  

    → version intégrale – et non résumée – du cours jusqu’à la fin de la section IV (ci-dessous)

    Pour Domat et Pothier, les conventions tiennent une place capitale dans l’ordre juridique, car toute la société civile repose sur le contrat. On pense désormais le contrat au singulier et sa définition confirme le triomphe du consensualisme.

     

    a / Définition

    Ils Assimilent le C à la convention, définie comme un engagement formé par la rencontre des consentements.

    ● Pothier : par convention, il faut entendre « le consentement de deux ou plusieurs personnes pour former entre elles quelque engagement »

    ● Domat : « les conventions sont des engagements qui se forment par le consentement mutuel de deux ou plusieurs personnes qui se font entre eux une loi d’exécuter ce qu’ils promettent » (formulation qui est à l’origine de l’art. 1134 du Code)

    Partant de ces définitions, ils en tirent toute une série de conséquences qui fondent la théorie générale du contrat.

    Ebauche de cette théorie

    <o:p></o:p>

    <o:p></o:p>

    b / Diversité des contrats  <o:p></o:p>

    <o:p></o:p>

    Parce qu’il est l’expression de la volonté des individus, le C peut couvrir une infinité de situations (autant de C que l’esprit humain est capable d’en imaginer): toutes ces situations sont susceptibles de se couler dans le moule DU contrat (rupture avec la tradition romaine où la diversité des situations contractuelles devaient épouser une typologie : C nommés, innomés, pactes / désormais il n’y a plus de contrats spéciaux, il n’y a que LE contrat). Tout accord de volonté crée le contrat : « toutes les conventions, soit qu’elles aient ou n’aient point un nom, ont toujours leur effet et elles obligent à ce qui est convenu » (Domat) → origine de l’alinéa 1er de l’art 1107 C. civ ("Les contrats, soit qu'ils aient une dénomination propre, soit qu'ils n'en aient pas, sont soumis à des règles générales").

    <o:p></o:p>

     

    L’idée est fondamentale : elle traduit le « passage » à la théorie générale. L’on passe en effet d’une conception romaine plurielle (la typologie avec ses dénominations) et limitée (LES contrats) à une conception singulière (avec ou sans dénomination spécifique) et théoriquement « infinie » (LE contrat).

     

    c / L’importance du consentement et ses limites

     

    Conception théoriquement « infinie »… En réalité, la diversité des contrats n’est pas infinie car la liberté contractuelle est encadrée (liberté tempérée, limitée → cf. infra, la liberté dans le Code).

    <o:p></o:p>

    La liberté de s’engager est en effet reconnue mais elle n’est pas absolue : il faut que la personne qui s’engage soit capable, que les conventions n’aient rien de contraire aux lois et aux bonnes mœurs, que le consentement soit exempt de vices (ils reconnaissent l’erreur, la violence, le dol) La théorie des vices du consentement est inspirée de la technique romaine avec qqs nuances.<o:p></o:p>

    La question de la lésion est plus controversée : Domat ne la considère pas comme un vice du consentement. C’est une notion objective, économique. Cette vision permet de ne sanctionner que certains déséquilibres économiques (lésion « énorme » par ex. dans les ventes d’immeubles).<o:p></o:p>

    Pothier en revanche la range parmi les vices du consentement car il y a de l’imperfection dans le consentement de la partie lésée. Ainsi conçue , elle impose l’égalité dans les relations contractuelles (principe d’équité), mais compromet ces relations parce qu’il devient très facile de remettre en cause l’équilibre des C. Il finira par n’admettre la lésion que dans certaines conditions.<o:p></o:p>

    Enfin, le consentement n’est pas tout : Pothier, reprenant la thèse des canonistes, affirme que l’engagement doit avoir une cause honnête, ce qui permet d’invalider toute convention conclue sans cause ou pour une cause immorale.<o:p></o:p>

    D’autres conséquences de la définition du C portent sur ses effets. <o:p></o:p>

    <o:p></o:p>

     

    d / Les effets du contrat<o:p></o:p>

    <o:p></o:p>

    Les C n’ont d’effet qu’entre les parties et à l’égard des choses qui ont fait l’objet de la convention.<o:p></o:p>

     Les parties sont liées par tout ce qu’elles ont convenu, ce qui pose le problème de l’interprétation des clauses obscures, contradictoires, etc… <o:p></o:p>

    La question de l’interprétation est envisagée de manière très approfondie par Pothier (il sera d’ailleurs « copié » sur ce point comme sur bien d’autres par les rédacteurs du Code).<o:p></o:p>

    Enfin, le consensualisme soulève inévitablement une difficulté de preuve.<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    e / La preuve du contrat<o:p></o:p>

    <o:p></o:p>

    Le C est parfait dès l’échange des consentements mais sa matérialisation est soumise à des conditions de forme (l’écrit chez Pothier est préféré au témoignage, dont il se méfie).<o:p></o:p>

    La forme des C retrouve ainsi une certaine importance dans sa finalité probatoire, et sert de contrepoids au consentement triomphant<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    L’œuvre magistrale de Domat et Pothier se perpétue dans le Code civil.<o:p></o:p>

    <o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    SECTION IV    LE CONTRAT DANS LE CODE

     <o:p></o:p>

    L’évolution pluriséculaire qui a vu triompher le consensualisme en pratique comme en doctrine s’accorde parfaitement avec les idées nouvelles défendues par les juristes, philosophes, économistes éclairés du XVIIIe . En effet, en faisant du seul consentement le fondement du contrat, on met en avant 2 idées phares de cette fin de siècle:<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    -         la liberté des contractants<o:p></o:p>

    -         la volonté individuelle<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    Liberté et individualisme dominent alors le discours des esprits éclairés. Et c’est au nom de ces valeurs que s’accomplissent les réformes, dès les premières années de la Révolution.<o:p></o:p>

    Pourtant, le législateur révolutionnaire n’a pas su, dans le domaine des C, traduire en termes juridiques ces expressions chargées de symboles. <o:p></o:p>

    → Plusieurs projets de Code civil ont néanmoins vu le jour à cette époque (ceux de Cambacérès notamment), qui s’intéressaient à la matière, mais aucun n’a abouti. Quant à la législation révolutionnaire, elle a négligé le contrat (il y avait alors des préoccupations plus urgentes dans le domaine du dt privé : dt de la famille, des successions…)<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    Ce n’est donc qu’avec le Code civil  que se réalise enfin l’unification tant attendue du droit en général et du droit contractuel en particulier, sous l’égide du consensualisme. On y retrouve, quoique tempérée par certaines limites, l’importance de la volonté individuelle comme source d’obligation (§ 1). La doctrine en fera d’ailleurs au XIXe siècle une lecture exaltée qui conduira à la théorie dite de l’autonomie de la volonté (§ 2).<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    § 1 -  Une liberté contractuelle tempérée<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    Le Code civil est incontestablement consensualiste MAIS :<o:p></o:p>

    -         la consécration du principe y est implicite<o:p></o:p>

    -         il apporte certaines limites à la volonté individuelle et à la liberté contractuelle<o:p></o:p>

    <o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    A -  Consécration implicite<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    Principe d’application générale dans le Code, le consensualisme n’en est pas moins implicite. Cette consécration implicite résulte des art. 1108 (qui fixe les conditions de formation du C sans exiger le respect d’une formalité) et 1134 (qui pose le principe de la convention-loi).<o:p></o:p>

    <o:p></o:p>

    Pourquoi consécration implicite ?

    Parce qu’il est déjà très ancien (en pratique comme en doctrine) et que les rédacteurs du Code le considèrent comme une évidence. Ce n’est donc plus une innovation.<o:p></o:p>

    Tous les C sont désormais soumis aux mêmes règles générales, « qu’ils aient une dénomination propre ou qu’ils n’en aient pas » (art. 1107) → reprise littérale de Domat qui fait évidemment allusion aux spécificités romaines des C nommés et innommés).<o:p></o:p>

    Ces règles générales applicables à tous les C sont contenues dans le titre III du livre III (« Des contrats ou des obligations conventionnelles en général ») qui forment la théorie générale du C. Le plan reprend d’ailleurs dans ses grandes lignes le traité des obligations de pothier.<o:p></o:p>

    La consécration du principe est toutefois tempérée par certaines limites ou tempéraments. <o:p></o:p>

    <o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    B -  Les limites à la volonté individuelle et à la liberté contractuelle<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    Le législateur a placé ces valeurs symboles de liberté et de volonté au cœur du C, tout en les assortissant de certains « garde-fous ».<o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    Pourquoi ces tempéraments et limites au consensualisme ?

     

    -         à cause des dangers – potentiels – d’un principe qui affirme que l’homme peut tout faire par sa seule volonté<o:p></o:p>

    -         parce que le législateur était prisonnier de la loi, expression de la volonté générale (le peuple est souverain), une loi qui, à ce titre, devait s’imposer aux volontés particulières. L’époque est placée sous le règne de la Loi, qui fait l’objet d’un véritable culte (légalisme, voire ultra légalisme). La nomophilie (littéralement « amour de la loi ») impose donc – y compris dans les relations individuelles – le respect de la loi. <o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    Quelles limites, quels tempéraments ?

    -         il existe d’abord des exceptions à la formation purement consensuelle des C : ce sont des C solennels reconnus par le Code qui ne peuvent se faire sans acte notarié (promesse de donation, art. 931 / C de mariage, art. 1394 / constitution d’hypothèque, art. 2127)<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    -         il y a également deux tempéraments :<o:p></o:p>

    ● l’exigence d’une cause peut être considérée comme tempérament, dès lors que l’on ne se contente pas de la simple expression de la volonté, mais que l’on se préoccupe de savoir ce qu’elle recouvre.<o:p></o:p>

    ● les exigences en matière de preuve forment un autre tempérament. La preuve est devenue un élément essentiel du C que la doctrine du consensualisme rend plus exigeante encore. Depuis 1566 (Edit de Moulins) un acte écrit est indispensable pour prouver l’existence d’un C d’une certaine valeur : or cette exigence – de preuve et non de forme – peut être considérée comme une « espèce de formalité ».<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    -         Enfin, des limites de fond à la liberté contractuelle permettent de soutenir la thèse – concernant le Code – d’un libéralisme tempéré : l’idée d’autonomie de la volonté – apparue tardivement au XIXe siècle – était étrangère à l’esprit des codificateurs. C’est en effet une idée dangereuse. Aussi, pour protéger les contractants d’une volonté absolument libre et autonome, le Code prescrit le respect de l’ordre public et les bonnes mœurs.<o:p></o:p>

    Ces limites sont contenues dans les articles 6 (« on ne peut déroger par des conventions particulières aux lois qui intéressent l’ordre public et les bonnes mœurs ») et 1134 (« les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites »). Cet article montre bien que les rédacteurs n’ont pas adhéré au principe d’une liberté totale des conventions. La limite est contenue dans l’expression « légalement formées ». <o:p></o:p>

    → signification de l’expression « légalement formées » : le C ne tire pas sa force obligatoire du seul accord des volontés ( c’est à dire de la promesse, de la convention), mais d’une norme qui lui est extérieure, sinon rien n’empêcherait les contractants de suivre les variations infinies – et capricieuses – de leur volonté. La force obligatoire du C ne vient donc pas de la seule volonté, mais de la valeur que le droit – la loi – attribue à cette volonté. La force obligatoire du C ne peut donc exister indépendamment de tout ordre juridique : la loi générale s’impose à la loi des partie. Or la valeur de la convention (expression de la volonté des parties) – et donc sa sanction – dépend de sa conformité à cette loi générale c’est à dire concrètement, du respect des limites de fond et de forme contenues dans le Code. <o:p></o:p>

    <o:p></o:p>

    → s’agissant plus particulièrement de l’ordre public et des bonnes mœurs.<o:p></o:p>

    - ordre public : notion extensible (ordre public social, ordre public économique…) qui réduit d’autant la sphère de liberté (plus l’ordre public s’étend, moins la volonté est libre et autonome).<o:p></o:p>

     -  bonnes mœurs : là encore, il s’agit d’une notion au contenu variable qui laisse au juge un large pouvoir d’appréciation (cf. chap. introductif : cette appréciation procède d’un élément subjectif – la propre conviction du juge – et d’un élément objectif – la morale générale de la société qui intègre les valeurs qu’elle se donne).<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    Pourtant la lecture de l’art. 1134 par les auteurs de la fin du XIXe siècle conduit à une exaltation sans précédent du consensualisme et de la valeur absolue de la volonté (théorie de l’autonomie de la volonté).<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    § 2  - Philosophie volontariste et autonomie de la volonté<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    Trois fondements à cette théorie :<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    -         juridique : l’art. 1134 qui véhicule l’idée d’une convention qui serait l’égale de la loi<o:p></o:p>

    -         politique : car la doctrine dominante de l’époque est libérale et individualiste<o:p></o:p>

    • libérale, car elle prône la liberté de l’individu, du commerce, des conventions<o:p></o:p>

    • individualiste, car l’individu est au cœur des préoccupations sociales<o:p></o:p>

    -         philosophique : il s’agit de la philo volontariste déjà présente dans l’Ecole du droit naturel, qui sera reprise par les juristes allemands au début du XIXe (willensdogma – dogme de la volonté – et willenstheorie – théorie de la volonté), et adaptée plus tardivement par les juristes français (fin XIXe )<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    L’évolution connaîtra deux phases : l’élaboration de la doctrine de l’autonomie de la volonté (A) et les résistances contre les excès de cette théorie (B).<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    A -  La doctrine de l’autonomie de la volonté

     <o:p></o:p>

    Retour sur l’étymologie du mot « autonomie » : du grec autos (soi-même) et nomos (loi). <o:p></o:p>

    Il existe une loi que la volonté individuelle se fait elle-même, un domaine réservé à l’individu et non soumis à la souveraineté de la loi générale. L’individu étant libre de s’engager, de s’obliger, il ne doit subir d’autre contrainte que celle qu’il s’est lui-même imposée par sa volonté.<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    On peut déduire de ce postulat certaines conséquences :<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    -         dans cette conception, le contrat devient source essentielle du droit / rien dans l’ordre juridique ne saurait rivaliser avec lui / on n’est pas loin d’admettre qu’il n’y a de droit que par lui.<o:p></o:p>

    -         le C permet de réaliser la justice. On ne s’oblige pas volontairement à quelque chose d’injuste (si une obligation imposée peut être injuste, une obligation voulue ne peut l’être, parce que chaque individu est le meilleur juge de ses intérêts, et qu’en cas de déséquilibre – injustice – de la relation contractuelle, la partie désavantagée n’aurait pas consenti). →  c’est la célèbre formule de FOUILLÉE « qui dit contractuel dit juste ».<o:p></o:p>

    -         le C permet de réaliser l’utilité sociale car le libre jeu des volontés individuelles permet d’assurer l’équilibre économique et la prospérité générale : les intérêts particuliers réalisés par l’outil contrat ne peuvent conduire qu’à la satisfaction de l’intérêt général, perçu comme la somme de ces intérêts particuliers.<o:p></o:p>

    -         la force obligatoire du C résulte de la seule rencontre des volontés, ce qui justifie le consensualisme comme mode unique de formation du contrat (les rares hypothèses de C formalistes sont perçues comme des anomalies).<o:p></o:p>

    -         Le principe de la liberté des conventions est proclamé sous réserve des lois impératives et d’ordre public qui, parce qu’elles sont susceptibles d’entraver cette liberté, doivent être réduites au minimum.<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    L’impérialisme de la notion d’autonomie (au sens étymologique du terme), va conduire certains auteurs à des excès. En prônant la liberté absolue des conventions, ces « extrémistes » condamnent toute forme de limite, de contrainte à cette liberté : « toute loi, en soi, est un mal » écrit BEUDANT. Les partisans de cette théorie en ont tiré les conséquences suivantes :<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    -         abrogation de l’art. 6 (qui impose le respect de l’ordre public et des bonnes mœurs)<o:p></o:p>

    -         suppression de la rescision pour lésion (considérant le principe comme un « caprice législatif » dès lors « qu’il n’y a pas d’autre juste prix que celui dont les parties ont convenu » (JOURDAN, 1885)<o:p></o:p>

    -         suppression de la limitation du taux de l’intérêt<o:p></o:p>

    -         suppression de toute législation du travail (car il ne peut y avoir de juste salaire que le salaire convenu)<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    Ces excès susciteront des résistances doctrinales : E. GOUNOT (1912) évoque le « fétichisme de la volonté et du contrat », J. CARBONNIER une « exaspération métaphysique de l’autonomie de la volonté ». Le contexte juridique et social du début du XXe siècle ne peut plus être celui de la volonté autonome et de la liberté contractuelle illimitée.<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    B -  La critique de l’autonomie de la volonté<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    Les plus vives critiques sont formulées au début du XXe siècle par R. SALEILLES (1901), L. DUGUIT (1901), M. HAURIOU (1910) et E. GOUNOT (1912).<o:p></o:p>

    Au cœur de la critique : la volonté comme fondement du droit d’abord, puis comme fondement des contrats ensuite.<o:p></o:p>

    Le C ne tire pas sa force de la volonté mais de sa fonction dans la société, en vue du bien commun. Ils stigmatisent les dangers de la liberté contractuelle qui peut devenir un instrument d’oppression ; Gounot s’appuie sur l’exemple de la relation contractuelle employeur-salarié dont il a fallu corriger le déséquilibre par la promulgation d’une législation du travail. <o:p></o:p>

    Pour autant, la critique a elle-même ses limites et les détracteurs du dogme volontariste n’ont jamais renié la liberté et la volonté individuelle, qui doivent trouver leur place dans une société libérale.<o:p></o:p>

    La question est de savoir quelle place. <o:p></o:p>

    C’est toute la problématique du droit contractuel au XXe siècle.<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    SECTION V   

    ENTRE LIBERTÉ ET DIRIGISME CONTRACTUEL

    L’ÉVOLUTION DU CONTRAT AU XXe SIÈCLE<o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    L’histoire du contrat au XX

    e est marquée par la recherche d’un équilibre entre 2 positions extrêmes :<o:p></o:p>

     

     

    <o:p></o:p>

    -

             d’un côté celle qui consiste à promouvoir et exacerber la liberté et la volonté individuelle dans les relations contractuelles. Elle est fondée sur une haute idée de l’homme (postulat de l’homme libre et responsable qui est maître de ses engagements)

    <o:p></o:p>

    -         de l’autre celle qui consiste à encadrer, voire étouffer la liberté et la volonté individuelle – dirigisme contractuel – et fondée sur une vision plus pessimiste de l’homme (l’individu assisté et irresponsable, qui est certes protégé, mais soumis à la servitude de la loi.<o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    Entre ces 2 extrêmes, nous avons l’article 1134 dont on peut plagier le contenu par la formule suivante : « contracter ce n’est pas seulement vouloir ; c’est vouloir dans un cadre préalablement fixé par la loi ».

