• Cours intégral - Fragments - 1ère partie, chap. I ( Modalités de la peine en droit romain)

    Modalités de la peine en droit romain

    (section 2, § 2, B)

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    L’arsenal répressif, peu diversifié à l’époque républicaine, s’enrichit considérablement sous le régime impérial (régime plus répressif, marqué aussi par l’inflation du droit pénal public).

    Trois types de peines sont à envisager : la peine de mort, les peines « inférieures à la mort », les peines pécuniaires et patrimoniales.

    <o:p> </o:p>1° -  L’évolution de la peine de mort<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>Depuis la Loi des XII Tables et tout au long de la République, cette peine est prévue par les textes, suivant des modalités très variées : décapitation par la hache, supplice de la croix, peine du sac, vivicombustion, précipitation de la roche Tarpéienne[1] (sans que les spécialistes aient pu se mettre d’accord sur la signification rituelle de cette panoplie).

    <o:p> </o:p>L’évolution est néanmoins marquée par un rétrécissement du champ d’application, deux raisons à cela :

    1° - Disparition de certaines incriminations capitales qui sont tombées en désuétude. On compte en effet 7 crimes capitaux dans la Loi des XII Tables ; il n’en reste plus que deux à l’époque des réformes criminelles de Sylla (crime contre l’Etat et homicide).

    <o:p> </o:p>2° - Enfin, au dernier siècle de la République, on assiste à la disparition de facto de la peine de mort : elle est prévue par les textes mais remplacée systématiquement par le bannissement (interdiction de l’eau et du feu), lors du prononcé. Le criminel encourt la mort, mais se voit appliquer l’exil (décalage entre peine encourue et peine prononcée).

    Alors pourquoi fulminer, en accord avec la tradition, une peine capitale et refuser en même temps de l’exécuter ? La justification se trouve dans un principe fondamental posé dès les XII Tables : l’exclusive compétence du peuple – et donc des comices – en matière capitale (réaffirmée par une loi de 123 av JC). Lorsqu’au début du premier siècle av JC le tribunal du peuple perd toute compétence criminelle au profit des jurys permanents[2], le jugement des crimes publics punis de mort relève logiquement de la compétence de ces derniers. Mais les judices (qui composent ces jurys) ne sont pas le peuple : il leur est donc impossible de condamner à mort. Le législateur, de son côté, lié par la tradition, ne peut renoncer à la peine capitale pour sanctionner les crimes les plus graves. Ces contraintes divergentes aboutissent à un compromis « étrange et quelque peu boiteux » (M. Humbert, « La peine en droit romain », op. cit., p. 178) : les crimes sont passibles de la peine de mort, mais les tribunaux compétents (jurys) ne peuvent dépasser la peine du bannissement, puisque la condamnation au dernier supplice leur est inaccessible.

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    Les choses changent avec le régime impérial qui devient de plus en plus répressif.

    Remise en vigueur sous le Principat, la peine de mort sanctionne effectivement les auteurs de crimes contre l’Etat – quelle que soit l’origine sociale – et le criminel de droit commun s’il est d’origine humble (humilior) → pour les honestiores, la peine de mort pour crime de droit commun prend la forme de la déportation définitive (cf. infra 2°).

    <o:p> </o:p>Le caractère spectaculaire des exécutions est alors de plus en plus marqué : on parle de supplices (supplicia).

    <o:p> </o:p>Ex / Avant la christianisation de l’empire (début IVe ap. JC), on pratique la condamnation aux bêtes dans le cirque, le supplice de la croix (deux supplices abolis par la suite à cause de l’hostilité de l’Eglise). Le supplice du feu est rétabli après une éclipse de plusieurs siècles.

    Au Bas-Empire, la politique répressive se renforce, servie par l’inflation du droit pénal public et le retour du principe de la légalité des peines (cf. infra C : « Les pouvoirs du juge dans le choix de la peine »). Le nombre des incriminations capitales s’est multiplié, alors que s’accentuent l’atrocité et le caractère spectaculaire des supplices : la mort s’accompagne de souffrances ostentatoires infligées au cours d’une agonie donnée en spectacle (torture mortelle).

    <o:p> </o:p>Ex / la mort par le feu (pour l’affranchi accusateur de son patron, l’esclave qui s’est uni à sa maîtresse, les juifs tourmentant leurs coreligionnaires convertis) ; la peine du sac, rétablie en 318 contre les parricides ; le supplice du plomb fondu dans la bouche (pour punir les nourrices complices d’enlèvement d’enfant)…

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    2°  - Les peines inférieures à la mort<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>Elles existent depuis la République (avec le bannissement).

    Elles connaissent un régime particulier à partir du règne d’Hadrien (117-138), puisque pour un même délit, elles diffèrent en fonction du niveau social du condamné.

    Quand les humiliores sont condamnés aux travaux forcés à temps ou à perpétuité (travaux de voirie, ou dans les mines), les honestiores sont condamnés à l’exil.

    L’exil revêt lui-même plusieurs formes :

    -         la forme traditionnelle de l’interdiction de l’eau et du feu (qui tombe en désuétude à l’époque impériale)

    -         la déportation perpétuelle (forme d’assignation à résidence assortie de la perte de citoyenneté et de la confiscation totale des biens) → équivalent de la peine capitale pour les honestiores (pour les crimes de droit commun)

    -         la déportation dans une île (in insulam) : perte de citoyenneté, confiscation totale des biens, mais laisse la liberté.

    -         La relégation : peine plus douce, temporaire, sans perte de citoyenneté ni confiscation des biens → simple assignation à résidence.


    <o:p> </o:p>3°  - Les peines pécuniaires et patrimoniales<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>Le droit pénal public développe le système de l’amende (qui sanctionne par exemple la méconnaissance des règlements administratifs). On applique aussi la confiscation totale ou partielle des biens (à titre principal ou accessoire), la confiscation spéciale portant sur un bien précis.



    [1] Cf. la légende de Tarpéia, fille de Spurius Tarpeius, chef de la garde du Capitole vers 550 AC (traîtresse qui livra la citadelle aux Sabins, ensevelie à proximité d’une roche qui porte son nom et d’où l’on précipite les traîtres, en « souvenir » du crime de Tarpeia.)<o:p></o:p>

    [2] On sait que les premiers jurys datent de 149 AC, mais la perte de compétence des comices n’est effective que plus tard, au début du premier siècle AC.


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