    <o:p></o:p>

    Or, cet encadrement légal, qui conditionne la force obligatoire du contrat, est évolutif il va aller au-delà des limites de fond et de forme fixées par le Code (cf. supra section IV, § 1, 2°)<o:p></o:p>

    Toute l’évolution du contrat au XXe siècle est alors déterminée par cette double exigence « juridico-économique » d’encadrement et de liberté :<o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    -

             l’encadrement (de fond et de forme) qui protège (les contractants, les valeurs de la société) mais qui freine les initiatives et peut devenir facteur d’immobilisme → sclérose de l’économie<o:p></o:p>

     

     

    <o:p></o:p>

    -

             la liberté, servie par le consensualisme, qui dynamise les échanges et stimule l’économie, mais qui pénalise la sécurité au profit de l’efficacité

    <o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    Entre formalisme et dirigisme d’une part, consensualisme et liberté d’autre part, le droit contractuel du XX

    e siècle est un droit qui se cherche sur fond  de déséquilibre de la relation contractuelle. Car l’encadrement ne se justifie que si l’équilibre du contrat a été rompu. Or, l’équilibre du contrat peut être rompu pour différentes raisons (§1). Le législateur va alors y répondre par des mesures d’encadrement, par une législation impérative contraignante (§2) qui contribue à l’altération de la théorie générale du contrat (conclusion).<o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

     

    § 1 -  Hypothèses de déséquilibre

    <o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    Définition du déséquilibre : une partie est en situation de faiblesse par rapport à l’autre

     

    <o:p></o:p>

    Trois types de déséquilibres sont envisageables :

    <o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    <o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    A -  Déséquilibre structurel

     

     

    <o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    Dans le Code civil le C est conçu comme une relation individuelle, personnalisée (qui n’excluait pas l’inégalité, mais une inégalité « consentie » parce que liée au seul sens des affaires des parties). Les données ne sont plus les mêmes au XX

    e siècle, à cause de la « collectivisation » des rapports qui crée parfois une inégalité structurelle.<o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    Exemples : la relation salarié / patron d’une grosse entreprise ; voyageur / société de transport ; assuré / compagnie d’assurance…. Peut-on discuter les termes de ces différents contrats ?

    <o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    Physionomie du contrat : un individu face à une structure économiquement puissante qui lui impose les termes du C auquel il est contraint d’adhérer sans négociation possible (C d’adhésion)

    <o:p></o:p>

     

     

    <o:p></o:p>

    <o:p></o:p>

    B -  Déséquilibre conjoncturel

     

    <o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    Ce type de déséquilibre apparaît lors de l’exécution du contrat :

    <o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    1° ) L’insolvabilité chronique du débiteur<o:p></o:p>

     

     

    <o:p></o:p>

    Elle est liée au surendettement, conséquence du développement du crédit et de la faiblesse (crédulité) de certains contractants. L’engagement ne peut plus être honoré ; déséquilibre qui compromet l’exécution du C.

     

    <o:p></o:p>

     

     

    <o:p></o:p>

    2° ) Apparition des fluctuations monétaires

    <o:p></o:p>

     

     

    <o:p></o:p>

    Que deviennent les contrats conclus pour durer (ex : bail), ayant pour objet un prix, en cas de fluctuation monétaire importante (ex : dévaluation), qui fait perdre à cette contrepartie pécuniaire toute sa valeur ? Il y a là un déséquilibre apparu après la formation du C et qui en compromet l’exécution.

     

     

    <o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    C - Déséquilibre « technique »

     

    <o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

     

    Exemple-type : la relation consommateur / client – professionnel : deux hypothèses pour illustrer ce déséquilibre lors de la formation du C :

     

    <o:p></o:p>

     

     

    <o:p></o:p>

    1° ) Les méthodes de vente

    <o:p></o:p>

     

     

    <o:p></o:p>

    Méthodes provocatrices, agressives, profitant de la faiblesse (crédulité / inconséquence) de certains consommateurs potentiels : démarchage à domicile proche du harcèlement, contrats de souscription (de crédit notamment) envoyés par correspondance… La facilité de l’engagement (une simple signature) vient parfaire le déséquilibre.

     

    <o:p></o:p>

     

     

    <o:p></o:p>

    2° ) La compétence

    <o:p></o:p>

     

     

    <o:p></o:p>

    Dans ce cas, le client / consommateur est un profane alors que le professionnel est un technicien dont la compétence le place en situation de force pour imposer au cocontractant certains termes du C : la négociation n’est pas possible faute de compétence technique.

     

     

    <o:p></o:p>

    Le « dominé » doit faire confiance au « dominant » (censé être de bonne foi) qui peut en abuser.

    <o:p></o:p>

     

     

    <o:p></o:p>

    <o:p></o:p>

    Quelle qu’en soit l’origine, le déséquilibre du C appelle une intervention législative, afin de rétablir une certaine égalité entre les parties, dans une finalité de justice.

     

    <o:p></o:p>

     

     

    <o:p></o:p>

    § 2 -  L’encadrement du C par le législateur

    <o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    « La liberté opprime et la loi affranchit » (Lacordaire, XIXe ) ; cet affranchissement par la loi légitime donc le dirigisme contractuel et les atteintes à la liberté au nom de la protection du contractant le plus faible.

     

    <o:p></o:p>

    L’encadrement du C par une législation impérative est alors dicté par les nécessités d’un ordre public social ou économique.

     

    <o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    A - Encadrement lors de la formation du contrat

    <o:p></o:p>

     


    <o:p></o:p>

    Cas particulier du consommateur affaibli par les techniques de vente agressives : sa protection passe par des mesures innombrables qui ont donné naissance à un Code de la consommation.

    <o:p></o:p>

     


    <o:p></o:p>

    Deux exemples de mesures :

    <o:p></o:p>

    -         renforcement du formalisme dans certains contrats (formalisme dit « de protection » contre les engagements trop faciles et inconsidérés)<o:p></o:p>

     

    -         le droit de repentir dans la loi du 22 décembre 1972 (rétractation possible du consentement dans les 7 jours à compter de l’engagement)

     

    <o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    Problème : cette dernière mesure a inquiété la doctrine qui y a vu une remise en question de la théorie générale du contrat (principe de l’immutabilité des conventions, insécurité juridique, création d’un nouveau déséquilibre avec la rencontre de 2 volontés dont l’une est autonome et l’autre assistée dans la prise de décision).

     

    <o:p></o:p>

     

     

    <o:p></o:p>

    B - Encadrement lors de l’exécution du contrat

     

    <o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

     

    Retour sur le cas du débiteur insolvable endetté : le législateur est intervenu en sa faveur (loi Neiertz), en prévoyant des aménagements de paiement (plans de redressement)

     

    <o:p></o:p>

    -         étalement de la dette dans le temps

    <o:p></o:p>

     

    -         renonciation aux intérêts de la dette par le créancier

    -          imputation des intérêts remboursés sur le capital (réduction substantielle de la dette)

    -          procédure de rétablissement personnel (sorte de "faillite civile"), depuis une loi de 2003

     

    <o:p></o:p>

     

    → modification qui concerne les modalités d’exécution de l’obligation ou l’objet même de l’obligation, et qui doivent être acceptées par le créancier (nouvel accord des volontés)

     

    <o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    Malgré ce nouvel « accord » (le créancier a-t-il vraiment le choix ?), la doctrine s’est, une fois encore érigée contre ce type de mesure qui porte atteinte à l’accord

    initial des volontés et donc au principe même du consensualisme : modification totale du contrat ? Recomposition de la théorie de l’obligation ?

    <o:p></o:p>

    (cf. B. OPPETIT, « L’endettement et le droit », Mélanges en hommage à A. Breton et F. Derrida, Paris, 1991, p. 309-310)

    <o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    C - Réglementation impérative du contenu des contrats

    <o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    Dans les cas de grave déséquilibre, intervention législative visant à réglementer le contenu de ces C.

    <o:p></o:p>

    Ex / C de travail, C de transport, C d’assurance, C de bail…<o:p></o:p>

    Interventionnisme de protection qui peut aller très loin :<o:p></o:p>

    -         altération de la liberté de conclure le C : exemple des C « imposés »<o:p></o:p>

     

    -         altération de la liberté de choisir son cocontractant : exemple du droit de préemption

     

    <o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    Ces qqs exemples de dirigisme contractuel montrent que la relation contractuelle est de plus en plus soumise à des contraintes extérieures imposées par l’ordre public → « publicisation » du contrat (JOSSERAND)

     

    <o:p></o:p>

     

     

    <o:p></o:p>

    Dressons un bilan en forme de conclusion sur les conséquences de cette « publicisation » du contrat.

     

    <o:p></o:p>

     

     


    <o:p></o:p>

    CONCLUSION

    <o:p></o:p>

    ALTÉRATION DE LA THÉORIE GÉNÉRALE DU CONTRAT<o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

     

     

    <o:p></o:p>

    Ces qqs exemples de rééquilibrage de la relation contractuelle ont suffi à stigmatiser l’altération des principes fondamentaux de la théorie générale (à commencer par le consensualisme mis à mal par le formalisme de protection) : volonté autonome de plus en plus assistée, accord des volontés comme fondement du C, immutabilité des conventions, force obligatoire du C, principe de la libre négociation.

    <o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    « Le contrat devient de moins en moins contractuel » (JOSSERAND)

    <o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    Législation impérative de plus en plus spécialisée, altère les principes fondamentaux de la théorie générale, contribue à l’effacement du droit commun et conduit à une spécialisation du droit

    des contrats : multiplication des règles spécifiques à tel ou tel type de C, statuts spéciaux qui revendiquent leur autonomie ( droit social, droit des assurances), ou une spécificité par rapport au droit commun (droit du bail, dont le dt commun ne régit plus que des catégories résiduelles).<o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    Conséquence : le droit commun du contrat devient lui-même catégorie résiduelle, laissant la place à une typologie de C spéciaux régis par une législation impérative de plus en plus technique (dont l’émergence s’explique aussi par la diversification des besoins, liée au progrès technique, qui exige de nouveaux outils contractuels).

    <o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    Le droit du contrat disparaît au profit du droit des contrats.<o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    La théorie générale s’est peu à peu vidée de son contenu parce qu’elle ne correspond plus aux situations de fait actuelles.

    <o:p></o:p>

    Faut-il repenser la théorie générale du C – manifestement inadaptée – à partir de ces nouveaux rapports contractuels (en suivant l’exemple des auteurs des XVIIe et XVIIIe siècles)?  C’est ce que pense une certaine doctrine[2]. L’histoire des contrats serait-elle cyclique (jeu incessant de bascule entre les faits et la théorie) ? <o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    Tout ceci confirme une crise plus vaste dont il a été fait état  lors du bicentenaire du Code civil : crise des principes contractuels en particulier et du Code civil en général, qui n’est plus la seule source du droit privé. « Où se trouve le droit civil des contrats, s’interroge Ph. Malaurie

    [3] ? Plus dans le Code civil, mais dans le Code de la consommation, du commerce, du travail, et surtout dans la pratique contractuelle des contrats d’affaire ». Et, plus loin, d’évoquer, toujours dans le contexte de la crise des grands principes, « les illusions de la liberté contractuelle ».<o:p></o:p>

    Mais l’auteur refuse pour autant la complaisance dans la société de la crise : il y a dans la culture juridique dont le Code nous a imprégnés une force et un équilibre qui résistent aux épreuves du temps et de la critique. Cette force et cet équilibre, inspirés par l’esprit de modération et de mesure des rédacteurs se retrouvent dans les textes « stars » du Code, les « super-textes » (Ph. Malaurie), c’est à dire les art. 544 et 1134.<o:p></o:p>

    L’art. 1134 enseigne le respect de la parole donnée quand elle résulte de la convention légalement formée. Rien n’est plus beau ni plus nécessaire que de faire respecter ses engagements, mais à condition qu’ils soient respectables. Ce texte est donc parvenu à un équilibre entre la volonté privée et celle de la loi, entre l’intérêt privé et l’intérêt général, un équilibre qui donne une ligne directrice, mais avec un pouvoir constant d’adaptation : pouvoir d’adaptation du droit contractuel aux exigences, souvent contradictoires, des « novelletés ».<o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

     

     

    <o:p></o:p>

    ***

    <o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

     

     

    <o:p></o:p>

     

     

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    [1] Hommages à Guillaume Cliton, Comte de Flandres (1127)

    <o:p></o:p>

    Le 7 des ides d’avril, un jeudi (jeudi 7 avril), des hommages furent de nouveau rendus au comte (…)<o:p></o:p>

    En premier lieu, ils firent les hommages de la façon suivante. Le comte demanda (au futur vassal) s’il voulait devenir son homme sans réserve, et celui-ci répondit : « je le veux » ; puis ses mains étant jointes dans celles du comte qui les étreignit, ils s’allièrent par un baiser. En second lieu, celui qui avait fait hommage engagea sa foi en ces termes : « je promets en ma foi d’être fidèle à partir de cet instant au comte Guillaume et de lui garder contre tous en entièrement mon hommage, de bonne foi et sans tromperie ». En troisième lieu, il jura cela sur les reliques des saints. Ensuite, avec le roseau qu’il tenait à la main le comte leur donna les investitures, à eux tous qui, par ce pacte, lui avaient promis sûreté, fait hommage et en même temps prêté serment.<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    (Galbert de Bruges, Histoire du meurtre de Charles le Bon, Comte de Flandres, éd. H. Pirenne, Paris, 1891, p89 – Trad. R. Boutruche, Seigneurie et féodalité, Paris, Aubier, 1959, t. 1,  p 335)

    [2] Ph. Jestaz : « La théorie générale du contrat reste inchangée, du moins dans son principe car [les contrats spéciaux] sont toujours des statuts d’exception…Cette théorie générale risque un jour de tourner à vide… Il faut de toute urgence inventer une théorie générale des contrats spéciaux ».<o:p></o:p>

    [3] Ph. Malaurie, « Le bicentenaire du Code civil », Répertoire du notariat Defrénois, janvier 2005, n° 2, p. 90-91.<o:p></o:p>


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    CHAPITRE INTRODUCTIF<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    Droit des obligations : droit complexe dont les règles – en partie contenues dans le Code civil – n’ont pas été créées ex nihilo.

    Portalis : «  Les codes des peuples se font avec le temps ; mais à proprement parler, on  ne les fait pas ».

    Laboulaye : «  Toujours dans le droit, comme dans la vie, on sent que le présent a ses racines dans le passé ».

    → commentaire de ces affirmations

     <o:p></o:p>

    Les contrats, la responsabilité ont été régis différemment suivant les époques ; certaines notions ont résisté à l’épreuve du temps, d’autres pas. Evolution liée à de multiples facteurs. Nous sommes le fruit de cette évolution pluriséculaire.

    Objectif : présenter l’esprit qui anime le dt de chaque période ainsi que l’héritage transmis aux siècles postérieurs → les étapes de la formation de notre dt positif des obl°.<o:p></o:p>

      <o:p></o:p>

    SECTION I - NOTION D’OBLIGATION<o:p></o:p>

    Répondre à une question simple : qu’est-ce que l’obligation ?

    <o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    § 1 -Définition

    <o:p></o:p>

    <o:p></o:p>

    Première ébauche : un lien qui impose aux individus une contrainte (l’obl° est indissociable de l’idée de contrainte) → contrainte : exigence morale, religieuse, sociale, politique ou de convenance.

    <o:p></o:p>

    <o:p></o:p>

    Approche juridique : lien de dt (vinculum iuris) entre deux ou plusieurs personnes. (1ère référence chez ULPIEN – IIIe s PC – reprise dans les Institutes de Justinien et dans le Digeste – VIe s PC – d’après une définition de PAUL)<o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    Définition de Paul : « La substance des obl° consiste à astreindre une autre personne envers nous soit à transférer la propriété (dare), soit à faire (facere) soit à fournir quelque chose (praestare) »<o:p></o:p>

    Mise en évidence des 3 éléments constitutifs de l’obligation : un lien personnel / une contrainte / un objet (darefacere / non facerepraestare)<o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    Définition « fondatrice » de l’obl° que l’on retrouve dans celle du contrat (art. 1101 C. civ.) : « Convention par laquelle une ou plusieurs personnes s’obligent envers une ou plusieurs autres à donner, à faire ou à ne pas faire qqc ».

     

    <o:p></o:p>

    <o:p></o:p>

    § 2  - Nature primitive du lien<o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    Lien physique, matériel avant d’être un lien intellectuel<o:p></o:p>

    → étymologie : obligation / ligare (lier, attacher)<o:p></o:p>

    → institution du très ancien dt romain : le nexum qui consistait à asservir personnellement et physiquement le débiteur défaillant (nexus, enchaîné)<o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    <o:p></o:p>

    <o:p></o:p>

    Notion primitive d’obl° appelée à s’enrichir par la technique juridique et la diversification, évolution qui exige des classifications.

    <o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    § 3 - Classifications des obligations<o:p></o:p>

    La diversification et le perfectionnement des obligations appelle la classification (préoccupation constante des juristes)

     

    <o:p></o:p>

    Critères multiples.

    1° - Quelques exemples de typologies : objet / sujet / modalités

    <o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    En fonction de l’objet

      La classification – déjà mentionnée – du jurisconsulte Paul :<o:p></o:p>

    obligations impliquant un dare ( transfert de propriété) / un facere ( obl° de faire ou de ne pas faire) / un praestare (livraison d’une chose sans transfert de prop.)<o:p></o:p>

    → première typologie qui a traversé les siècles : ancien droit / théorisée et systématisée par POTHIER (XVIIIe), reçue par le Code civil (Livre III, titre III, chap. III, art. 1136 à 1145)<o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

       classification affinée : objet déterminé ou indéterminé / divisible ou indivisible / et , en cas de pluralité d’objets, obligations conjonctives ou alternatives.<o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    En fonction des sujets : obligations conjointes ou solidaires<o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    En fonction des modalités : obligations conditionnelles (condition suspensive, résolutoire, obligation à terme)<o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    Mais à l’origine de la théorie générale du dt des obl°, on retrouve deux classifications décisives (en fonction des sanctions et des sources).

     

    <o:p></o:p>

    <o:p></o:p>

    2° - Classification en fonction des sanctions <o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    La contrainte est l’un des trois éléments de l’obl° (contrainte / sanction / action)

     

    <o:p></o:p>

    Partant de ce critère, le droit romain a proposé la classification suivante :

    <o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    -  les obl° sanctionnées par une action (obl° civiles)<o:p></o:p>

    -  les obl° non sanctionnées par une action mais qui produisent des effets juridiques (obl° naturelles)<o:p></o:p>

    -   les obl° dépourvues d’action et sans effets juridiques (obl° morales)<o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    Retour sur les obl° naturelles et morales

    <o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    a / L’obligation naturelle

    <o:p></o:p>

    Créatrice – non pas d’un lien de droit – mais d’un lien d’équité (vinculum aequitatis) né du sentiment de ce qui est juste.<o:p></o:p>

    Conséquence : pas de répétition de l’indu, ce qui signifie que le déb. d’une obl° naturelle ne peut être contraint à l’exécuter, mais s’il le fait, il ne peut en demander la répétition.<o:p></o:p>

    → exemple de la filiation naturelle (le père d’un enfant naturel non reconnu peut verser une pension alimentaire : s’il le fait, la pension ne pourra lui être restituée, en revanche, s’il ne le fait pas, la mère ne peut l’y contraindre par une action en justice.)<o:p></o:p>

    Ces deux éléments de l’obl° naturelle (absence de contrainte / lien d’équité) ont également traversé les siècles : ancien droit (Domat, Pothier), puis Code civil (art. 1235 al. 2 : « la répétition n’est pas admise à l’égard des obl° naturelles qui ont été volontairement acquittées »).<o:p></o:p>

    En revanche, silence du Code sur les fondements de l’obl° naturelle : libre appréciation du juge qui les valide au cas par cas, relayé parfois par le législateur qui les « transforme » en obl° civiles ( ex de l’obl° alimentaire des enfants adultérins, transformée en obl° civile par une loi du 15 juillet 1955).<o:p></o:p>

    <o:p></o:p>

    <o:p></o:p>

     

    b / L’obligation morale

    <o:p></o:p>

    <o:p></o:p>

    Elles ne concernent que notre conscience (comme les obl° naturelles), mais ne produisent aucun effet juridique : on s’oblige non en vertu du droit, ni en vertu du sentiment que c’est juste (pour réparer une injustice), mais parce que cet engagement relève de ce que l’on croit être bien. Le bien et le juste étant deux notions différentes : le bien relève de la morale, le juste de l’équité.

    <o:p></o:p>

    → exemple

    <o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    3° - Classification en fonction des sources <o:p></o:p>

    <o:p></o:p>

    Elle permet d’élargir la notion d’obl° aux rapports sociaux « négatifs » c’est à dire au droit de ce qui est défendu ou simplement nuisible, quand l’auteur d’un acte illicite l’oblige envers sa victime (dt de la responsabilité).

    <o:p></o:p>

    Distinction du licite et de l’illicite qui permet de classer les obl° suivant leur source :

    <o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    -  origine dans le droit romain : Institutes de Gaius (obl° qui naissent d’un contrat ou d’un maléfice), classification complétée par Justinien qui y ajoute la notion de quasi-contrat et de quasi-délit.<o:p></o:p>

    → rappel définitions : quasi-contrat, délit, quasi-délit<o:p></o:p>

    quasi-contrat : fait licite, volontaire et unilatéral qui fait naître des obl° à la charge de son auteur vis à vis d’un tiers, et à la charge de ce tiers vis à vis de l’auteur, alors qu’il n’y a pas eu accord de volonté (ex : la gestion d’affaires)<o:p></o:p>

    →  délit : fait illicite et intentionnel susceptible de causer un dommage et d’engager la responsabilité civile de l’auteur en obligeant ce dernier à le réparer.<o:p></o:p>

    →  quasi-délit : fait illicite mais non intentionnel (commis sans intention de nuire) qui cause néanmoins un dommage à autrui et oblige son auteur à le réparer.<o:p></o:p>

    -    classification reçue par l’ancien droit : recueils de coutumes / styles de procédure (ex du Châtelet de Paris: "obligation procède par quatre manières : par contrat, aussi comme contrat, par maléfice, ou aussi comme maléfice")<o:p></o:p>

    -    complétée aux XVIIe et XVIIIe par Domat et Pothier avec l’obl° légale (la loi comme source d’obl°, qui attache des devoirs à certaines situations de fait, dans les rapports familiaux ou de voisinage, indépendamment de la volonté de l’obligé)<o:p></o:p>

    -    que l’on retrouve ensuite dans le Code civil (art. 1370 : « certains engagements résultent de l’autorité seule de la loi. Ce sont les engagements formés involontairement, tels ceux entre propriétaires voisins, ou ceux des tuteurs et des autres administrateurs qui ne peuvent refuser la fonction qui leur est déférée »)<o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    L’exemple des classifications est révélateur d’une évolution du dt des obl°, évolution conditionnée par de multiples facteurs.

     

    <o:p></o:p>

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    SECTION II - FACTEURS D’ÉVOLUTION DU DROIT DES OBLIGATIONS

     

    Permanence ou disparition de certaines institutions depuis le dt romain, adaptation aux réalités de chaque période, évolution conditionnée par :

     

    § 1 – Facteurs économiques et sociaux

    Le dt des contrats est tributaire des données économiques – donc du développement des échanges – ainsi que de certaines données sociales.

     

    A - Développement des échanges et droit des contrats

     

    1° - Les données de l’équation

    A partir de la variable « échanges », on peut définir l’orientation du dt des contrats.

     

    1ère hypothèse : faiblesse des échanges

    sclérose du dt des contrats, dominé par le formalisme et la limitation du champ contractuel.

     

    2ème hypothèse : multiplication des échanges

    Elargissement du champ contractuel et recours plus fréquent aux contrats consensuels, comme instruments de la liberté contractuelle.

     

    → Rappel : définition du formalisme et du consensualisme

     

    2° - Ebauche historique de l’évolution

     

    • période romaine : à partir du 1er s AC, cadre favorable au développement des échanges et à l’enrichissement du dt des contrats (multiplication des contrats spéciaux et apparition du consensualisme)

    • Haut Moyen Age (Ve – XIIe ) : repli économique et démographique qui engendre une phase de régression du dt des contrats, marqué par un formalisme gestuel et oral très archaïque.

    • le tournant du XIIIe siècle : renouveau économique sous l’impulsion de l’émancipation urbaine. Prospérité nouvelle qui contribue au développement des relations contractuelles et à la mutation du dt des contrats. (influence du dt romain redécouvert, puis apparition d’usages commerciaux délaissant le formalisme au profit du consensualisme : mais il ne s’agit encore que d’une consécration pratique)

    • la « révolution » intellectuelle et juridique des XVIIe et XVIIIe siècles : triomphe du consensualisme – servi par la liberté contractuelle – grâce à sa consécration doctrinale par Domat et Pothier. La théorie DU contrat vient se substituer à un dt DES contrats empirique et casuel.

    • le Code civil héritier de cette « révolution » juridique : il en consacre les principes tout en les tempérant, limitant ainsi l’exercice de la volonté individuelle et de la liberté contractuelle (exigences légales de fond et de forme → art. 1134 Code civ. : «  les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites »).

    • 2e moitié du XIXe et XXe siècles : nouvelle phase de mutation consécutive à la révolution industrielle (nouveaux besoins / multiplication des échanges / exigences de rapidité, souplesse, efficacité dans les relations contractuelles). Conséquence : hésitation du droit des contrats entre liberté contractuelle et dirigisme (cf. les 3 schémas « liberté - dirigisme »).

     

    B – Les considérations sociales

     

    Problème du surendettement des catégories sociales vulnérables lors des crises économiques : immixtion de l’Etat (le législateur) dans l’équilibre initial du contrat pour protéger le contractant le plus faible. Il le fait par des mesures d'atermoiement (délais / remise de dette totale ou partielle) dites d’ordre public social (en vue du traitement social de l’insolvabilité).

    La question de l'endettement et de son traitement, dans un contexte dépressionnaire, n'est pas nouvelle. Les procédures de « désendettement » existent depuis l'Antiquité.

    Exemples :

     

    • Rome : loi Poetelia Papiria (326 AC) qui améliore la condition des nexi. Fin de la République, César imagine (avec la lex iulia de pecuniis mutuis, 49 av. J.-C.) une procédure d'apurement du passif permettant de réduire les dettes d'environ un quart.

    • XIVème siècle, dans un contexte de crise européenne, l'endettement devient une donnée structurelle de l'économie. Elaboration d'un véritable « droit médiéval du désendettement », fondé sur différentes voies de redressement du débiteur défaillant, en fonction de son degré d'insolvabilité.(ex/ négociation d'un plan de redressement avec le créancier, qui accepte de concéder des délais ou des remises de dette)

    • Époque contemporaine: à la fin des années 80, un phénomène d'endettement massif des particuliers – qualifié de surendettement – inquiète les pouvoirs publics. Le législateur se saisit du problème en 1989, avec un texte fondateur: la loi NEIERTZ (31 décembre 1989). Dispositif complété ensuite par des lois successives qui révèlent l'impuissance de l'Etat à résoudre le problème: loi du 8 février 1995, du 29 juillet 1998, du 1er août 2003 dite « loi Borloo » (qui crée la « procédure de rétablissement personnel » inspirée de la faillite civile), loi du 1er juillet 2010, dite « loi Lagarde », portant réforme du crédit à la consommation.

    Pour une vision plus complète de ces procédures, cf la fiche complémentaire « Jalons pour une histoire des procédures de désendettement »

     

    Chaque fois, l’évolution du dt des contrats résulte d’une intervention législative qui modifie l’équilibre du contrat, ce qui remet en cause certains principes fondamentaux relatifs à sa formation et à son exécution.

    → émergence d'un « droit du surendettement des particuliers » qui revendique son autonomie (par rapport au droit civil et au droit de la consommation)

    → dispositif légal qui vient nourrir la doctrine du « solidarisme contractuel » portée par Ch. Jamin et D. Mazeaud

     

    § 2 - Les facteurs techniques

     

    Le progrès technique a deux conséquences :

    • multiplication des rapports humains

    • création de nouveaux besoins

    Quelles implications sur le dt des obl° ?

     

    A – Droit des contrats

    Multiplication des échanges (hypothèse précédente) et diversification des obl° sous l’impulsion de nouveaux besoins (élargissement empirique du champ des obl° contractuelles), auxquels répondent les praticiens et le législateur. (ex : la pratique contractuelle des contrats d’affaire → contrat de gestion, d’ingénierie, d’affacturage…)

     

    B – Droit de la responsabilité

    Conséquence du progrès technique (machinisme, industrialisation, nouvelles technologies): multiplication des risques et des cas de dommages.

    Explosion des accidents matériels et corporels :

    • limites de la responsabilité pour faute (art. 1382 C. civ.) en matière d’accidents du travail (XIXe s)

    • développement d’une responsabilité civile objective (vers 1890) ou responsabilité du fait des choses qui n’exige plus la preuve d’une faute, œuvre conjointe de la doctrine (théorie du risque de Labbé, Saleilles, Josserand), de la jurisprudence ( arrêt Teffaine du 16 juin 1896) et du législateur (entre autres : loi du 9 avril 1898 en matière d’accidents du travail, loi Badinter du 5 juillet 1985 en matière d’accidents automobiles).

    • Évolution contemporaine marquée par l’effacement de la responsabilité au profit de la notion d’indemnisation.

    On peut donc résumer l’évolution du dt de la responsabilité en trois points :

    • responsabilité subjective

    • responsabilité objective

    • indemnisation directe et automatique (principe de la garantie collective, qui renforce l’aspect collectif de la réparation)

    • ultime évolution : avènement du principe de précaution

     

    Evolution révélatrice d’une pathologie sociale : la peur et son corollaire, l’exigence de sécurité juridique à laquelle le législateur répond par plus d’encadrement (mesures légales contraignantes). cf. schéma 2 + fiche complémentaire « De l'influence du progrès technique sur le processus de création du droit »

     

    § 3 - La technique juridique

     

    Il s’agit ici de la faculté des juristes à se donner les outils techniques nécessaires.

    La technique vise les modalités d'encadrement des obl° civiles (sanctionnées par une action), qui peuvent prendre différentes formes :

    • encadrement empirique et casuel

    • encadrement théorique

     

    A - Le schéma de la sédimentation jdq

     

    Seuls les cas spécifiquement prévus par la norme peuvent faire l’objet d’une action (en vue d’obtenir exécution de l’obl°)

    → exemples

    Conséquence de ce système : sphère du dt délimitée, strictement définie / principe de la typologie qui énumère les obl° « sanctionnables » / au-delà, plus de sanction, donc plus d’obl° / champ des obl° étroit (qqs cas) et rigide (ne pouvant être étendu aux cas non prévus)

    → exemple

     

    B - Les outils de perfectionnement – Les progrès de la technique jdq

     

    Système précédent assez rudimentaire : situations de fait (cas) précisément identifiées par la norme et sanctionnées par elle → dt casuel et de portée limitée

     

    Ce dt est donc appelé à se développer, s’enrichir, s’étendre par différentes techniques :

     

    • la multiplication empirique des « cas » (de nouvelles situations seront encadrées et donc sanctionnées au gré des besoins)

    • le raisonnement analogique (sanction de « cas » non prévus mais présentant des analogies avec les obl° existantes)

    • perfectionnement ultime (d’un point de vue historique) : l’élaboration d’une théorie générale du dt des obl°

    → d’une conception casuelle, empirique, circonstancielle du dt à la formulation de principes et de règles générales

    → passage d’un dt pratique à un dt théorique (démarche abstraite)

    illustration : l’œuvre de DOMAT (XVII s.) et POTHIER (XVIIIe s.), au terme d’une très longue évolution. Réalisation décisive, qui relève pour certains de « l’une des plus belles constructions de l’esprit humain » (J. P. Levy, A. Castaldo, Histoire du droit civil, 2002, n° 438)

    - Aujourd'hui, le processus semble inversé: altération de la théorie générale à cause de la segmentarisation / spécialisation du droit en de multiples branches qui revendiquent leur autonomie par rapport au droit commun. Retour à un droit DES contrats, marqué par un certain empirisme. Techniquement, s'agit-il d'un progrès ou d'une régression?

     

    Tout au long de cette évolution, la technique juridique, le « savoir faire » des juristes est sous-tendu par la morale.

     

    § 4 - Les préceptes moraux

     

    Parce qu’il est un lien personnel qui repose sur la confiance réciproque du créancier et du débiteur, le dt des obl° est aussi tributaire de la morale ; traduction juridique des préceptes moraux d’une époque. (respect de la parole donnée, réparation d’un tort sont des devoirs de conscience qui renvoient à des notions morales)

     

    A – La morale du contrat

    La théorie des vices du consentement est un exemple de moralisation dans l’échange des consentements (consentement libre ≠ tromperie, violence)

    → Exemple de consentement vicié par la violence

     

    On est allé encore plus loin dans la moralisation du contrat, avec la théorie de la cause : moralisation des mobiles qui en déterminent la conclusion. Au-delà de la volonté, il y a l’élément psychologique qui conditionne l’engagement.

    → Exemple de cause immorale (Civ. 1ère, 2 déc. 1981, D. 1982, IR 474)

     

    Cet encadrement plus étroit de la volonté individuelle (cf. les dangers de la liberté contractuelle pour les valeurs de la société) a été largement influencé par les canonistes et la morale chrétienne. Les art. 1131 et 1133 du Code en sont les héritiers (« la cause est illicite quand elle est prohibée par la loi, quand elle est contraire aux bonnes mœurs et à l’ordre public » : la morale est inhérente à la notion de bonnes mœurs).

     

    B – Le droit de la responsabilité et la morale

    Au cœur de la responsabilité : la faute

    → vision chrétienne : faute assimilée au péché, expiation de la faute par la réparation (forme de pénitence, d’amendement, de rachat)

    → vision laïque : faute conçue par rapport à une morale sociale (les limites du bien et du mal dans une société donnée). Le comportement fautif est celui qui dévie par rapport à une valeur que la société se donne en fonction de cette appréciation (elle-même évolutive) du bien et du mal (la faute est donc une notion au contenu variable).

     

    C – La morale, une variable intégrée par le droit des obligations

    Postulat : la morale, quoique fondée sur quelques principes immuables, est évolutive (évolution des mœurs et des mentalités).

    Evolution des préceptes moraux qui trouve sa traduction juridique dans :

     

    1° - L’interprétation du juge

    Interprétation par le juge de concepts très généraux hérités du dt romain (bon père de famille, bonnes mœurs…)

    Le contenu des concepts (jamais définis) est donc nécessairement variable puisque l’appréciation du juge intègre l’évolution des préceptes moraux.

     

    2° - L’intervention du législateur

    Le législateur peut intervenir pour autoriser ce qui était interdit ou interdire ce qui était permis.

    Exemple 1 : le prêt à intérêt (interdit jusqu’à la Révolution au motif - d’inspiration chrétienne - que l’intérêt est le salaire du temps et que le temps n’appartient qu’à Dieu)

    Exemple 2 : les assurances sur la vie ont longtemps été considérées comme des actes immoraux (spéculation sur la vie) → « Pacte odieux où la cupidité qui spécule sur les jours du citoyen est voisine du crime qui peut les abréger » (Portalis)

    La rupture se situe vers 1820 alors que l’on commence à parler de prévoyance : tolérance puis multiplication de ces contrats qui deviennent pratique courante. Encouragés au XX e. Aujourd’hui, s’assurer sur la vie relève du devoir moral où se reconnaît le « bon père de famille ».

     

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    Première partie<o:p></o:p>

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    DES CONTRATS AU CONTRAT<o:p></o:p>

    Histoire du consensualisme<o:p></o:p>

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     <o:p></o:p>

    Au cœur de cette première partie : l’obl° contractuelle, réalité institutionnelle au contenu juridique variable dont l’histoire ne peut être étudiée qu’au travers de la problématique consensualisme / formalisme dans le dt des contrats depuis l’Antiquité.

    Pourquoi cette problématique ?

    Clé de l’évolution, clé de l’histoire générale des obl° contractuelles.

    L’idée directrice des développements à suivre est simple. Il convient, pour chaque période étudiée, de répondre à une question : quelle est la part faite au formalisme et au consensualisme dans le dt contractuel ? Autre formulation : où est le principe, où est l’exception ?

    Notons que la formulation de la question contient en partie la réponse : si l’on envisage le problème en termes de principe et d’exception, cela suppose que les deux modes de formation n’existent pas à l’état pur, de manière exclusive et successive, mais qu’ils coexistent presque toujours, qu’ils se superposent. En effet, les deux derniers millénaires n’offrent pas une ligne générale et continue du développement du dt (aux origines le formalisme, et à l’arrivée le consensualisme, dans le monde contemporain). Il apparaît en revanche que tout au long de l’histoire juridique et économique, les deux concepts sont contemporains, simultanés, mais se déploient avec des intensités différentes.

    La question posée n’appelle donc pas de réponse univoque (consensualisme ou formalisme), mais une réponse nuancée (sur les modalités de cette coexistence). Y. Jeanclos parle à cet égard de « climat »[1] : climat de consensualisme ou de formalisme. Dès lors, la réponse à la question devrait nous éclairer sur la « nature juridique d’une société humaine »[2], c’est à dire sur les aspects techniques et sur les enjeux d’un système juridique qui privilégie l’un ou l’autre principe de formation des contrats.

     <o:p></o:p>

    -         les aspects techniques<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    Un système qui privilégie le formalisme (le consensualisme étant l’exception) engendrera plutôt un droit DES contrats, empirique et casuel (principe de la « sédimentation contractuelle ») : le droit des typologies contractuelles (chaque contrat étant régi par ses propres règles, son propre régime). C’est un système qui ignore la théorie.

     <o:p></o:p>

    A l’inverse, en élevant le consensualisme au rang de principe (le formalisme devenant l’exception) le système produit un droit DU contrat, théorique et abstrait, dont les règles générales et les principes sont susceptibles de régir toutes les situations contractuelles.

     <o:p></o:p>

    [ Historiquement, le passage d’un dt DES contrats à un dt DU contrat se situe lors de la révolution intellectuelle et juridique des XVIIe et XVIIIe siècles – Domat / Pothier – qui trouve ses prolongements dans le Code civil.]

     <o:p></o:p>

    -         les enjeux : ce sont ceux de l’équation décrite dans le chapitre introductif (cf. section 2, § 1, A, 2°)

    → le consensualisme libère (liberté contractuelle) mais fragilise (les contractants / les valeurs)

    → le formalisme contraint mais protège

     <o:p></o:p>

    Certains théoriciens du dt proposent à cet égard une vision plus radicale encore des enjeux. Lorsque le consensualisme prime – signe d’une évolution positive de l’esprit humain – la conception du dt est moderne, dynamique, profondément intelligente ; en revanche, le développement du formalisme révèle une conception du dt arriérée, entachée, de primitivisme, empreinte d’immobilisme.

     <o:p></o:p>

     

     <o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    CHAPITRE I

     

    LES FONDEMENTS ROMAINS <o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    L’étude du dt romain est fondamentale, parce qu’il est le socle des législations occidentales et qu’il avait atteint un degré de perfection qui explique son succès.

    Il convient toutefois de nuancer l’image d’un dt perfectionné :

    -         Rome a connu tous les stades de l’évolution (12 siècles), y compris les plus archaïques

    -         Malgré une grande maîtrise de l’outil juridique – dans son dernier état notamment –  ce dt présente une faiblesse : il ignore la théorie, l’abstraction, la systématisation. Pas de théorie générale du contrat, mais un droit des contrats empirique, pratique, fondé sur une vision concrète du contrat (régimes spéciaux  de « situations contractuelles » précisément visées par la norme et régies par des règles spécifiques). Une convention n’est obligatoire que si elle épouse l’un de ces modèles (les seuls à être assortis d’une action) : les contrats romains existent en nombre limité (typologie évolutive, et néanmoins limitée).

    -         Noter enfin qu’à défaut de théorie générale (dt commun du contrat) il existe une « technique » du contrat (règles communes à tous les contrats qui forment les prémices d’une théorie, mais encore incomplète, inachevée) <o:p></o:p>

     

     

    <o:p></o:p>

    SECTION I -  CONTEXTE POLITIQUE ET INSTITUTIONNEL

     

     

    <o:p></o:p>

    Poser qqs repères chronologiques et institutionnels nécessaires à la compréhension de la suite.

    <o:p></o:p>

    12 siècles d’histoire et d’évolution dont il convient de rappeler les principales étapes.

     

    § 1  Contexte politique

     

    <o:p></o:p>

     

     

    <o:p></o:p>

    Fondation légendaire de Rome milieu VIIIe s AC.

    <o:p></o:p>

    Fédération de villages, société pastorale , cellule sociale de base : la gens (regroupement familial qui réunit tous les descendants d’un ancêtre commun, placé sous l’autorité d’un pater ; la gens s’étend aussi à ceux qui sont placés sous la protection du pater – les clients ).<o:p></o:p>

    750 AC : domination étrusque -  période royale.<o:p></o:p>

    600 AC : la royauté fonde la ville (urbs), la cité. Domination politique de la classe commerçante (la plèbe) au détriment des grands propriétaires fonciers (le patriciat).<o:p></o:p>

    509 AC : révolution aristocratique menée par qqs gentes, qui fondent la République.<o:p></o:p>


    <o:p></o:p>

    A – La République (509 AC – 27 AC)<o:p></o:p>

    Débuts de la république marqués par la lutte entre patriciens et plébéiens, dont l’enjeu est social (conquête de l’égalité civile) et politique (égalité politique, participation à l’exercice du pouvoir) → ressort de l’évolution institutionnelle de la République, qui finit par se stabiliser autour de trois organes :<o:p></o:p>

    1° Le Sénat<o:p></o:p>

    Organe de conseil et de contrôle qui domine les deux autres. Il est avec le peuple (les assemblées l’incarnation de Rome : « senatus populusque romanus ».<o:p></o:p>

    2° Les assemblées<o:p></o:p>

    Ensemble des citoyens romains (la citoyenneté romaine étant le critère de la participation à la vie politique parce que le cadre du pouvoir fut longtemps celui de la cité, de la ville). Les comices votent la loi et élisent les magistrats.<o:p></o:p>

    3° Les magistratures<o:p></o:p>

    Elus (par les comices) pour un an, chargés du gouvernement de la cité : magistratures générales (consuls) ou spécialisées (préteurs, édiles, questeurs).<o:p></o:p>

    Organisation adaptée aux dimensions d’une cité, mais pas à celles d’un empire territorial qui s’est considérablement étendu (depuis le IIIe s AC). Conséquence : dérèglement des institutions, crise politique qui se termine avec l’avènement d’Auguste, qui fonde un nouveau régime.<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    B – L’Empire (27 AC – 476 PC)<o:p></o:p>

    Régime fondé sur le pouvoir d’un seul : l’empereur (concentration des pouvoirs).<o:p></o:p>

    Evolution du régime :<o:p></o:p>

    -         le Principat (Haut-Empire) : pas de rupture institutionnelle / maintien des institutions républicaines qui sont progressivement vidées de leur pouvoir au profit du Prince (princeps). Nouvelle crise au IIIe s, affaiblissement du pouvoir impérial, restauré  à la fin du siècle par Dioclétien (284-305) qui va donner une nouvelle orientation au régime.<o:p></o:p>

    -         Le Dominat (Bas-Empire) : régime autoritaire, absolutiste (concentration des pouvoirs), centralisateur (organisation administrative centrale et locale hiérarchisée et cohérente.) Elimination des pouvoirs concurrents (le Sénat en particulier). Grâce à cette nouvelle orientation, sauvetage – provisoire – de l’Empire.<o:p></o:p>


    <o:p></o:p>

    C – La chute de l’Empire<o:p></o:p>

    Malgré le renforcement des pouvoirs de l’empereur, l’Empire va s’affaiblir et se diviser. Deux entités politiques distinctes coexistent : l’Empire d’Occident (Rome) et l’empire d’Orient (Constantinople, depuis le règne de Constantin).<o:p></o:p>

    -         l’Occident va céder sous la poussée barbare ; après 476, il se morcelle en royaumes barbares.<o:p></o:p>

    -         L’Orient lui survit 10siècles (il chute en 1453 sous la pression turque).<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    § 2  Contexte social<o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    Société romaine, profondément inégalitaire, repose sur un clivage entre hommes libres et dépendants.

     

     

    <o:p></o:p>

     

     

    <o:p></o:p>

    A – Les hommes libres

     

     

    <o:p></o:p>

    <o:p></o:p>

    Celui qui a la pleine disposition de sa personne et de ses biens.<o:p></o:p>

    Catégorie elle même disparate : distinguer les citoyens romains et les pérégrins (différence de statut juridique : participation à la vie politique et soumission au droit civil, dt romain au sens strict).<o:p></o:p>

    Unification du statut en 212 (Edit de Caracalla qui donne la citoyenneté romaine à tous les pérégrins) → cf. schéma 3<o:p></o:p>

    B – Les dépendants<o:p></o:p>

    Plusieurs catégories de dépendants :<o:p></o:p>

    -         les esclaves qui n’ont aucun droit (objets et non sujets de droit)<o:p></o:p>

    -         les affranchis (restent dépendants de leur ancien maître)<o:p></o:p>

    -         les colons (statut marginal)<o:p></o:p>


    <o:p></o:p>

    § 3  Sources du droit<o:p></o:p>

    Trois étapes dans la formation du droit romain :

     

    A – L’ancien droit (des origines au milieu du IIe s AC)

    -         La première source du dt est religieuse (le fas)

    -         Les romains vont cependant distinguer le fas (religieux) du ius (le droit), dont la principale source est alors la coutume (celle des gentes puis de la Cité), qui demeure cependant sous le contrôle exclusif des pontifes (prêtres d’origine patricienne) gardiens du ius – droit secret dont ils ont le monopole de la connaissance.

    → de cette origine religieuse, le dt romain ancien a conservé un caractère très formaliste fondé sur le rituel.

    -         revendication de la connaissance du dt par la plèbe (qui en exige la mise par écrit) : le monopole des pontifes – et du patriciat – est alors remis en cause par la Loi des XII Tables (450 AC).

    → Loi des XII Tables : mise par écrit des principales coutumes en vigueur , fondement du dt civil (ius civile / droit des citoyens romains). Son objet : reconnaître des dts à tous les citoyens, sanctionnés en justice par des actions (les actions de la loi). Conséquence : toute opération contractuelle qui n’entre pas dans l’énoncé de la Loi – et qui n’est donc pas sanctionnée par une action de la Loi – échappe au domaine du ius, et ne peut être sanctionnée.

    → champ contractuel très limité.

    -         enfin, dernière source du dt, pour la période, mais source très secondaire : les lois votées par les comices (le peuple).

     

    <o:p></o:p>

     

    B – Le droit classique (IIe s AC – Dioclétien, 284 PC)

    Le droit prétorien<o:p></o:p>

     

    -         rappel du rôle du préteur dans l’organisation de l’instance judiciaire (pour comprendre ensuite son rôle créateur de dt).

     

    a / Les phases du procès civil

          Le procès se divise en deux phases : in jure (devant le préteur, qui décide d’accorder ou pas le bénéfice d’une action), apud judicem (devant le juge, désigné par le préteur pour dire le dt, dans le cadre des dispositions de la loi. Dans ce système, la demande doit correspondre à l’une des actions de la loi, sinon pas d’action, donc pas de procès ni a fortiori de sanction.

    b / Inconvénients du système et création prétorienne

    -         Rigidité du système confronté aux exigences de l’expansion romaine : apparition de nouveaux litiges, exclus de la sphère du dt parce que non sanctionnés. Ils doivent pouvoir bénéficier d’une action : ce sera le rôle du préteur que d’accorder des actions à des situations de fait non prévues par la loi. Or, comme à Rome le dt n’existe que par sa sanction, en créant des actions (dites actions prétoriennes) – pour répondre à un besoin – le préteur crée du dt ( il indique au juge qu’il désigne pour trancher le litige comment dire le dt dans le cas précis – puisque la loi n’a rien prévu – dans une « formule », d’où le nom de « procédure formulaire »).

    -         A partir du IIe s AC, c’est par voie d’édit que le préteur annonce les actions nouvelles qui seront accordées aux plaideurs au cours de son mandat (sorte de « programme juridique » de création du dt) : l’édit du préteur est à ce titre une source essentielle du dt classique.

    -         Le dt prétorien – ius praeterium – (procédure formulaire puis édit du préteur) vient compléter le dt civil – ius civile.

     <o:p></o:p>

    2° - La jurisprudence<o:p></o:p>

    la connaissance du dt par les prudents (sages), qui sont désormais des laïcs. Double terminologie pour les désigner: jurisprudents et jurisconsultes.

     

         a / Jurisprudents

     

     

    <o:p></o:p>

    -         jurisprudents : réflexion fondamentale sur le dt, dépassant l’approche casuelle pour découvrir des notions (influence de la philosophie grecque). Dépassement de la pratique pour s’élever à la théorie. Tant dans le jeu des classifications que dans la formulation des règles, les juristes romains conservent une approche pragmatique du dt (partir du réel pour forger des outils opératoires, des instruments utilisables) ® cf. la « technique du contrat » (ensemble de règles communes) qui fut dégagée à partir de la pratique contractuelle.

     

    b / Jurisconsultes

    -         Jurisconsultes : participation active à la vie juridique (consultations, avis, rédaction d’actes, conseils aux préteurs pour la rédaction des formules).

     <o:p></o:p>

    Préteurs et prudents dominent le dt classique tout au long de la République.

     <o:p></o:p>

    3° - Le droit impérial<o:p></o:p>

    Déclin des sources traditionnelles : loi des comices et édit du préteur (figé avec « l’édit perpétuel »).

    Emergence d’une nouvelle source : l’empereur qui devient – après un temps de transition, au cours duquel le Sénat et les prudents continuent à être consultés tout en devenant les instruments du Prince – seul promoteur de la loi : « tout ce qui plaît au Prince a force de loi » (quod principi placuit legis habet vigorem).

    Plusieurs formes de constitutions impériales : édits / mandats / décrets / rescrits

     <o:p></o:p>

    4° - Formation d’un droit des gens<o:p></o:p>

    Le dt civil (ius civile), droit romain au sens strict, est celui qui résulte des actions de la loi et qui n’est applicable qu’aux citoyens romains, à l’exclusion des pérégrins. Or, l’élargissement du monde romain tout au long de la République, les relations plus fréquentes avec les étrangers, ont rendu nécessaire la création de règles accessibles à tous, citoyens et pérégrins.

    Mais ce qui rend le dt des gens particulièrement difficile à appréhender, c’est qu’il n’émane pas d’une source en particulier. Toutes les sources du dt classique ont plus ou moins contribué à sa formation (Edit du préteur, jurisprudence, constitutions impériales). Il s’agit donc moins d’une source proprement dite que de règles présentant certaines caractéristiques communes. L’appréhension du dt des gens est donc moins une question de source proprement dite que de qualité du dt. Cette qualité résulte de la concordance de plusieurs éléments qui permettent de la distinguer du dt civil :

    -         c’est un dt qui trouve son origine dans la vie des affaires, et qui s’est donc particulièrement développé dans le domaine des contrats.

    -         Il est fondé sur la nature ou sur les mœurs communes aux différents peuples. On y retrouve les notions universelles de bonne foi, d’équité, qui dominent les relations commerciales.

    -         Contrairement au dt civil qui a une origine religieuse (ce qui explique d’ailleurs son caractère formaliste), le ius gentium est issu de la pratique (consacré ensuite par différentes sources), et présente un caractère formaliste beaucoup moins rigoureux : c’est un dt simplifié et accessible, qui répond plus efficacement aux exigences de la multiplication et de la diversification des échanges.

    -         La principale différence avec le droit civil, c’est la portée du ius gentium ; il s’applique à tous, contrairement au dt civil qui est réservé aux citoyens romains.

    De nombreux contrats sont issus du dt des gens.

     <o:p></o:p>

    C – Droit romain tardif<o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    Au Bas-Empire, l’empereur est devenu source unique du dt. Inflation législative aux IVe et Ve siècles.

     

    Apparition des premières compilations :

    -         Codes Hermogénien et Grégorien (IIIe )

    -         Code Théodosien (438) promulgué en Orient et en Occident

    -         Relayé en Orient – mais pas en Occident – par le « corpus iuris civilis » de Justinien (527-565) destiné à unifier le dt sur un Empire dont il espère la réunification (échec de la tentative). Œuvre composée de 4 éléments :

    · le Code (constitutions impériales depuis Hadrien)

    · le Digeste (jurisprudence)

    · les Institutes (manuel de vulgarisation)

    · les Novelles (constitutions de Justinien publiées après 533)

    L’œuvre n’a pas été connue en Occident avant le XIIe s., quand elle est découverte (en Italie) puis diffusée, constituant le socle de la plupart des législations occidentales.

     <o:p></o:p>

     

    SECTION II   TYPOLOGIE DES CONTRATS ROMAINS<o:p></o:p>

     

    jusqu’au § 3, A, 3°, le cours apparaît dans sa version intégrale et non résumée (cf. rubrique "cours intégral", 1ère partie, chap. 1, n° 1)

    Pourquoi typologie (classification en fonction des types) ?

    Parce que le dt romain est un dt des contrats qui sanctionne et réglemente des opérations spécifiques correspondant à  des situations concrètes précises ; en dehors de ces opérations reconnues par le dt, pas de contrat (ce qui exclut la liberté contractuelle et le principe d’une autonomie de la volonté).

     <o:p></o:p>

    ® exemple : une convention qui serait conclue en dehors de la sphère du dt ne serait pas obligatoire. En cas de défaillance de l’une des parties, le cocontractant n’a aucun moyen juridique de contrainte (pas d’action, pas de sanction). Cette opération n’est pas un contrat au sens romain du terme.

    L’opération peut néanmoins intégrer la sphère du dt, si le préteur décide d’accorder une action à la partie lésée : cette reconnaissance vaut intégration d’un nouveau contrat à la typologie des contrats existants (extension du champ contractuel / droit empirique formé au gré des besoins par des créations successives ayant quitté le domaine de la pratique pour intégrer la sphère du droit / le droit romain ignore le contrat en tant que construction théorique autonome et abstraite / pas de théorie générale du contrat).

     <o:p></o:p>

    Les contrats romains forment donc un ensemble limité mais extensible, qui ne permettra cependant jamais de couvrir – y compris dans son dernier état – toutes les situations.

    C’est cette évolution (enrichissement de la typologie / extension du champ contractuel) qu’il faut étudier au cours des trois périodes préalablement décrites : ancien droit, droit classique, droit romain tardif.

     <o:p></o:p>

    § 1 – Les origines : l’ancien droit romain<o:p></o:p>

    Les actes licites générateurs d’obligations ne sont pas qualifiés de contrats mais d’acta ou de gesta : actes solennels produisant des effets juridiques par le seul accomplissement des formalités requises. Le droit ignore encore la force de la volonté, créatrice d’un engagement, ce qui explique que la notion de contrat (engagement trouvant sa source dans la volonté) n’apparaisse que plus tard, à l’époque classique.

    Recourir impérativement à un rite formel pour que naisse l’obligation : c’est le règne absolu du formalisme. Diversité des rites et des engagements qui en résultent : engagement né d’un rituel verbal (acta verbis), de la remise d’une chose (acta re), d’un jeu d’écriture (acta litteris).

    Deux exemples :

     <o:p></o:p>

    A -  Au titre des acta verbis : la sponsio et la stipulatio<o:p></o:p>

    Promesse de faire ou de donner qqc sanctionnée par une action de la loi (à partir de la loi des  XII Tables).

    Rituel verbal très rigide :

    -         formules sacramentelles très précises

    -         la formule dépend de la nationalité des parties :

    ® sponsio entre citoyens romains  (ius civile / droit civil) : utilisation nécessaire du terme « promettre » (spondesne ? spondeo)

                 ® stipulatio du dt des gens dans les relations avec les pérégrins (les termes du dialogue sont différents)

    -         malgré les différences de vocabulaire, les deux promesses obéissent au même principe : correspondance sémantique absolue entre la question du créancier et la réponse du débiteur (réponse congruente), à peine de nullité de l’engagement.

    ® exemples d’engagements nuls faute d’identité formelle dans le dialogue, soit sur le verbe, soit sur l’objet de la promesse.

     <o:p></o:p>

    B -  Au titre des acta re : le mutuum<o:p></o:p>

    Prêt sans intérêt portant sur des choses consomptibles, pratiqué entre amis et s’apparentant à un service rendu.

    L’acte, pour produire ses effets, suppose la réalisation d’un élément matériel : la remise de la chose prêtée (obligeant celui qui la reçoit à restituer quantité et qualité équivalentes).

     <o:p></o:p>

    Les acta de la Rome primitive sont des outils rudimentaires, peu évolués qui sont appelés à se perfectionner à l’époque suivante.

     

    <o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    § 2 -  Le perfectionnement ultérieur du droit des contrats (au-delà du IIe s. AC)<o:p></o:p>

    Perfectionnement lié à des conquêtes qui se sont imposées de manière progressive.

    Trois étapes de ce perfectionnement du droit (préalable  nécessaire à l’étude des contrats de l’époque classique puis tardive / clé indispensable à la compréhension de l’évolution du droit sur cette période).

    A -  La simplification du formalisme<o:p></o:p>

    -         Abandon progressif de certaines exigences rituelles particulièrement rigides (sous l’impulsion notamment de la multiplication des échanges)

    -         Pour autant le formalisme ne disparaît pas tout à fait car la réalisation d’un acte matériel (échange verbal, remise de chose, écriture) qui conditionne la validité du contrat répond en outre à des exigences de preuve.

    -         La pérennité d’un certain formalisme s’explique par l’enracinement d’une conviction très ancienne dans les mentalités romaines selon laquelle le dt, comme la religion, ne peut naître que du rituel.

     <o:p></o:p>

    B -  L’apparition de la notion de contrat<o:p></o:p>

    Pendant des siècles, les romains ont pratiqué des actes générateurs d’obligations sans que ces actes soient regroupés sous la dénomination de contrats. Parler de contrats à propos de l’ancien droit romain est donc parfaitement anachronique. C’est pourquoi nous avons utilisé la terminologie d’acta ou gesta. C’est à l’époque classique que les romains découvrent la notion de contrat : l’idée que l’obligation peut naître d’un accord des volontés, pris en considération par le droit (alors qu’il n’y avait aucune prise en considération de la volonté dans les acta / gesta de l’ancien droit, même si cette volonté sous-tendait l’engagement).

    Implications de cette nouveauté ?

    -         pratiquement, ce sont des actes identiques (sous réserve de l’évolution liée à la simplification du formalisme), ce qui fait dire à J.P. Lévy que jusque là les romains avaient « pratiqué des contrats » sans en donner une définition, et devrait-on ajouter, sans en tirer les conséquences juridiques liées à l’existence d’un accord des volontés.

    -         juridiquement, le rôle de la volonté fait toute la différence entre les acta de l’ancien droit et les contrats de l’époque classique :

    acta : les effets juridiques sont attachés à l’accomplissement des formalités rituelles, indépendamment de la volonté. Autrement dit, la forme seule pouvait obliger les parties.

    •  contrats : ce qui change donc à l’époque classique, c’est que désormais, pour obliger les parties, la forme doit revêtir un accord de volontés, pris en considération par le droit (ce qui n’était pas le cas dans l’ancien droit : la volonté était sous-jacente mais le droit s’en désintéressait).Dans les actes formalistes que le droit romain conserve jusqu’à la fin de son histoire, on prend en considération le consentement, la volonté qui les a inspirés.

    De sorte que pour qu’il y ait contrat, il faut deux choses :

    -         un accord de volontés

    -         le respect d’un rituel, de certaines formes, par les parties (exigence qui n’est nullement anéantie par la reconnaissance de la convention au sens d’accord des volontés) ; les effets juridiques sont attachés à l’accomplissement des formalités rituelles et à l’existence d’une convention (la forme seule n’oblige plus) → Un juriste du IIe s PC, Pedius, résume cette idée : « L’élément commun à tous les contrats, qu’ils naissent de paroles, d’écrits, ou de remise de la chose, c’est la convention »

     <o:p></o:p>

    C – L’élargissement du champ contractuel<o:p></o:p>

    Définition du contrat par les jurisconsultes classiques : « un accord de volonté sanctionné par le droit » → cette définition est beaucoup plus limitative que la conception que nous avons du contrat dans le Code civil, à cause des sanctions spécifiques.

    Les romains ont du contrat une vision concrète : un contrat n’est obligatoire que s’il est spécifiquement sanctionné, c’est à dire s’il fait partie d’une catégorie à laquelle une action est attachée. Sont efficaces les seuls contrats nommés et spécifiquement sanctionnés ; tout accord de volonté n’est pas en soi générateur d’obligation (au sens juridique de lien de droit), il faut pour cela qu’il soit sanctionné c’est à dire que la convention s’intègre à un moule juridique prévu, préétabli, auquel on attache une action spécifique.

    On peut donc dire que les contrats romains forment un ensemble limité au sein duquel les individus doivent choisir celui qui correspond à leurs desseins. Ils n’ont pas de liberté contractuelle, puisqu’on ne peut, par une manifestation de volonté, créer d’autres contrats que ceux qui sont prévus par le droit, c’est à dire sanctionnés par une action, et donc intégrés à la typologie.

    Cette contrainte résulte à la fois de la procédure et de l’esprit du dt romain.

     

    1° La procédure<o:p></o:p>

    Il n’y a pas d’action générale en justice mais seulement des actions spécifiques permettant d’obtenir la sanction d’un droit qui résulte d’un type de contrat.

    A un contrat spécifique correspond une action déterminée.

    Nécessité de rester dans le cadre d’un contrat spécial sanctionné par une action, faute de quoi l’opération réalisée demeure en dehors de la sphère juridique (typologie), de sorte que si l’engagement n’est pas respecté, la partie défaillante ne pourra être contrainte et les prétentions du « créancier » faire l’objet – le cas échéant – d’un recours en justice.

    Sous peine d’être privé de tout recours, il est nécessaire de rester dans le cadre de la typologie existante, de la sphère du droit.

     <o:p></o:p>

    2° L’esprit du droit romain<o:p></o:p>

    A l’origine on n’attache pas d’effet jdq à la volonté mais à l’accomplissement de rites, ce qui conduit à organiser le dt des contrats sur le principe des cas particuliers (dt empirique et casuel, conséquence du formalisme strict de l’époque ancienne). Par la suite le dt prend en considération la volonté, mais le dt romain le plus évolué ne parviendra jamais à abandonner l’idée que l’accord de volonté doit se couler dans des « moules juridiques » prévus (spécificité des contrats), parce que sanctionnés. Le progrès de l’époque classique réside simplement dans la multiplication de ces moules (ou multiplication des « cas »), c’est à dire dans l’élargissement du champ contractuel.

    L’idée d’un dt théorique, dont les règles sont applicables à tout accord de volonté – lui même sanctionné par une action générale en justice (ce qui est la conception du Code civil) – est étrangère à la tradition romaine. Le dt romain n’a jamais « théorisé » le dt des obligations. Il y a eu des efforts de synthèse, œuvre des jurisprudents, mais ces efforts n’ont jamais abouti à l’élaboration d’une théorie générale du contrat.

    <o:p></o:p>

    Ces qqs données relatives au perfectionnement du dt des contrats à l’époque classique étant posées, la typologie des contrats peut être étudiée sous un angle plus technique.<o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

     

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    § 3  Les contrats du droit classique<o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    Il convient dans un premier temps d’étudier l’évolution des anciens acta devenus contrats. En quoi se sont-ils perfectionnés ? Nous verrons ensuite comment s’est élargi le champ des obl° contractuelles avec la consécration de nouveaux contrats, et en particulier les contrats consensuels (l’apparition du consensualisme est une « révolution » jdq en dt romain), qui sont toutefois consacrés en nombre limité.

     <o:p></o:p>

    A – L’évolution : les contrats verbis, re et litteris<o:p></o:p>

    Les actes formalistes de l’ancien droit (acta, gesta) se perfectionnent à l’époque classique. Il y a ceux qui naissent d’un formalisme oral ou écrit (C verbis et litteris), et ceux qui se forment par la remise d’une chose (C re ou C réels)

      <o:p></o:p>

    les contrats verbis :

    A l’époque classique le C verbis dominant, parce que le plus utilisé, est la stipulatio.

    La sponsio de l’ancien dt n’évolue guère en dt classique : elle reste réservée aux seuls citoyens romains et demeure soumise à un formalisme rigoureux (relatif aux termes du dialogue qui scelle l’engagement).

    La stipulatio, en revanche, va connaître un grand développement.

    caractères de la stipulatio:

    → contrat unilatéral (qui fait naître une obl° à la charge d’une seule partie : le promettant)

    → contrat accessible à tous les sujets (cit. romains et pérégrins)

    → contrat de dt strict et abstrait :

    - de dt strict : C sanctionné par une action civile de dt strict qui exclut tout pouvoir d’interprétation du juge quant à l’intention, à l’équité, à la bonne foi, aux circonstances de l’acte.

    -  abstrait : cela signifie que l’on n’indique pas la cause – causa – de l’engagement (le fondement économique ou psychologique de la stipulatio n’a aucune valeur jdq car l’obl° a pour seule source les verba, termes du dialogue).

    Le juge se contente de vérifier si la créance existe, c’est à dire si les formalités ont bien été accomplies, sans pouvoir tenir compte de l’intention réelle des contractants, ni de l’équité ou de la bonne foi.

    Nous sommes là dans la logique du formalisme primitif où les rites produisent par eux-mêmes des effets jdqs, indépendamment de l’intention ou des circonstances.

    Inconvénient du formalisme strict et du caractère abstrait de l’obl° : le dol ne peut être sanctionné.

    → exemple : le promettant (débiteur) s’engage à livrer un esclave au stipulant (sans autre précision sur la cause de l’engagement : en l’occurrence le but recherché par le stipulant réside dans l’accomplissement de certaines tâches par l’esclave, l’utilisation d’une force de travail.)

    Le promettant respecte son engagement en livrant l’esclave mais celui-ci, malade et épuisé, meurt entre les mains du stipulant (créancier). Ce dernier n’a aucun recours contre le promettant car l’obl° est abstraite (livraison d’un esclave, sans qu’ait été précisé le fondement économique et psychologique de la stipulatio ; peu importe, dès lors, son état de santé). Or, l’obl° abstraite est exécutée puisque l’esclave a été livré. Le juge doit donc valider l’exécution car il est lié par les termes de l’acte (« promets-tu de me livrer cet esclave ? » / « Je promets de te livrer cet esclave »), sans pouvoir tenir compte de l’intention.

     <o:p></o:p>

    Des tempéraments ont alors été apportés à la rigueur du caractère abstrait et du formalisme aveugle.

    L’évolution des contrats verbis à l’époque classique peut alors être résumée en 4 points :

    a / la prise en considération de la volonté (apparition de la clause de dol)

    Dans la conception classique, cette interprétation étroite de la stipulation a pu être atténuée, car l’on admet désormais que les paroles solennelles doivent revêtir un accord de volonté. On ne conçoit plus le formalisme verbal comme exclusif de l’expression des volontés contractuelles. Or, la prise en considération de la volonté a permis d’atténuer la rigueur du caractère de dt strict et abstrait du contrat – sans toutefois le remettre en cause – par l’insertion d’une exception de dol dans la formule de l’action reconnue par le préteur. Cette clause de dol prétorienne a ainsi permis au juge de sanctionner les comportements dolosifs.

    Dans les C de dt strict, cette exception n’est jamais implicite comme dans les contrats dits de bonne foi (que nous étudierons plus tard et dans lesquels le juge peut, sans y être invité par une exception formelle, évaluer la bonne foi des parties). Pour les C de dt strict, le dol doit être nécessairement invoqué sous forme d’exception, car le juge ne peut de sa propre initiative scruter la bonne foi des parties.

    La reconnaissance du dol dans les C de dt strict nous éclaire sur la conscience des juristes classiques : conscients des limites et des dangers d’un formalisme aveugle, ils ont contribué à une certaine moralisation du dt.

     <o:p></o:p>

    b / atténuation du formalisme originel<o:p></o:p>

    Cet assouplissement se retrouve dans un rituel verbal moins strict.

    On se souvient qu’à ses débuts, la validité de la stipulation est conditionnée par la congruence absolue des paroles du dialogue rituel ( sur les verba – « promettre » par exemple – et sur le fond de l’engagement). Ces assouplissements sont le fait de la jurisprudence classique.

    -         Gaïus au IIe siècle admet l’utilisation d’une autre langue que le latin (grec, ou langues différentes si les parties se comprennent)

    → exemple d’allègement du formalisme susceptible de faciliter les échanges dans un contexte de diversification et d’internationalisation.

    -         De manière plus générale, on renonce à la concordance formelle du dialogue : la réponse peut être formulée en des termes non congruents. On assiste au déclin de la concordance des verba, qui ne remet toutefois  pas en cause l’exigence d’une concordance de fond (la parole, quelle qu’en soit l’expression, se contente de traduire l’expression d’un consentement, l’accord des volontés).

     <o:p></o:p>

    c / rédaction d’un écrit<o:p></o:p>

    La stipulatio est de plus en plus souvent accompagnée de la rédaction d’un écrit qui n’a (pour cette période) qu’une fonction probatoire. L’écrit se substitue ou se superpose à la preuve testimoniale jusque là dominante (preuve en accord avec la mentalité archaïque qui accordait une place de choix à l’oralité).

    Le document écrit, qui porte le nom d’instrumentum, relate plusieurs choses :

    -         les éléments de la formation du contrat (l’accomplissement et la teneur du dialogue rituel)

    -         le nom des témoins présents

    détail pratique : l’écrit apparaît en matière de preuve au IIIe siècle AC. Son support est fourni par des tablettes de bois recouvertes d’une pellicule de cire sur laquelle on gravait le texte à l’aide de stylets. Les tablettes étaient ensuite closes par un fil sur lequel étaient apposés les sceaux des parties et des témoins.

    A l’époque classique, les romains distinguent encore le support écrit (instrumentum) de l’acte lui-même (stipulatio).

    De sorte qu’on peut encore dire que le recours à l’écrit ne change pas la nature de la stipulation, qui demeure un contrat verbis (c’est toujours le  dialogue – et non l’écrit – qui fait naître l’obl°).

     <o:p></o:p>

    d / élargissement du champ d’application<o:p></o:p>

    La stipulation devient, à l’époque classique, le contrat le plus utilisé : on la qualifiera même de « moule à contrat » parce que susceptible de réaliser tous les types de prestations unilatérales sous forme de promesse – dès lors que la volonté se coule dans le « moule » de la stipulation – et de répondre à des besoins très divers de la vie économique.

    Ex / promesse portant sur une somme d’argent, un objet déterminé, une chose de genre, une prestation en nature (accomplissement d’un travail) ou une abstention, un transfert de propriété ou de tout autre dt réel…

    Elle permet d’intégrer à la sphère du dt tous les types d’engagements unilatéraux.

    L’étendue de son champ d’application s’explique par le caractère abstrait de l’acte. La cause n’étant pas mentionnée, elle peut servir de moule juridique à l’expression de volontés particulières très diverses.

    La stipulation classique a donc une fonction créatrice en permettant de sanctionner (par l’action qui lui est attachée) des engagements très divers dès lors qu’ils se coulent dans le moule jdq de la stipulation. C’est une manière de consacrer des conventions qui étaient jusque là dépourvues de force obligatoire (parce que dépourvues de sanction, d’action). Or, il y existe une infinie variété d’opérations susceptibles d’être sanctionnées par une stipulation (cf. les exemples ci-dessus):  vocation de la stipulation à encadrer juridiquement toute promesse.

     <o:p></o:p>

    Cette grande souplesse de la stipulatio, qui s’explique par son caractère abstrait,  a permis de répondre à de nouveaux besoins de la vie économique ; les échanges s’en sont trouvés facilités et la stipulation est devenue, à l’époque classique, le C le plus utilisé en dt romain.

    Ce qui prouve que le formalisme n’a pas toujours été un obstacle à la vie juridique, un facteur paralysant, mais en l’occurrence un outil permettant de  « juridiciser » toute promesse, à une réserve près toutefois : le dialogue entre les parties – malgré les assouplissements du formalisme originel – exige toujours la présence des cocontractants → conséquence : la stipulation entre absents est exclue.

      <o:p></o:p>

    Les contrats litteris :


    <o:p></o:p>

    a / l’expensilatio <o:p></o:p>


    <o:p></o:p>

    → cf. schéma 4 (dossier « schémas »)<o:p></o:p>

    C’est le seul contrat litteris connu du dt civil, apparu vers le milieu du IIe s. AC.

    Il se forme par des inscriptions portées sur le « codex » : livre de compte d’une gens - sorte de comptabilité familiale quotidienne gérée par un pater - sur lequel figurent les recettes (accepta) et les dépenses (expensa) de la « famille ». D’où son nom de codex accepti et expensi.

    Gaïus distingue deux types d’inscriptions qui n’ont pas la même valeur juridique, les unes sont créatrices d’obligation, les autres pas :


    <o:p></o:p>

    -         les arcaria nomina ne créent pas d’obligation.

    Ce sont des inscriptions qui rendent compte de chaque mouvement de caisse (entrée ou sortie) avec la date et le nom de la personne qui a, soit versé, soit reçu de la caisse. Ces inscriptions-là n’ont qu’une valeur comptable et probatoire d’une obligation déjà née – inscrite dans la colonne des dépenses -  ou éteinte - inscrite dans la colonne des recettes.

    → exemple : dans le codex de Marcus, figure au titre des dépenses « donné 100 à Titius, tel jour par mutuum » (le mutuum devient à cette époque un C de prêt d’argent et plus seulement de denrées consomptibles). Apparaissent dans cette colonne des dépenses ou sorties d’argent le nom du débiteur, le jour, le somme prêtée et la nature du contrat créateur de l’obl° (mutuum).

    Mais l’obligation de Titius est née de la remise de la somme (acte matériel / contrat réel) et non de l’inscription, qui sert dans ce cas à prouver le prêt.

    -         les transcriptia nomina (véritables contrats litteris) sont créatrices d’obligations, il en existe deux :

    la transcriptio a re in personam qui permet de transformer une obligation quelconque (née d’un autre contrat ou d’une autre source comme par exemple une obl° délictuelle) en obligation litteris sans changer l’identité des parties : l’intérêt de cette novation de créance concerne surtout le créancier qui devient titulaire d’une obligation de droit strict et abstraite (autrement dit l’obl° novée devient incontestable) : les parties et le juge sont liés par les termes stricts de l’inscription portée au codex sans tenir compte de l’intention des parties ou des circonstances de l’acte (par ex / transformer une obl°délictuelle toujours contestable en obl° litteris incontestable).


    <o:p></o:p>

    la transcriptio a persona in personam qui permet d’opérer un changement de débiteur : elle a une finalité simplificatrice.

    Exemple → A doit 100 à B qui doit 100 à C : la TPP permet d’éviter un double paiement, dès lors que par un jeu d’écriture fictif ne correspondant à aucun mouvement de fonds, on va faire en sorte que A devienne le débiteur de C pour 100.

    - 1er jeu d’écriture : C écrit avoir reçu 100 de B – bien qu’en réalité il n’ait rien reçu – ce qui libère B vis a vis de C

    - 2e jeu d’écriture : C écrit avoir versé 100 à A, ce qui oblige A vis à vis de C


    <o:p></o:p>

    Intérêt : le procédé favorise la circulation des créances, sans mouvement effectif de deniers. C’est un acte très utile dans une société où les contractants ne disposent pas toujours de liquidités. Il permet de réaliser des paiements à distance par délégation (une simple lettre au créancier suffit à autoriser la novation de débiteur). Atout pour des échanges commerciaux plus commodes et plus rapides. Contrat très utilisé par les banquiers et les hommes d’affaire romains.

     

    -         L’expensilatio présente les caractères suivants :

    ● contrat du droit civil réservé aux citoyens romains

    ● contrat unilatéral : il fait naître une obl° à la charge de celui dont le nom est porté dans le codex au titre des expensa (sorties d’argent)

    ● il porte exclusivement sur une somme d’argent puisqu’il naît d’une inscription comptable

    ● il est de droit strict et abstrait : le juge est lié par les termes écrits du contrat sans pouvoir rechercher l’intention ni la cause de l’obl°(que le créancier ne mentionne pas dans son jeu d’écriture).


    <o:p></o:p>

    En raison de ces caractères, le champ d’application de l’expensilatio est resté limité ; il tombe en désuétude dès les premiers siècles de l’Empire.

    Néanmoins, à côté de l’expensilatio, propre aux citoyens romans, Gaïus mentionne l’existence de contrats litteris pour les pérégrins.

     <o:p></o:p>

    b / les contrats litteris des pérégrins<o:p></o:p>

    Ce sont des contrats d’origine orientale, inspirés de la pratique grecque, qui se sont développés avec la conquête romaine : les chirographes  et les syngraphes. Il s’agit d’un écrit dans lequel celui qui souscrit (signe) se reconnaît débiteur d’un tiers (sorte de reconnaissance de dette).

    La différence entre les deux types de contrats est formelle :

    -         Le chirographe est rédigé à la 1ère personne, de la main du débiteur, ou au moins signé par lui, sans témoins, en un seul exemplaire.

    -         Le syngraphe est rédigé à la 3ème personne, par un scribe, en présence de témoins qui signent aux côtés du débiteur, en plusieurs exemplaires.

    L’engagement dont ils matérialisent l’existence prend sa source dans l’écriture elle-même, puisque celle-ci contient l’aveu de sa dette par le débiteur.

    Caractères : ce sont aussi des contrats unilatéraux, de droit strict et abstraits (on est tenu par le texte même de l’engagement sans rechercher l’intention des parties).

     <o:p></o:p>

    3° Les contrats réels  → A partir d’ici, retour au principe du résumé

    Deux anciens contrats : mutuum et fiducie

    Trois nouveaux contrats assortis d’une sanction propre : le dépôt le commodat et le gage.

    a / le mutuum <o:p></o:p>

    -         conditions de validité : un élément intellectuel, la convention (accord des parties sur les conditions de leur engagement), et un élément matériel, la remise de certaines choses à titre de prêt, dont on trouve une énumération dans les Institutes :

    Le mutuum ne peut avoir pour objet que « des choses qui s’apprécient au poids, au nombre ou à la mesure comme du vin, de l’huile, du blé, de la monnaie, du cuivre, de l’argent, de l’or. Toutes ces choses doivent être ou bien comptées, ou mesurées, ou pesées ».

    -         effets : C unilatéral / de droit strict sanctionné par une action spécifique : la condictio qui permet au créancier d’obtenir la restitution par équivalent, mais rien de plus / en principe gratuit

    -         double évolution du mutuum :

    du prêt de consommation vers le prêt d’argent (contrat qui devient de plus en plus une opération financière)

    de la gratuité ( finalité originelle de prêt entre amis, de service rendu) vers la stipulation d’intérêts (les intérêts doivent faire l’objet d’une stipulatio - séparée du mutuum - et sanctionnée par une action différente de la condictio → il y a donc deux contrats sanctionnés par deux actions : un C de prêt et une stipulation d’intérêts (les intérêts ne résultent pas automatiquement du mutuum).

    → exemple : Marcus emprunte 100 à Titius qui lui doit donc 100 en vertu du mutuum, et rien de plus. Si Titius a en plus stipulé des intérêts et qu’une stipulatio verbale est intervenue sur ce point, en cas de défaillance de Marcus, Titius devra :

                      -  agir sur le fondement de la condictio pour obtenir les 100

                       -  agir sur le fondement de l’action attachée à la stipulatio pour obtenir les intérêts

    Démonstration du caractère de droit strict du mutuum : si l’emprunteur s’est engagé à verser des intérêts au prêteur dans le cadre de la convention de mutuum (indépendamment de toute stipulation), le juge ne pourra pas tenir compte de cette manifestation de volonté, parce qu’il est lié par le seul élément matériel du contrat : l’argent prêté, le capital rendu. Tout le reste n’existe pas sauf à faire l’objet d’un contrat séparé.


    <o:p></o:p>

    b / les autre contrats réels<o:p></o:p>

    -         caractères généraux : C sanctionnés par des actions de bonne foi (le contraire d’une action de droit strict): le juge peut rechercher l’intention des parties, il dispose d’une grande liberté d’appréciation relative à l’intention, la bonne foi, l’équité / synallagmatiques imparfaits : unilatéraux lors de la conclusion, ils peuvent engendrer une obligation réciproque en cours d’exécution / objet : choses d’espèce ou corps certains

    -         fiducie : remise d’une chose à charge pour le fiduciaire de la restituer (en vue d’un prêt à usage, d’un dépôt ou d’un gage). Opération contraignante en raison du transfert de propriété qu’elle implique. Elle est en outre réservée aux citoyens romains.

    Pour limiter ces inconvénients, les juristes classiques ont créé de nouveaux contrats accessibles aux pérégrins, et qui répondent aux diverses finalités de la fiducie, mais se forment par simple livraison matérielle de la chose sans transfert de propriété.

    -         dépôt, gage, commodat : C réels, sans transfert de propriété, accessibles aux pérégrins et sanctionnés par des actions de bonne foi

    dépôt : finalité de conservation et de garde (gratuite) de la chose déposée / obligations des parties

    commodat : prêt à usage (utilisation gratuite de la chose, dans certaines conditions) / obligations du commodataire (conserver la chose, en faire un certain usage et la restituer ensuite) → sanctionnées par une action dite « actio commodati directa »; obligation du commodant (remboursement des impenses) → sanctionnée par une action dite « actio commodati contraria »

    Remarque : pour ces contrats synallagmatiques imparfaits, l’obl° principale (restitution) est toujours sanctionnée par une action « directe », et l’obl° réciproque (impenses) par une action « contraire ». (il y a là une action par obligation)

    le gage : remise d’un objet en garantie d’une créance, à charge pour le créancier de la restituer une fois la dette acquittée, mais sans possibilité de se faire payer sur le prix en cas de défaillance du déb. Dans ces circonstances, en quoi le gage constitue-t-il une garantie pour le créancier, et que se passe-t-il si la dette n’est pas honorée ?

    →  moyen de pression et non compensation de la dette impayée

    →  si le dette n’est pas acquittée, le gage se prolonge indéfiniment (le débiteur défaillant ne peut réclamer la restitution de la chose gagée)

    →  pour faire du gage une compensation (vente de la chose gagée à l’échéance de la dette) et non plus seulement un moyen de pression, les parties peuvent y adjoindre un pacte (contrat consensuel) à cette fin : pacte de distrahendo.<o:p></o:p>

    Caractère imparfait de ce dt  où la technique juridique d’un contrat donné ne permet pas d’obtenir un résultat contraignant : la vente de la chose gagée. Perfectionnement du gage au Bas Empire, indépendamment de tout pacte joint.

      <o:p></o:p>

    Conclusion sur l’évolution des acta devenus contrats :

    -         Extension du champ contractuel avec l’apparition de nouveaux contrats (dépôt / gage / commodat qui se différencient de la fiducie)

    -         Prise en considération de la volonté dans de nombreux contrats formels hérités de l’ancien dt, ce qui a permis de tempérer leur caractère de dt strict et abstrait (stipulatio) sous réserve toutefois du l’expensilatio et du mutuum.

     

    Pour autant, la prise en considération de la volonté dans les contrats formels n’est pas le consensualisme, dont l’apparition à l’époque classique constitue une révolution intellectuelle et juridique majeure.

     <o:p></o:p>

    B – La nouveauté : les contrats consensuels<o:p></o:p>

    Exception dans le système contractuel romain / apparition liée au développement de la vie économique, à une avancée de la technique juridique. Conséquence de leur caractère exceptionnel : quatre C consensuels (vente, mandat, louage, société) → numerus clausus<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    1° Caractères généraux<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    -         C synallagmatiques de bonne foi / parfaits pour vente, louage, société / imparfait pour le mandat

    -         Sanctionnés par une action de bonne foi (cf formule du préteur relative à la bonne foi : « tout ce qu’il convient de donner ou de faire en vertu de la bonne foi » → large pouvoir d’appréciation du juge qui n’est plus lié par les termes stricts et le caractère abstrait d’un C)

     <o:p></o:p>

    Remarque : les actions de bonne foi ne sanctionnent pas que des contrats consensuels ; elles peuvent aussi concerner certains C formels (cf dépôt, gage, commodat)

     <o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    2° Etude particulière de la vente :

     <o:p></o:p>

    Dans une économie devenue monétaire, la vente est le C le plus utilisé, « l’archétype des contrats » (Ph. Malaurie).

    Pas d’étude savante et minutieuse ; il s’agit de replacer ce C au coeur d’une évolution, ce qui suppose de revenir aux origines avant d’en étudier les ppaux mécanismes juridiques.

     <o:p></o:p>

    a / les origines du contrat de vente<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    distinguer 3 étapes dans l’histoire de la vente :

    -         le troc ou échange

    -         la vente « au comptant »

    -         la vente avec prestations différées (V. à crédit, à livrer, à terme) → véritable C consensuel créateur d’obligations

     <o:p></o:p>

    Comment expliquer ce passage des formes « primitives » de vente à la vente consensuelle ? Plus généralement, comment expliquer l’apparition du consensualisme dans un système juridique essentiellement formaliste ?

    La question est controversée.

    ● hypothèse de la « double stipulation » pour la vente pré-classique (ce qui expliquerait la dénomination du contrat – emptio-venditio – la dualité des actions, et l’indépendance des liens d’obligation caractéristique de la vente classique

    ● de l’abandon des formes solennelles de la stipulation à la simple expression de la volonté : A. Magdelain défend la thèse d’une création consciente et voulue, obéissant toujours à la logique empirique d’extension du champ contractuel (pratiques commerciales des pérégrins qui auraient intégré la sphère du droit par le biais du préteur, pour répondre à de nouveaux besoins.

     <o:p></o:p>

    b / les principaux caractères de la vente : éléments de formation et effets juridiques

     <o:p></o:p>

    définition : C consensuel par lequel une partie (venditor) s’engage à livrer une chose et l’autre (emptor) à en payer le prix.

    3 éléments sont nécessaires à la formation du C de vente : l’objet (res), le prix (pretium), le consentement (consensus)

     <o:p></o:p>

    Eléments de formation de contrat<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    La chose

    Chose licite (qui se trouve dans le commerce juridique - exemples) et possible (possibilité matérielle de vendre : évocation du cas des choses imaginaires, incorporelles, futures)

     <o:p></o:p>

    Le prix

    Certain, déterminé ou déterminable

    Somme d’argent (pour distinguer la vente de l’échange)

     <o:p></o:p>

    → accord sur la chose et le prix : vente parfaite

     <o:p></o:p>

    Rédaction d’un écrit (instrumentum): + + fréquente, pour préciser le moment de la rencontre des consentements, éventuellement les clauses complexes du C (valeur probatoire qui ne remet pas en cause la nature consensuelle du C) / aucune dénaturation du C

     

    <o:p></o:p>

    Contenu des obligations réciproques

    <o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    Deux effets remarquables

     

    <o:p></o:p>

    -         pas de transfert de propriété de la chose (il faut pour cela recourir à la mancipatio, acte formaliste permettant de réaliser ce transfert)

     

    -         crée des obligations réciproques parfaitement indépendantes, sanctionnées par des actions distinctes

    ● l’obligation du vdeur est sanctionnée par l’actio empti accordée à l’acheteur (emptor)

              ● l’obligation de l’acheteur est sanctionnée par l’actio venditi accordée au vdeur (venditor)

     <o:p></o:p>

    1 ) les obligations du vendeur<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    -         transfert de la possession paisible, utile et durable de la chose (livraison de la chose sans transfert de propriété – tradition – et obligation de conservation jusqu’à la délivrance : le vendeur répond de sa faute mais pas du cas fortuit ni de la force majeure → res perit emptori, conséquence remarquable de l’indépendance des obligations réciproques et du défaut de transfert de propriété)

    -         obligations de garantie contre l’éviction et les vices cachés

    ● contre l’éviction : elle oblige le vdeur à s’abstenir, à assister l’acheteur et à l’indemniser

    ● contre les vices cachés (déclarer tous les vices de la chose dont il connaît l’existence à peine d’indemnisation)

     <o:p></o:p>

    Evolution juridique de ces garanties quant au mécanisme de mise en œuvre : de l’exigence à la disparition d’une stipulation (C verbis « ajouté » au C de vente)

     <o:p></o:p>

    2 ) les obligations de l’acquéreur<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    -         obligation unique : payer le prix convenu auquel peuvent s’ajouter certains frais (garde, livraison, frais de l’acte écrit)

    -         le vendeur peut exiger ce paiement par l’actio venditi (insolvabilité : garanties de paiement)

     <o:p></o:p>

    Les autres contrats consensuels

     <o:p></o:p>

    a / Le mandat

     <o:p></o:p>

    Consensuel, de bonne foi, synallagmatique imparfait et à titre gratuit

     <o:p></o:p>

    C par lequel une personne (mandant) confie à une autre (mandataire) le soin de faire qqc gratuitement dans son intérêt.

     <o:p></o:p>

    Historique : à l’origine le mandat était général et dépourvu de sanction juridique ; cette sanction, qui en fait un C générateur d’obligations, est attestée en 123 AC (sans doute existait-il antérieurement).

    Répond aux besoins de continuité dans la vie des affaires / absences liées aux guerres lointaines / nécessité de recourir à la technique de la représentation.

    MAIS représentation imparfaite :

     <o:p></o:p>

    -         obligation du mandataire : exécuter son mandat de bonne foi, rendre compte de sa mission au mandant, transférer les effets des actes accomplis sur la tête du mandant ( le droit romain ignore la représentation parfaite, où les actes effectués par le mandataire produisent leurs effets directement sur la tête du mandant)

    -         pour sanctionner l’obligation du mandataire, le mandant dispose d’une action : l’action directe de mandat (actio mandati directa)

     <o:p></o:p>

    -         obligation éventuelle du mandant : le C est gratuit mais le mandant peut être amené à indemniser le mdtaire pour les frais engagés ou les préjudices subis au cours de l’accomplissement de la mission.

    -  pour sanctionner l’obligation du mandant, le mandataire dispose d’une      action : l’action contraire de mandat (actio mandati contraria)

     <o:p></o:p>

    b /  louage / société

     <o:p></o:p>

    -         trois types de louage : de chose / de service / d’ouvrage → chaque partie dispose d’une action : l'actio locati appartient au bailleur (locator) / l'actio conducti appartient au preneur (conductor) ; le C porte d’ailleurs, comme la vente, le nom double de locatio-conductio (Pour plus d'informations sur ce contrat, cf. la fiche complémentaire relative à l'indépendance des actions réciproques dans les contrats synallagmatiques parfaits ou imparfaits).

    -         la société : mise en commun de biens, ou activités en vue de réaliser un avantage économique → sanctionné par une action unique : actio prosocio.

     <o:p></o:p>

    Bilan sur l’époque classique

     <o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    § 4 -  Droit romain tardif<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    deux tendances :

    -         déclin du formalisme

    -         progrès du consensualisme (sans consécration de principe)

     <o:p></o:p>

    A – L’évolution des contrats existants

     <o:p></o:p>

    Pas de véritable rupture dans l’évolution / apport du dt tardif à chaque catégorie de contrat

     <o:p></o:p>

    les contrats verbis

     <o:p></o:p>

    La stipulatio conserve sa vocation de « moule à contrats »

    Confirmation de l’évolution dans le sens du droit classique :

    -         la diminution du formalisme

    -         la rédaction systématique d’un écrit qui a fait douter les auteurs de son caractère : C verbis devenu litteris, ou hybride ?

    → grâce à cette évolution, le C a gagné en efficacité et en sécurité, ce qui renforce encore son caractère de C « multi- usage » aux finalités pratiques multiples.

     <o:p></o:p>

    les contrats litteris

     <o:p></o:p>

    Disparition définitive de l’expensilatio au Bas-Empire

    Chirographes et syngraphes finissent par perdre leur caractéristique propre de reconnaissance de dette (donc créateurs d’obligation), pour devenir des modes de preuve de C pré-existants (pour la stipulatio notamment), formés autrement que par un jeu d’écritures.

     <o:p></o:p>

    les contrats réels

     <o:p></o:p>

    Ils conservent leurs caractères du dt classique.

    Le mutuum confirme son évolution de C de prêt d’argent générateur d’intérêts (plus besoin de stipulation mais d’un simple pacte)

    La fiducie disparaît au profit du gage.

    Le dépôt et le commodat conservent leur spécificité.

     <o:p></o:p>

    les contrats consensuels

     <o:p></o:p>

    La nouveauté concerne surtout la vente : dénaturation et perfectionnement

     <o:p></o:p>

    Dénaturation

     <o:p></o:p>

    La généralisation de l’écrit conduit à une confusion entre le document et le contrat. Conséquence : la vente n’est considérée comme parfaite qu’une fois l’écrit rédigé.

    → dénaturation de la vente consensuelle, par cette vente cum scriptura

    Désormais les parties peuvent s’imposer cette formalité (non obligatoire) qui devient un élément de formation du C - et plus seulement un moyen de preuve.

    Avec Justinien, coexistence des deux types de C de vente.

     <o:p></o:p>

    Il s’agit là d’une évolution liée à la pratique puis consacrée par le droit qui tend à sécuriser les relations contractuelles → formalisme de protection qui « contredit » la facilité et l’insécurité liées au consensualisme  et à la liberté contractuelle (mais formalisme facultatif).

     <o:p></o:p>

    Perfectionnement

     <o:p></o:p>

    L’intégration des garanties du vendeur (éviction, vices cachés) dans ledit C, indépendamment de toute convention spécifique (ex / stipulation) → garanties sanctionnées par l’action attachée au C de vente (l’actio empti de l’acheteur) : c’est devenu une protection légale – et non plus conventionnelle – considérée par le droit comme inhérente au C de vente.

     <o:p></o:p>

    Bilan sur l’évolution des anciens C

     <o:p></o:p>

    La place de l’écrit dans le droit byzantin : mode de preuve ou élément (facultatif) de formation du C.

    Conséquence : les relations contractuelles y ont gagné en sécurité mais y ont sans doute perdu en liberté[3] (notamment lorsque le formalisme de l’écrit s’applique aux C consensuels).

    Néanmoins, le consensualisme ne disparaît pas ; il va même connaître une extension remarquable à l’époque post-classique.

     <o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    B – L’extension du consensualisme : la théorie des contrats innommés et des pactes

       jusqu'au chap. 2, § 1 (inclus), le cours apparaît dans sa version intégrale, non résumée (cf. rubrique "cours intégral", 1ère partie, chap. 1, n° 2 et début du chap. 2)       gggg  

    Rappel : vision étroite et concrète du C en dt romain → le C (formel, réel ou consensuel) est une convention (accord des volontés) expressément définie, nommée par le dt et sanctionnée par une action. En dehors des catégories reconnues par le dt, les conventions sont inefficaces :

     <o:p></o:p>

    « Du pacte nu ne naît aucune action » (Paul)

     <o:p></o:p>

    Pacte nu : une convention qui ne correspond à aucun modèle admis en vue de produire des obligations.

    Conséquence : le consentement n’est en principe pas créateur d’obligation (il l’est dans le cadre de qqs exceptions : vente, louage, société, mandat)

    La nouveauté: recours de plue en plue fréquent en pratique au pacte nu, à la convention (negocia), incompatible avec une typologie par nature insuffisante et inadaptée. Préteurs et jurisprudents ont adapté le dt à la pratique en élargissant le champ d’application du consensualisme grâce à la théorie des C innommés et la reconnaissance de certains pactes.

     <o:p></o:p>

    Théorie des contrats innomés<o:p></o:p>


    <o:p></o:p>

    Principe : toute cvtion qui ne peut entrer dans aucune catégorie de C existant (nommé), mais qui a été exécutée par l’une des parties alors qu’elle engendre des obligations réciproques peut être qualifiée de C et donc assortie d’une action.

     <o:p></o:p>

    a / les éléments constitutifs du contrat innommé

     

    -         une convention (accord des volontés)

    -         obligations réciproques (dare, facere, praestare)

    -         exécution unilatérale

    Question : s’agit-il d’un C réel ? Non : deux raisons à cela (…)

    Conséquence : il s’agit bien d’une situation contractuelle « non identifiée » (autre définition : convention synallagmatique qui devient obligatoire par l’exécution que l’une des parties fait de son obligation) qui recouvre une infinité de cas, d’où une tentative de classification en 4 combinaisons théoriques.

     <o:p></o:p>

    b / classification des contrats innomés

     <o:p></o:p>

    -         do ut des : je donne pour que tu donnes (ex / l’échange)

    -         do ut facias : je donne pour que tu fasses (ex / donation avec charge)

    -         facio ut des : je fais qqc pour que tu me donnes qqc (ex / le contrat estimatoire / aestimatum)

    → contrat en vertu duquel un marchand remet des marchandises à un colporteur en simple détention. Il en estime le prix (ex/ 100) et charge le colporteur de les vendre. Si le colporteur vend l’objet au prix estimé, il devra verser 100 au marchand, s’il vend plus cher, il versera 100 et conservera pour lui la différence ; s’il ne vend pas, il devra restituer la marchandise.(c’est bien une convention qui n’entre dans aucun cadre de C connu, même s’il se rapproche de la vente, du louage, de la société, du dépôt ; il n’est assimilable à aucun d’eux)

     <o:p></o:p>

    -         facio ut facias : je fais pour que tu fasses (ex / transaction)

     <o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    c / la sanction des contrats innommés

     <o:p></o:p>

    Insister sur la démarche d’extension du champ des obligations contractuelles qui n’est plus ici empirique (« sédimentation » contractuelle qui répond à un besoin, dépourvue de logique théorique). La sanction des C innommés résulte au contraire d’une démarche théorique : on définit de manière abstraite, théorique les éléments constitutifs du C innommé et on accorde une action pour tous les cas – pratiques –  qui épouseront ce schéma théorique)

     <o:p></o:p>

    En réalité, sous Justinien, la sanction est double :

    -         une action visant à l’exécution de la contre prestation (demander de DI exagérés pour contraindre l’adversaire à une exécution en nature)

    -         action visant à la résolution du contrat (effacement rétroactif des obligations nées d’un C synallagmatique, lorsque l’une des parties n’exécute pas sa prestation)

     <o:p></o:p>

    d / Nature mixte des contrats innommés

     <o:p></o:p>

    -         ces C ne sont pas purement consensuels (l’accord des volontés ne suffit pas)

    -         il s’agit d’une opération mixte, à la fois consensuelle et onéreuse : onéreuse à cause de l’exécution unilatérale de l’une des obligations (accomplissement d’une prestation), élément « onéreux » nécessaire à la formation du C.

     <o:p></o:p>

    → Il n’en demeure pas moins que « l’apparition des C innommés est une étape importante dans l’évolution vers la liberté contractuelle » (Jean DAUVILLIER).

     <o:p></o:p>

    Conclusion sur les C innommés : ils contribuent à l’élargissement du champ des O contractuelles, mais n’épuisent pas encore tts les possibilités d’O licites. Restent encore en dehors du dt  les simples accord, les conventions ou « pactes nus ».

     

    2° -  La reconnaissance de certains pactes →  jusqu’à la fin du chapitre, version intégrale et non résumée du cours

    En principe, un pacte (convention – accord des volontés – non sanctionnée) n’est pas créateur d’obligation puisque « du pacte nu ne naît aucune action ».

    La rigueur du principe sera atténuée par la reconnaissance de certains pactes, en raison de leur utilité pratique (réponse empirique à un besoin).

    La jurisprudence et le préteur ont admis deux catégories de pactes privilégiés : les pactes adjoints et les pactes prétoriens. Le mouvement s’est poursuivi au BE avec la sanction des pactes légitimes par les constitutions impériales.

    a  /  pactes adjoints

    Il s’agit de pactes (conventions) « attachés », joints à un contrat existant (appartenant à une catégorie connue et sanctionnée : contrat formel ou consensuel). On dit qu’ils ne sont pas autonomes. Ce sont les jurisconsultes du BE qui ont élaboré la théorie des pactes adjoints, en les considérant comme faisant partie du contrat qui leur sert de support.

    La sanction de ces pactes n’est autre que l’action du contrat principal qu’ils viennent  compléter ou modifier (pas d’action distincte et spécifique au pacte joint).

    Classification :

    1. les pactes « de renforcement », qui tendent à augmenter ou renforcer l’obligation principale
    2. les pactes « minutoires » qui diminuent l’obligation principale
    3. les pactes conclus en même temps que le contrat principal et les pactes conclus après

    Efficacité : tous ne sont pas créateurs d’obligations. Leur efficacité – et donc leur sanction – dépend à la fois du contenu et du moment de la conclusion. Par exemple la jurisprudence refuse de donner effet à un pacte de renforcement conclu tardivement (bien après le contrat principal). La conclusion « simultanée » est ici un critère favorable à la reconnaissance de ces pactes.

    Exemples :

    -  le pacte de distrahendo : joint au gage (contrat réel apparu à l’époque classique), il permet de faire du gage une véritable compensation, et non plus seulement un moyen de pression (les partie convenant dans le pacte que le créancier gagiste pourra se payer sur la chose à l’échéance de la dette, en cas de défaillance du débiteur). Pour lui donner effet, le créancier gagiste utilisera l’action qui sanctionne le C de gage (actio pigneraticiapignus : gage).

    -  le pacte commissoire : joint à la vente, il permet au vendeur d’obtenir la résolution du contrat pour non paiement du prix (l’action en résolution n’existant pas de plein droit pour les contrats nommés, à cause de l’indépendance des obligations réciproques). Pour lui donner effet il mettra en œuvre l’actio venditi qui lui est reconnue par le contrat principal.

     

    b / pactes prétoriens

    Oeuvre du préteur (d’où leur nom)

    Aucune abstraction dans la démarche : on sanctionne les pactes les plus usuels, ceux qui correspondent à un besoin de la vie éco ou jdq

    Ce sont des pactes autonomes (créateurs d’O en eux mêmes, indépendants de tout autre contrat), sanctionnés par une action qui leur est propre.

    Classification :

    pacte de constitut

    Engagement de payer à une date fixe une somme d'argent déjà due (en vertu d'une obligation antérieure) : ce type de pacte a surtout été utilisé pour octroyer un report de dette (le créancier accorde un délai supplémentaire mais renforce la sanction en cas de non paiement à la deuxième échéance, car l'action particulière du pacte de constitut n'a pas les mêmes conséquences que l'action du contrat initial).

    Le préteur a également validé trois types de pactes qui figurent dans son édit sous l'appellation recepta : receptum arbitrii / receptum argentarii / receptum des bâteliers, aubergistes et maîtres d’écuries

    • receptum arbitrii: deux personnes décident de confier le règlement d'un litige à un arbitre qui accepte la mission (il s'agit donc d'une convention entre les parties d'une part et l'arbitre d'autre part). L'arbitre est tenu vis à vis des parties en vertu de ce pacte.
    • receptum argentarii: pacte par lequel un banquier (argentarius) consent sur demande de son client à payer une somme d'argent à un tiers.
    • receptumdes bâteliers, aubergistes et maîtres d'écurie, qui sont en vertu de ce pacte responsables des bagages, marchandises qui leur sont confiées par leurs clients (il s'agit d'assurer la protection des voyageurs victimes de transporteurs ou hôteliers malhonnêtes / les professionnels répondent des pertes, vols ou détériorations qui se produisent dans leurs locaux ou navires, sauf cas de force majeure)

    -   pacte de serment

    deux parties en litige (soit avant un procès, soit en cours de procès) concluent un pacte de serment, ce qui revient à s'en remettre à la preuve du serment pour mettre fin à leur différend : si au cours du procès, une des parties demande à l'autre d'appuyer ses prétentions d'un serment, l'adversaire ne peut s'y soustraire et le contenu du serment, considéré comme preuve, emporte la décision du juge. (ex / x se prétend créancier de y pour 100 : x et y concluent un pacte de serment et en cours de procès, x demande à y de prêter serment devant le juge / ce dernier pourra alors soit jurer qu'il ne doit rien, soit jurer qu'il doit 50 (ou une quelconque autre somme), soit jurer qu'il doit bien 100)

     

    c / pactes légitimes

    Oeuvre des constitutions impériales, d’où leur nom (lexlegis → légitime)

    Même démarche empirique que pour les pactes prétoriens (les constitutions impériales ont reconnu la validité de trois pactes légitimes)

    classification :

    -   la promesse de dot

    engagement de constituer une dot à la future épousée ; la promesse profite au  (futur) mari qui dispose, grâce à ce contrat, d'une action pour obtenir le paiement de la dot de son épouse.

    -   la promesse de donation

    il s'agit d'une promesse sans forme consacrée par Justinien en 531. A l'époque classique, elle n'avait aucun effet obligatoire sauf à être insérée dans le moule général de la stipulatio.

    -   le compromis

    Convention par laquelle deux parties en litige refusent de le faire trancher par le juge ordinaire (désigné par le préteur) et de la porter devant un arbitre privé librement choisi par elles. Le compromis précède le receptum arbitrii qui intervient entre les parties et l'arbitre. (Là encore, en droit classique, le compromis n'avait aucun effet par lui-même, sauf à l'insérer dans une stipulation)

    ► A la différence des contrats innommés qui sont de nature mixte - à la fois consensuels et onéreux - tous ces pactes sont des C purement consensuels.

    Grâce à ces institutions, le consensualisme a incontestablement progressé à Rome, mais quelle est vraiment, au terme de cette évolution, sa portée ? Quatre contrats consensuels "classiques" (vente, mandat, louage, société), les contrats innommés et certains pactes sanctionnés.

    Ces "modèles" suffisent-ils à couvrir toutes les situations contractuelles?

     

    La portée du consensualisme à Rome

    Le consensualisme ne fut jamais admis en droit romain comme un principe général du dt des C . Il n'existe pas de règle générale donnant en principe un effet positif au consentement.

    Comparaison avec le droit contemporain (régi par le principe inverse) : le droit positif est en principe consensualiste, sauf exception, tandis qu'en dt romain le consensualime demeure l'exception. Bien que les contrats consensuels soient d'application courante, la pratique n'a jamais eu raison du formalisme qui caractérise la tradition juridique romaine.

    Deux raisons à cela :

    -    l’origine religieuse du dt romain : après la scission du juridique et du religieux, les mentalités sont restées fidèles à l'idée que le droit ne peut naître que du rituel et d'une certaine solennité. C'est une des raisons de l'enracinement du formalisme.

    -   le développement empirique du dt romain : un dt qui se construit et se perfectionne par créations successives  – les C – mais qui ignore l'abstraction, la théorie du C. Or, admettre le consensualisme comme un principe suppose toute une construction théorique autour du contrat (pour essayer de couvrir toutes les situations possibles grâce à un droit commun du contrat), ce à quoi les romains ne sont pas parvenus. Il n'y a pas en dt romain de théorie générale du contrat.

    Pour autant, à partir de la pratique contractuelle, les jurisconsultes ont dégagé un certain nombre de règles communes à tous les C : une construction plus proche de la « technique » du C que de la théorie, en raison de son caractère inachevé, imparfait, lacunaire.


    <o:p></o:p>

    SECTION III - RECHERCHE D’UNITÉ DANS LA TECHNIQUE DU CONTRAT

    Section hors programme (ne sera pas traitée en cours / outil pédagogique)

    <o:p></o:p>

    <o:p></o:p>

    Abréviations : <o:p></o:p>

    C : contrat<o:p></o:p>

    DI : dommages intérêts<o:p></o:p>

    DR : droit romain<o:p></o:p>

    dt : droit<o:p></o:p>

    ex/ : exemple<o:p></o:p>

    ie : c’est à dire<o:p></o:p>

    jdq : juridique<o:p></o:p>

    obl° : obligation<o:p></o:p>

    pb : problème<o:p></o:p>

    qd :quand<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    Il ne saurait être question de technique du C dans le très ancien dt romain à cause du formalisme rigoureux qui domine alors (l’obl° naît du rituel – geste, parole – il suffit que celui qui accomplit le rite soit capable pour valider l’acte → pas d’autre subtilité juridique)<o:p></o:p>

    L’émergence de règles communes à tous les C suppose un certain perfectionnement du dt et un affaiblissement du formalisme. C’est donc à l’époque classique qu’apparaissent certains principes relatifs à la formation, à l’exécution et à l’extinction du C.<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    § 1 -  Formation du contrat<o:p></o:p>


    <o:p></o:p>

    L’atténuation du formalisme a mis en avant l’importance du consentement (A). En revanche, la notion de cause est ignorée du DR (B). <o:p></o:p>

    A -  Le consentement<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    Le consentement devenu indispensable doit obéir à certains critères de qualité : émaner d’une personne capable (esclave, mineur, enfant en puissance – alieni iuris – ne peuvent s’engager), exprès (manifesté sans équivoque), sérieux (ne doit pas être donné par jeu ou plaisanterie), exempt de vices. Le DR place au rang des vices du consentement l’erreur, le dol, la violence, la lésion.<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    1° -  L’erreur<o:p></o:p>


    <o:p></o:p>

    L’erreur de droit (la méconnaissance de la loi et donc des conséquences de son engagement) n’est prise en considération que très rarement. Le dt sanctionne plus souvent l’erreur de fait sur la nature jdq de l’acte (ex/ confusion prêt à usage et dépôt lorsqu’on reçoit une chose), sur la personne (pour les C intuitu personae, dépôt, mandat, société), sur l’objet (qd l’erreur porte sur l’identité ou la substance de la chose, mais pas sur la qualité : ex/ erreur sur l’identité : prendre un immeuble pour un autre – ex/ erreur sur la substance : prendre du cuivre pour de l’or) <o:p></o:p>

     

    <o:p></o:p>

    <o:p></o:p>

    2° -  Le dol et la violence<o:p></o:p>


    <o:p></o:p>

    L’évolution du DR sur ce point est intéressante. Rappel : le dol est un moyen frauduleux utilisé pour induire le cocontractant en erreur, de telle sorte que sans ce moyen il n’aurait pas contracté ou l’aurait fait dans des conditions moins désavantageuses pour lui. La violence est une contrainte physique ou morale exercée sur le cocontractant, qui l’empêche de consentir librement.<o:p></o:p>

    Jusqu’au dt de Justinien, le dol et la violence ne sont pas considérés comme des vices du consentement mais comme des délits portant atteinte à l’ordre public et sanctionnés comme tels : la victime du dol intente donc une action délictuelle, l’action de dol, qui lui permet d’obtenir l’annulation du C (et l’effacement de ses effets, soit par la remise des choses en l’état où elles se trouvaient avant le C - restitutio in integrum - soit par le versement de dommages intérêts, lorsque la restitutio est impossible, DI équivalents au quadruple de l’intérêt porté au C). Cette action de dol est une action indépendante du C puisque délictuelle (elle est invariable quel que soit le contrat vicié).<o:p></o:p>

    En revanche, lorsque le dol et la violence commencent à être considérés comme des vices du consentement, la sanction (ie la nullité du C et l’effacement de ses effets) peut être obtenue par l’action même du C : ex/ dans le cas d’une vente, l’acquéreur victime d’un dol intentera l’actio empti pour obtenir l’annulation (ie l’action spécifique au C de vente, car il s’agit d’un pb considéré comme étant lié à la formation du C et plus seulement d’une atteinte à l’ordre public)<o:p></o:p>

    Jusque là, nous n’avons envisagé la sanction que dans le cas où le C a été exécuté (ce qui suppose une demande d’annulation intentée par la victime). Qu’en est-il lorsqu’il n’a pas été exécuté ? Si le créancier auteur du dol demande l’exécution du C, le débiteur peut lui opposer une exception de dol qui, lorsqu’elle est admise, paralyse les effets du C.<o:p></o:p>

    → Remarque sur la conception romaine du dol : le DR distingue le bon dol (dolus bonus), qui est licite et peut être assimilé à une certaine habileté pratiquée dans les affaires, du mauvais dol (dolus malus) qui est sanctionné au titre d’une manœuvre déloyale.<o:p></o:p>

    → Enfin, toutes les violences ne sont pas admises (ce qui compromettrait la sécurité juridique des échanges) : il faut que la violence soit de nature à inspirer la crainte à un homme normal et raisonnable (bon père de famille).<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    3° -  La lésion<o:p></o:p>


    <o:p></o:p>

    La lésion que l’on range traditionnellement dans les vices du consentement alors qu’il s’agit plutôt d’une notion d’ordre économique a une portée très limitée en DR. Elle résulte d’une situation objective – la disproportion entre les prestations – dans les C à titre onéreux.<o:p></o:p>

    Ce n’est que dans le DR tardif que la lésion est prise en considération, dans le seul cas de la vente d’immeuble : si le prix payé est inférieur à la moitié de la valeur, le vendeur peut faire rescinder le C ou demander un complément de prix (rescision : destruction par décision judiciaire d’un acte lésionnaire).<o:p></o:p>

    La réticence du DR à reconnaître la lésion s’explique par la crainte de voir attaquer tous les C si l’on admet le déséquilibre économique comme une cause d’annulation (facteur d’insécurité juridique).<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    Ces règles communes à tous les C sont les prémices de la théorie des vices du consentement. Aujourd’hui la cause, au même titre que le consentement, est devenue un élément déterminant du C. Ce n’était pas le cas en DR.<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    B -  La cause<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    La théorie de la cause n’existe pas en DR. On chercherait vainement dans tout le corpus un texte de principe analogue aux art. 1131 et 1133 C. civ. (l’obl° sans cause, ou sur fausse cause, ou sur une cause illicite ne peut avoir aucun effet / la cause est illicite qd elle est prohibée par la loi, qd elle est contraire aux bonnes mœurs ou à l’ordre public)<o:p></o:p>

    Le DR n’est pas causaliste, ce qui ne veut pas dire que certaines solutions que l’on rattache aujourd’hui à la cause lui sont étrangères. Ces solutions existent en DR, mais elles relèvent d’un autre principe que la cause.<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    exemple 1: aujourd’hui, en matière de C de prêt, l’emprunteur n’est pas tenu de rendre s’il n’a rien reçu, le fait d’avoir reçu étant la cause de l’obl° de rendre. Cette solution se retrouve dans tous les C réels romains, mais elle ne repose pas sur la cause : elle est fondée sur l’élément réel du C (le transfert matériel de la chose sans lequel le C n’est pas formé).<o:p></o:p>

    → dans le 1er cas, le C est formé (puisqu’il est consensuel) mais nul parce que l’obl° du débiteur/emprunteur est dépourvue de cause<o:p></o:p>

    → dans le second cas, le C n’est pas formé (faute de transfert matériel de l’objet) donc l’obl° [du débiteur] n’est pas née<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    exemple 2 : aujourd’hui, un engagement sans cause, sur fausse cause ou sur cause illicite ou immorale est nul. Les romains ont la même solution, mais ils y parviennent par le moyen de l’exception de dol, sans faire référence à la cause. Nous en avons vu un exemple avec l’évolution de la stipulation à l’époque classique.<o:p></o:p>

    → stipulation ayant pour objet la livraison d’un esclave : le stipulant (créancier) s’est engagé avec le promettant dans un but, l’accomplissement de certaines tâches par l’esclave. On peut y voir la cause de son engagement. Cette cause disparaît si l’esclave (empoisonné par le promettant) meurt entre les mains du stipulant. Ce dernier peut intenter un recours contre le promettant sur le fondement du mauvais dol et non sur le fondement du défaut de cause (à condition toutefois que l’hypothèse du dol ait fait l’objet d’une clause expresse intégrée dans le rituel verbal de la stipulation)<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    On voit donc à travers ces exemples que certaines solutions que l’on rattache aujourd’hui à la notion de cause, n’étaient pas en DR liées à ce principe.<o:p></o:p>

    D’autres solutions en revanche n’existaient pas : aujourd’hui, la conséquence la plus importante de la théorie de la cause est la possibilité d’obtenir la résolution pour inexécution d’un C synallagmatique (l’exécution de la contre prestation étant considérée comme la cause de l’obl° de chaque contractant). Ce type de résolution existe bien en DR, mais à titre d’exception et non au titre d’un principe général.<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    pour les C nommés : exemple de la vente<o:p></o:p>

    Le C ne peut être résolu pour inexécution de l’une des obl° sauf si les parties ont prévu un pacte adjoint (cf supra section II, §4, B,2°, a : les pactes adjoints), dit pacte commissoire mentionnant expressément cette possibilité ; faute de pacte, elle n’intervient pas de plein droit.<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    en revanche la possibilité existe pour les C innomés, puisque celui qui a exécuté sa prestation (élément de formation du C innomé) dispose de 3 actions contre son cocontractant rétif : une pour le forcer à exécuter, deux pour résoudre le C ( cf supra section II, §4, B, 1°, c : la sanction des C innomés)<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    Le DR est un système a-causaliste. Nous verrons que c’est au Moyen Age que la théorie de la cause trouve sa source (chez les canonistes), mais ce n’est qu’au XIXe siècle qu’elle a été véritablement édifiée.<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    A l’exception de la cause qui ne fait l’objet d’aucune réglementation générale, le DR est néanmoins parvenu à dégager certains principes relatifs à la formation du C (le consentement). Il en va de même, quoi qu’avec un succès inégal, en matière d’exécution et d’extinction des obl° contractuelles.<o:p></o:p>

     

    § 2 -  Le sort de l’obligation contractuelle<o:p></o:p>


    <o:p></o:p>

    L’obligation a vocation à être exécutée. C’est son sort « normal ». Par cette exécution, elle disparaît, elle est éteinte.<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    A -  L’exécution du contrat<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    Hypothèse de l’exécution volontaire<o:p></o:p>

    Les principes sont assez simples : elle se réalise le plus souvent par un paiement (terme générique pour désigner la prestation → dare, praestare, facere, non facere) Ce paiement doit être valable (il doit en particulier porter sur la chose due : le débiteur ne se libère pas en fournissant une autre prestation, sauf accord du créancier).<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    Hypothèse du retard dans l’exécution<o:p></o:p>

    Le DR utilise dans ce cas le système de la demeure (mora) à l’encontre de la partie récalcitrante : acte par lequel le créancier demande au débiteur l’exécution de son obl°, cette mise en demeure (mora debitoris) ayant pour effet de faire courir des DI moratoires et de mettre les risques à la charge du débiteur (lorsqu’il détient une chose). Le même moyen existe à l’encontre du créancier qui oppose un refus injustifié à l’exécution du C (hypothèse beaucoup plus rare), le déb peut alors faire jouer la mora creditoris qui a les mêmes effets.<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    Hypothèse de l’inexécution<o:p></o:p>

    Elle est plus problématique que les précédentes. Il convient tout d’abord de préciser le sens du mot inexécution : il s’agit ici d’une impossibilité d’exécution, qui est indépendante de la volonté des parties, à ne pas confondre avec l’inexécution volontaire, qui est toujours sanctionnée.<o:p></o:p>

    C’est une situation qui pose le pb de la responsabilité contractuelle du débiteur et de la faute. (rappel : la responsabilité contractuelle engendre une obl° de réparer le préjudice résultant de l’inexécution d’un C)<o:p></o:p>

    -          responsabilité objective : le déb est responsable de la perte de la chose alors qu’il n’a commis aucune faute. Pour déterminer les C qui emportent ce type de responsabilité, les romains procèdent au cas par cas, sans esprit de synthèse.<o:p></o:p>

    → ce sont par ex les différents C de garde : dépôt, commodat, louage d’ouvrage<o:p></o:p>

    Ils distinguent cependant deux niveaux de responsabilité : la force majeure (évènement irrésistible) exonère, mais pas le cas fortuit (événement imprévu mais non irrésistible).<o:p></o:p>

    -          Responsabilité subjective : la perte de la chose est imputable au déb, parce qu’il y a eu faute, une notion – la culpa – bien difficile à cerner en DR. Elle est d’abord conçue de manière négative (époque classique), appréciée par rapport à une notion abstraite : le bon père de famille. La faute, c’est donc l’imprudence, l’inadvertance, la négligence que ne commet pas un bon père de famille tenu d’apporter tout son soin à la conservation de la chose. Par la suite, le dt byzantin introduit des degrés de faute et de responsabilité supplémentaires ; il multiplie les distinctions subtiles sans parvenir à dégager une notion précise de la faute. On retombe dans la casuistique et les solutions empiriques.<o:p></o:p>

    Il manque, là encore, une systématisation, une théorie de la responsabilité contractuelle, que le DR n’est pas parvenu à élaborer. On retrouve cette lacune dans le domaine de l’extinction des obl° contractuelles.<o:p></o:p>

     

    B -  L’extinction des obligations contractuelles<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    Outre le paiement qui a vocation à éteindre l’obl° et dont les modalités ont été facilement systématisées, le DR consacre des modes d’extinction qui témoignent d’un perfectionnement de la technique juridique : ils inventent la novation et la compensation.<o:p></o:p>


    <o:p></o:p>

    1° -  La novation<o:p></o:p>


    <o:p></o:p>

    Elle est apparue à l’époque classique et opère extinction d’une obl° par la création d’une nouvelle obl° qui vient la remplacer. La novation suppose la réunion de plusieurs conditions : parmi ces conditions, la plus importante exige que les deux obl° – ancienne et nouvelle – doivent avoir le même objet. Le DR ne connaît pas de novation par changement d’objet. Le changement peut donc porter soit sur la personne du débiteur ou du créancier, soit sur la source de l’obl°, soit sur ses modalités (clauses accessoires au C : terme, condition…)<o:p></o:p>

    Ex / changement de déb dans le cadre d’une stipulation<o:p></o:p>

    A (stipulant) est créancier de B (promettant d’origine). A accepte la novation au profit de C (nouveau déb) : une nouvelle stipulation intervient entre A et C (Ce que B me doit, promets-tu de me le donner ?). B et C se sont entendus : C s’engage sur l’invitation de B, on dit que B l’a délégué.<o:p></o:p>

    Ex / changement de source d’une obl°<o:p></o:p>

    Ce que l’on doit en vertu d’un C consensuel, on le devra désormais en vertu d’un C formel. Ce type de novation pouvait présenter un intérêt du point de vue des sanctions, ie des actions attachées à tel type de C (action de bonne foi / action de droit strict) ou du point de vue des garanties attachées à tel ou tel C.<o:p></o:p>

    Effet de la novation : elle éteint l’ancienne obl° avec tous ses accessoires.<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    2° - La compensation<o:p></o:p>


    <o:p></o:p>

    Il faut supposer que A est créancier de B et B créancier de A.<o:p></o:p>

    Les 2 créances peuvent coexister et être exécutées indépendamment (chaque créancier demandant son paiement à l’autre). Mais il en résulte des inconvénients économiques (liés au double déplacement de numéraire), juridiques (celui qui a payé peut se heurter à l’insolvabilité de l’autre : A paye B qui dilapide la somme et n’est plus en mesure de payer A lorsque ce dernier lui demande d’honorer sa dette). Pour éviter ces inconvénients, les romains ont imaginé le système de la compensation, qui peut se définir comme l’extinction de deux dettes réciproques à concurrence de la plus faible : seul subsiste et doit être payé l’excédent de la dette la plus élevée sur la plus faible.<o:p></o:p>

    Jusqu’en droit byzantin, l’organisation de la compensation est le fruit de créations empiriques successives qui en étendent le champ d’application sans jamais parvenir à une règle de principe.<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    Ex / on a d’abord admis que les 2 dettes compensables devaient être nées de la même opération jdq (le vendeur poursuit l’acquéreur pour paiement du prix, mais l’acquéreur lui réclame des DI pour sa négligence pendant la garde de la chose). Avec Justinien, les dettes compensables peuvent ne pas avoir la même source.<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    On a longtemps cru que Justinien était parvenu à l’élaboration d’un régime de la compensation, mais il n’a fait que multiplier les cas dans lesquels elle s’imposait au juge (compensation judiciaire).<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    Il apparaît nettement, au terme de cette étude de la technique du C que, dans bien des domaines, on est encore loin d’une théorie générale. Le principal obstacle à l’élaboration d’une théorie réside en fait dans le caractère essentiellement empirique du DR.<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

     

    CONCLUSION DU CHAPITRE 
    LE DROIT ROMAIN DES CONTRATS, UNE CRÉATION EMPIRIQUE<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    Dire que le DR des C est né d’une création empirique, cela revient à dire que c’est un dt essentiellement pratique (≠ théorique). Concrètement, cela signifie que le dt se développe, se construit, se perfectionne chaque fois qu’apparaît un besoin nouveau (lui-même lié à des facteurs économiques, sociaux, jdq, en perpétuelle évolution). La vie économique, les échanges créent un besoin auquel le système jdq existant ne peut pas répondre parce que c’est un système étroit, fermé, au sein duquel les individus doivent choisir l’outil jdq (le C) qui correspond le mieux à leur objectif. Si cet outil jdq n’existe pas, il faut le créer. Ce fut le rôle du préteur, par ex, pour de nombreux C ou catégories de C. Lorsqu’une opération était couramment pratiquée par les agents de la vie économique (cette opération permettant de répondre à un besoin précis), mais qu’elle ne faisait pas partie de la typologie des C existants, il pouvait la faire entrer dans la sphère du dt en accordant aux parties une action en justice. L’intégration d’un nouveau C se faisant par la reconnaissance d’une sanction jdq.<o:p></o:p>

    1° -  Le droit romain connaît LES contrats<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    C’est un dt qui se construit en réalisant des créations successives et empiriques pour répondre à des besoins divers. Conséquence : la diversité des besoins engendre la diversité des C. Diversité que l’on retrouve dans la formation des C, dans les sanctions (spécificité des actions), la terminologie (contrats, pactes) : ainsi les C peuvent-ils se nouer tantôt par les formes (verbales ou écrites), par la remise d’une chose ou l’exécution d’une prestation, tantôt par le seul échange des consentements, pour ne parler que de la formation du C.<o:p></o:p>

    Toutes ces différences s’expliquent par les hasards de leur apparition mais n’ont aucune justification logique / théorique. On comprend mieux alors pourquoi le consensualisme n’a jamais triomphé, car l’admettre comme un principe supposait toute une construction théorique générale autour DU contrat.<o:p></o:p>

    <o:p></o:p>

    2° -  Le droit romain ignore LE contrat<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    Il n’y a pas en DR de corpus de règles, susceptible de s’appliquer à toutes les situations contractuelles (un droit commun du C). En DR, on n’a que des C spéciaux, pas ou peu de principes généraux : en effet, selon sa nature, chaque contrat-type est assorti de règles qui lui sont propres et qui diffèrent d’un C à l’autre.<o:p></o:p>

    Comparatif droit contemporain / droit romain

    <o:p></o:p>

    droit contemporain : on part du principe, de la règle générale, pour aboutir à une construction théorique (corpus de règles), qui est censée régir toutes les situations pratiques (il y a une unité dans la réglementation) : droit DU contrat

    <o:p></o:p>

    droit romain : on part d’une situation concrète et on crée une règle susceptible d’y répondre. A chaque situation contractuelle correspond une règle spécifique. D’où l’absence d’unité dans la réglementation : droit DES contrats.<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

    Cependant, il convient de nuancer un peu cette vision très empirique du DR des C. Car les jurisconsultes sont parvenus à dégager un certain nombre de règles générales (ie applicables à l’ensemble des C), ce que nous avons appelé la technique du C. L’effort de synthèse, d’abstraction, n’est donc pas complètement étranger au DR. Mais la construction reste inachevée. Le système jdq dans son ensemble – typologie des C [C spéciaux] et ébauche d’une technique du C – n’en est pas moins inestimable pour les juristes qui vont le redécouvrir 6 siècles plus tard. Le corpus iuris civilis redécouvert rassemble en effet une extraordinaire matière première. Nous aurons l’occasion de revenir sur l’impact de cette découverte majeure, intellectuellement et juridiquement décisive. Il faudra qd même attendre l’œuvre de Domat (XVIIe ) puis Pothier (XVIIIe ) pour que le travail de synthèse ébauché par les romains trouve son parfait achèvement. Pour autant, ne minimisons pas le degré de perfectionnement technique du DR, qui a constitué un matériau de réflexion précieux pour les juristes médiévaux, modernes et contemporains, et qui demeure le socle des droits modernes occidentaux.<o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

     <o:p></o:p>

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     <o:p></o:p>

     <o:p></o:p>



    [1] Y. Jeanclos, « Formalisme ou consensualisme : la sempiternelle querelle du droit des contrats », Hommages à Gérard Boulvert, 1987, p. 333

    [2] ibid.

    [3] Petite maxime : le formalisme fait gagner en sécurité ce qu’il fait perdre en liberté / le consensualisme fait perdre en sécurité ce qu’il fait gagner en liberté.


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